Côte d’Ivoire – Evitons à notre pays des élections à hauts risques

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PRAO Yao Séraphin

La classe politique est en activité depuis quelques mois. Les candidats déclarés s’affairent pour les futures élections présidentielles. Ces élections sont prévues pour octobre 2015. Encore une fois, le monde entier attend des Ivoiriens une certaine maturité. C’est donc dire que ces futures élections constituent un challenge que nous devons relever. Et pourtant, les conditions d’une élection transparente, ouverte et apaisée, ne sont pas réunies. Dans les lignes qui suivent, nous présentons deux schémas possibles pour éviter à notre pays, les querelles inutiles.
Première hypothèse : Le respect de la date d’octobre 2015
En visite dans le gbêkê, en 2013, le Président Ouattara s’exprimait en ces termes : « Les élections présidentielles auront bien lieu en octobre 2015. Moi je ne vais pas essayer de rattraper le temps qui m’a été volé à cause de la crise postélectorale ». Il est souhaitable que les élections se tiennent à cette date pour respecter les textes de notre constitution et du code électoral. Pour ce faire, certaines conditions doivent être réunies. L’on se souvient des élections présidentielles de 2010. La violente crise qui s’en était suivie, et qui ne s’était achevée qu’avec la capture de Laurent Gbagbo le 11 avril 2011, avait fait plus de 3.000 morts dans le pays. Pour ma part, il y a des chantiers à défricher avant d’aller à ces élections. Le désarmement des ex-combattants n’est pas fait. En Côte d’Ivoire, selon des statistiques officielles, plus de 100 000 armes circulent dans l’illégalité. En outre, le Directeur General de l’ADDR, Fidèle Sarassoro a révélé que, sur 28.472 ex-combattants qui restent à réinsérer, 18.171 sont introuvables. Où sont-ils et que feront avec leurs armes en octobre 2015 s’ils ne sont pas contents des résultats ? Aujourd’hui, est-ce que tous les candidats peuvent faire campagne dans le nord et des zones ex-CNO ? En plus de cette épineuse question du désarmement, la commission électorale indépendante (CEI) pose problème. Monsieur Youssouf Bakayoko est disqualifié pour organiser des élections propres en Côte d’Ivoire à cause de son passé. Même la composition de la CEI la rend trop dépendante du pouvoir. Les récentes modifications du code électoral sans consulter les opposants laissent penser à une tentative de passage en force du pouvoir actuel. Si le Président Ouattara veut organiser les élections en octobre 2015, alors il devra demander de l’aide à la France et aux forces onusiennes pour sécuriser les élections. Il devra également accepter de discuter avec son opposition sur la composition de la CEI et la révision du code électoral. Nous constatons aujourd’hui que la question de la réforme du code électoral ainsi que l’enrôlement des électeurs ou encore, l’installation des CEI locales, reste la seule affaire du camp présidentiel. Ce qui n’augure rien de bon pour les joutes électorales à venir. Aller aux élections dans les conditions actuelles, c’est décider de tuer encore les Ivoiriens.
Deuxième hypothèse : reporter les élections, former un gouvernement de missions pour préparer des bonnes élections
Comme les pays sont jaloux de leur souveraineté, il serait bon que les Ivoiriens organisent eux-mêmes, les futures élections dans la paix. Les Ivoiriens ont peur d’être victimes d’intimidation politique ou de violence lors des campagnes électorales. C’est ce qui ressort d’une enquête menée par l’équipe Afrobaromètre en Côte d’Ivoire, dirigée par le Centre de recherche et de formation sur le développement intégré (Crefdi). «Neuf Ivoiriens sur dix (9/10) trouvent que les électeurs sont menacés de violence dans les bureaux de vote», relève Afrobaromètre. Pour une élection présidentielle apaisée en 2015, l’étude a pu faire connaître les suggestions des Ivoiriens. Ceux-ci préconisent, entre autres mesures efficaces, la libre expression des candidats sur toute l’étendue du territoire national (92%) et le respect du verdict des urnes (92%). Pour régler tous ces problèmes et préparer des élections crédibles et apaisées, il faut au moins 16 mois. Ce qui n’est pas conforme à la date d’octobre 2015. La Côte d’Ivoire n’a pas le droit se servir encore au monde entier, le spectacle ridicule qu’on a connu en 2010 et 2011. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, il est bon que les échéances électorales soient préparées de façon consensuelle et inclusive, afin qu’elles se déroulent dans un climat apaisé et que leurs résultats soient acceptés de tous. Et comme après fin octobre, le gouvernement actuel sera forclos, toute la classe politique devra former un gouvernement de missions pour préparer les futures élections. Théoriquement, ces élections peuvent se déroulées en octobre 2016. Cela nous permettra d’approfondir le dialogue politique pour trouver un consensus pour des élections apaisées, inclusives et transparentes.

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