Côte d’Ivoire – Le retour du Front populaire ivoirien

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Simone Gbagbo, à son arrivée au tribunal d’Abidjan, le 23 février 2015. © ISSOUF SANOGO / AFP PHOTO

Par Macaire Dagry

Le lundi 23 février 2015, la cour d’assise d’Abidjan s’est transformée en véritable tribune politique pour 83 dirigeants du Front populaire ivoirien (Fpi), jugés pour divers chefs d’accusation. Mieux encore, cette salle d’audience ainsi que les abords du palais de justice se sont transformés en ring, opposant les militants du Fpi et les membres du collectif des victimes de la crise postélectorale de 2011. A quelques mois de l’élection présidentielle ivoirienne, l’occasion était trop belle pour ne pas la saisir et la transformer en estrade politique, devant plusieurs médias nationaux et internationaux, médusés.

Guerre de communication politique

En cette année électorale, comment comprendre qu’un tel procès si sensible, se déroule maintenant ? Pour les partisans du pouvoir, en l’organisant à quelques mois de cette élection tant attendue par les uns et les autres pour des raisons opposées, « c’est bien la preuve que le calendrier judiciaire, n’est pas soumis à celui de l’exécutif ». Toutes griffes dehors, ceux du Fpi, répliquent avec force, en dénonçant « une mascarade politique ». Pour eux, « bien au contraire, la justice est aux ordres dans ce procès politique. En l’organisant maintenant, l’exécutif déroule enfin son plan qui est d’organiser un simulacre de procès pour éliminer politiquement des adversaires ». En réalité, peu importe qui a réellement raison ou tort dans cet affrontement politique entre les uns et les autres. Quelle que soit l’issue de ce procès, le ton est donné. Jusqu’au bout, les accusés feront tout ce qui est en leur pouvoir pour donner l’image d’un procès politique à l’opinion internationale. Selon un des militants du Fpi, « maintenant que nous sommes dans l’opposition, l’opinion internationale, notamment les médias, seront de notre côté, comme lorsque nous étions dans l’opposition, avant d’accéder au pouvoir en 2000 ». En effet, la plupart de ces médias répètent en boucle que « seuls les partisans de Laurent Gbagbo emprisonnés suite à la crise postélectorale de 2011, sont sur le banc des accusés ». Ce qui sous-entend sans doute, que d’autres acteurs de cette période douloureuse devraient être également interpellés. C’est désormais une guerre de communication politique qui s’ouvre à travers ce procès.

L’ingérence française en Côte d’Ivoire

L’ex première dame de Côte d’Ivoire sait désormais que l’exécutif ne prendra pas le risque de la livrer à la Cour pénale internationale (Cpi), ni la garder éternellement emprisonnée. Elle sait aussi qu’en l’absence de son mari, incarcéré à la Cpi, en sa qualité de co-fondatrice du Fpi, elle peut jouer un rôle très important dans celui-ci. Ce procès qu’elle veut politique, et pour cela, elle transforme la cour d’assise en lieu de meeting, est donc une occasion pour Simone Gbagbo de tenter de revenir dans le jeu politique national. Face à ses militants, remontés contre l’exécutif, elle continue à leur servir la recette qui a fait sa popularité dans les couches populaires du Sud du pays et pour certains, adeptes de certaines églises évangélistes qui continuent à vouer une haine sans fondement au président Ouattara. En disant à la cour d’assise, que « la crise postélectorale est née du refus de Ouattara de respecter la décision du peuple… » ; Ou, « De quoi Sarkozy se mêle-t-il ? » en dénonçant « l’ingérence française en Côte d’Ivoire…. » ; Ou encore, « les troupes rebelles de Soro, appuyées par l’Onu et les forces françaises ont massacré les populations civiles… », Simone Gbagbo sait qu’elle touche là, l’inconscient de milliers d’individus pour qui la haine de la France, de la personne du chef de l’Etat et de celle du Président de l’Assemblée Nationale demeure toujours vive. Le résultat était immédiat ce lundi 23 février à la cour d’assise d’Abidjan. Des centaines de partisans, en mode hystérique, se sont alors déchainés à l’écoute de ces propos. C’est ce que les psychologues appellent « le réflexe pavlovien ». Ces accusations maintes fois entendues, font toujours l’effet d’un stimulus dans le cerveau déjà conditionné de ses partisans, qui répondent automatiquement, comme par réflexe.

 

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