Mamadou Koulibaly sur la CEI en Côte d’Ivoire: Cela m’attriste terriblement…

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Mis en ligne par Lider News

Interrogé par le quotidien L’Inter, le président de LIDER, le Pr. Mamadou Koulibaly, avec son franc-parler habituel, fait part de sa profonde déception au vu de l’attitude de certains représentants de l’opposition et évoque les conditions pour battre Ouattara dans les urnes, en dépit du déséquilibre des moyens, des forces et de la commission électorale inféodée.

Interview par Kisselminan Coulibaly | L’Inter | 10 septembre 2014

Comment appréciez-vous la réélection de Youssouf Bakayoko comme président de la Commission électorale indépendante ?

Même si cet état des choses est décevant de la part d’un technocrate qui sort du consensus de Washington mais se comporte comme un potentat de village africain, il est dans la logique de l’action du candidat Ouattara qui consiste à verrouiller le processus et le système électoraux pour préparer, forcer et imposer sa victoire. Il faut quand même retenir que les choses ont commencé avec le Conseil constitutionnel anticonstitutionnellement installé, qui ferme depuis lors les yeux sur les violations flagrantes et récurrentes de la loi fondamentale par le président de la République, qui reste à la fois chef de l’Etat et président du Rdr. Il ne faut pas oublier que par la suite, entre autres actes illégaux, le président a installé une Commission électorale totalement à ses ordres, en violation de la Constitution. Que Bakayoko soit de nouveau installé comme président de la Commission électorale inféodée (Cei) est dans l’ordre normal de la fraude électorale dont il représente les préliminaires. Et cela est dommageable pour nous qui voulons le renforcement de la démocratie et qui rêvons de société ouverte, apaisée et tranquille. Dommage pour les gens de leur génération dont on se demande bien quelle leçon de morale ils donnent à leurs descendances, lorsque la triche devient officiellement leur mode de fonctionnement ? Après, comment s’étonner qu’aux examens, les enfants considèrent que la fraude soit moralement défendable ?

Vendredi dernier, lors des débats, cinq membres n’ont pas attendu l’élection du bureau de la CEI et ont claqué la porte. Que vous inspire cette situation ?

C’est à croire qu’en Côte d’Ivoire, les gens qui pensent que la norme de vie en société est la tricherie, la fraude, la violence et la lâcheté sont majoritaires. Il est décevant d’observer que le fait que la loi soit mauvaise ne gêne pas tant que cela, qu’on l’accepte parce qu’elle nous permet d’obtenir une rente, même si elle est anticonstitutionnelle. Désappointant tout ça. Il aurait fallu dénoncer la loi comme non conforme à la Constitution. Descendre dans les rues et exiger le respect de la Constitution. LIDER était seul à défendre de façon cohérente et rigoureuse le Droit et la Constitution avec ses amis de La 3ème Voie et des voix de la Convention de la société civile, de certaines associations de défense des droits de l’homme, ajoutées à celles de quelques députés courageux et de l’Udcy. Il faut croire que les défenseurs du droit sont très minoritaires dans notre pays, ce qui explique le règne des fraudeurs, de l’impunité et de la permissivité qui sont à la base de l’injustice. Ceux qui y sont allés et qui prétendent en claquer la porte sans vraiment en sortir maintenant vont préférer dénoncer les maigres parts qui leur ont été proposées pour leur participation à cette Commission, plutôt que le principe même de celle-ci: illégale dans sa conception, inique dans son organisation, déséquilibrée dans sa composition et évanescente dans ses attributions actuelles. Cela m’attriste terriblement. Ils croyaient probablement bien faire, mais ils doivent maintenant se rendre à l’évidence que Ouattara ne changera pas, ne changera plus dans sa logique de confiscation du pouvoir. Ils ont appelé leur attitude «la realpolitik». Ils se disaient opposés à la politique de la chaise vide, mais ne vont pas au bout de leur politique. Aucune conviction donc. Rien que de l’ambition ! Démoralisant tout ça! Et cela déprime l’homme que je suis et me blesse profondément dans mes amours pour la démocratie et pour la Côte d’Ivoire. Je n’ai même pas la force de commenter leurs attitudes ; celle de Ouattara est plus logique et a du sens. Je voudrais simplement réitérer mon souhait et mon appel à l’endroit de toutes ces personnes et leurs mouvements : Laissez vos illusions de côté, il est temps que nous nous engagions ensemble dans la mise en place d’une coalition pour le changement démocratique dans notre pays. Il n’y a que cette voie qui nous donnerait quelque chance de battre Ouattara aux prochaines élections, malgré ses calculs et ses moyens. Construisons ensemble la coalition de la victoire. Nous pouvons le faire si nous nous donnons un programme commun de gouvernement, un discours unique et simple, une équipe managériale cohérente et un candidat unique pour ce but commun. Faisons-le le plus tôt. Nous sommes à 13 mois des élections et il y a du travail à faire. Nous avons faim certes, mais oublions nos ventres pour le moment, serrons les ceintures, mettons-nous au travail et arrêtons de tergiverser dans des querelles de clochers. Il y a-t- il encore des hommes et des femmes de bonne volonté pour entendre cet appel et agir en conséquence? Oui, il y en a. Je continue de le croire.

Voyez-vous dans le couac observé, vendredi, un mauvais présage pour les futures élections ?

Oui. Un très mauvais présage. Nous ne sommes même pas encore à la phase de la liste électorale et voilà déjà les signes annonciateurs de la fraude et de la violence. Dois-je rappeler que c’est la commission électorale qui aura la charge d’établir cette liste? Dois-je rappeler que, de par les faiblesses du code électoral, c’est le président de la République qui est le vrai administrateur des élections chez nous? Les choses se présentent mal. Nous avons dénoncé et continuons de dénoncer une commission électorale qui ne peut avoir la forme de celle mise en place et éviter les conflits, car elle est une association de gens en conflits permanents. Elle devrait être indépendante des partis politiques et du gouvernement. Ce que nous voyons, ce sont des conflits avant même l’enjeu électoral. Que se passera-t-il quand nous serons dans la phase de la confection de la liste électorale ? Dans celle de la campagne électorale ? Le jour des élections ? Lors de la transmission des résultats ? Lors de leur proclamation ? Je pense que c’est clair. Non ?

LIDER a décidé de ne pas être dans la Cei alors que son président a annoncé qu’il se porterait candidat contre Alassane Ouattara. Quelle est cette logique ?

C’est la logique d’un parti qui, malgré tout, garde foi dans le fait que d’ici la date des élections, et avec les travaux engagés au sein de la coalition de La 3ème Voie, l’on arrivera à réveiller tous les démocrates de ce pays, à les remobiliser, à les mettre en ordre pour aller insuffler au pays profond que nous pouvons battre Alassane Dramane Ouattara, malgré les moyens infinis de l’État et les Frci dont il dispose. Mais pour cela, il faut que nous soyons logiques avec nous-mêmes. Si le matin nous sommes des opposants à Ouattara, il faut le rester jusqu’au soir. Si lundi, nous sommes des opposants à Ouattara, il faut le rester jusqu’à dimanche. Si en janvier, nous sommes des opposants à Ouattara, il faut le rester jusqu’en décembre. C’est seulement ainsi qu’ensemble, nous réussirons.

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