Côte-d’Ivoire « Supprimons l’article 35 sans le référendum » (Venance Konan)

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Elimination des discriminations et droits civils et politiques

Par Venance Konan

J’ai découvert deux conventions internationales que la Côte d’Ivoire a signées et ratifiées qui me semblent intéressantes à connaître, et qui pourraient nous éviter les palabres inutiles que je vois poindre à l’horizon. La première est « la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale », adoptée et ouverte à la signature et à la ratification par l’Assemblée générale des Nations Unies dans sa résolution 2106 A(XX) du 21 décembre 1965. Cette convention a été ratifiée par notre pays le 4 janvier 1973. La seconde est « la Convention internationale relative aux droits civils et politiques », adoptée et ouverte à la signature, à la ratification et à l’adhésion par l’Assemblée générale dans sa résolution 2200 A (XXI) du 16 décembre 1966. Ce texte a été ratifié par la Côte d’Ivoire le 26 mars 1992.
Tout le monde peut consulter ces textes en allant sur n’importe quel moteur de recherche.
Que disent ces conventions qui pourrait nous intéresser ? La première convention dit ceci en son article premier : «dans la présente Convention, l’expression « discrimination raciale » vise toute distinction, exclusion, restriction ou préférence fondée sur la race, la couleur, l’ascendance ou l’origine nationale ou ethnique, qui a pour but ou pour effet de détruire ou de compromettre la reconnaissance, la jouissance ou l’exercice, dans des conditions d’égalité, des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans les domaines politique, économique, social et culturel ou dans tout autre domaine de la vie publique. »
La seconde convention déclare : « les Etats parties au présent Pacte s’engagent à respecter et à garantir à tous les individus se trouvant sur leur territoire et relevant de leur compétence les droits reconnus dans le présent Pacte, sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou de toute autre opinion, d’origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation. » La même convention dit en son article 25 : « tout citoyen a le droit et la possibilité, sans aucune des discriminations visées à l’article 2 et sans restrictions déraisonnables : a) de prendre part à la direction des affaires publiques, soit directement, soit par l’intermédiaire de représentants librement choisis ; b) de voter et d’être élu, au cours d’élections périodiques, honnêtes, au suffrage universel et égal et au scrutin secret, assurant l’expression libre de
la volonté des électeurs ; c) d’accéder, dans des conditions générales d’égalité, aux fonctions publiques de son pays. »
L’article 26 pour sa part proclame que : « toutes les personnes sont égales devant la loi et ont droit sans discrimination à une égale protection de la loi. A cet égard, la loi doit interdire toute discrimination et garantir à toutes les personnes une protection égale et suffisante contre toute discrimination, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique et de toute autre opinion, d’origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation. » Enfin, le Comité des Droits de l’Homme des Nations Unies, seul organe habilité par les Etats parties à interpréter le pacte avait fait cette observation en 1996 : « l’application effective du droit et de la possibilité de se porter candidat à une charge élective garantit aux personnes ayant le droit de vote un libre choix de candidats.
Toute restriction au droit de se porter candidat, par exemple un âge minimum, doit reposer sur des critères objectifs et raisonnables. Les personnes qui à tous autres égards seraient éligibles ne devraient pas se voir privées de la possibilité d’être élues par des conditions déraisonnables ou discriminatoires, par exemple le niveau d’instruction, le lieu de résidence ou l’ascendance, ou encore l’affiliation politique. Nul ne devrait subir de discrimination ni être désavantagé en aucune façon pour s’être porté candidat. »
Qu’est-ce que tout cela veut dire ? Cela veut dire que lorsqu’une personne est reconnue ivoirienne, elle ne devrait subir aucune des discriminations décrites dans ces conventions si elle veut prendre part à la direction des affaires publiques, ou si l’on veut, si elle veut être élue. Cela veut dire que notre constitution adoptée en 2000 n’a aucune valeur, parce qu’elle pratique une discrimination basée sur l’ascendance en indiquant que les candidats au poste de président de la République devraient être Ivoiriens de père et de mère eux-mêmes ivoiriens. L’exigence aurait dû s’arrêter au fait d’être Ivoirien. Le droit est très clair : lorsque nous sommes partie à une convention internationale, si elle entre en conflit avec notre constitution, c’est à nous de modifier notre texte fondamental pour le rendre conforme à la convention que nous avons librement signée et ratifiée. Je crois que la logique est claire.
Si cette convention viole notre constitution et que nous ne voulons pas modifier celle-ci, nous n’adhérons tout simplement pas à la convention. Donc, si nous avons déjà ratifié une convention qui interdit les discriminations, nous ne pouvons pas venir adopter des textes qui discriminent de manière aussi évidente. Tant que nous sommes parties à ces conventions, nous ne pouvons pas adopter des textes qui les violent de façon aussi flagrante. L’article 35 de notre constitution viole tout simplement un engagement international signé et ratifié par notre pays. Par conséquent, il n’a aucune valeur. Nous n’avons donc pas besoin de référendum pour enlever cet article. Il suffit de constater son illégalité pour le rendre caduc et ne pas l’appliquer.

Venance Konan.

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