Ahoua Stallone, candidat en Côte d’Ivoire pour battre Ouattara en 2015

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Interview par S. Debailly Connectionivoirienne.net

– Ce qui le motive
– Son projet de société innovant inspiré du système social américain

Beaucoup l’ont découvert aux côtés de Charles Blé Goudé aux premières heures de la galaxie patriotique. Bien avant, Ahoua Stallone fut président du Mouvement ivoirien pour le rapatriement d’Alassane Ouattara (Mirao). Audacieux et fertile en idées, Ahoua Stallone n’a pas que milité dans les mouvements politiques. Il a été dirigeant sportif en tant que président du Hiré Football Club, qu’il a réussi à positionner en ligue 1 ivoirienne après avoir bâti un stade qui fait la fierté de la petite cité minière. En exil depuis la fin du régime Gbagbo, le natif de Hiré nourrit un rêve : être président de la République. Gageure ? Ambition irréaliste ? L’ivoirien désormais formaté « American boy » veut y croire. Il en parle dans cette interview en exposant un pan de son projet de société ‘’novateur’’ inspiré de son rêve américain. Il aborde aussi des sujets de l’actualité nationale

Votre candidature à la présidentielle est-elle un simple coup de pub ou alors une affaire sérieuse ?

Les Ivoiriens sont assez sérieux pour qu’on bluffe avec eux. Je vais toujours jusqu’au bout de ce que je m’assigne comme objectif. Nous ne sommes nullement en train de plaisanter.

Qu’est-ce qui vous motive tant au moment où la Côte d’Ivoire vit une situation marquée par le recul de certains acquis démocratiques ?

L’amour pour mon pays, la volonté de réconcilier les Ivoiriens dans leur diversité. La volonté de faire revenir tous les exilés. La constitution ivoirienne en son article 12 est claire. Aucun ivoirien ne doit être contraint à l’exil. Il faut mettre fin à cet état de faits qui semble ne pas être une préoccupation des tenants du pouvoir.

Et qu’est-ce qui vous rassure quand on sait que vous êtes loin de votre pays depuis bientôt 5 ans ? Et vous voulez faire revenir les exilés alors que vous-mêmes, êtes encore en exil. N’est-ce pas paradoxal ?

Laissez-moi vous dire cher ami que depuis 2011, J’ai parcouru au moins dix pays d’Afrique dont l’Afrique du sud, le Cameroun, le Maroc, Le Bénin, Le Rwanda, Le Togo, le Nigeria. J’ai vu parmi nos frères et sœurs ivoiriens, certain qui n’avaient rien à avoir avec la politique qui ont été contraints à l’exil, contraints soit à cause de leur religion, soit à cause de leur ethnie ou simplement à cause de certains règlements de compte. Il y a des camps de réfugiés dans lesquels vous trouverez de hauts cadres, sous des bâches, attendant quelques mains généreuses pour survivre. Des familles disloquées, des enfants qui ne vont plus à l’école, des emplois perdus… Moi-même avant de sortir de l’Afrique j’étais au Ghana. Dans ce pays, vous devez souvent payer une caution de 2 à 3 ans pour pouvoir vous loger. C’est malheureusement la triste réalité. Nos amis meurent par faute de moyens et il n’y a aucune oreille attentive. Ne sont-ils pas ivoiriens ? Nous sommes en exil mais nous ne vivons pas les mêmes réalités. Il nous faut éviter un autre syndrome. Sinon cela risque plus tard d’être un chemin inverse pour d’autres. Ce que nous ne souhaitons pas pour le moment. Parce que les Ivoiriens ont trop soufferts.

Avec cette candidature est-ce que vous mettez de côté le combat pour la libération de Gbagbo ? Autrement, quel est le sens de votre candidature ?

Ce que vous devez retenir est que jamais nous ne rechignerons dans notre volonté de faire éclore coûte que coûte la vérité et notre priorité non négociable demeure la libération du Président Laurent Gbagbo, du camarade Charles Blé Goudé, de la première dame Simone Gbagbo et de tous les autres prisonniers politiques. Vous comprendrez plus tard le sens de notre candidature. Le chemin le plus court n’est pas toujours le chemin le plus rapide.

C’est-à-dire ?

C’est-à-dire, ne mettons pas la charrue avant les bœufs.

Mais ne pensez-vous pas que les gens ont quand même besoin de connaître vos motivations maintenant pour s’engager avec vous ?

Notre projet de Société et notre programme de gouvernement seront à coup sûr un élément catalyseur. Pour le moment, nous sommes à la phase de l’opérationnalisation. Pour le moment, il y a le problème crucial de l’inéligibilité du chef de l’Etat actuel pour l’élection présidentielle d’octobre 2015. L’article 35 ne le lui permet pas. Il ne peut pas utiliser l’article 48 non plus. Parce que toutes les institutions fonctionnent. Les pouvoirs publics fonctionnement, la Côte d’Ivoire tient ses engagements internationaux. Les Ivoiriens sont inquiets pour les mois à venir. Il faut dès maintenant prévenir tout ceci pour qu’on évite cela au peuple qui a trop souffert.
Pour revenir à ma question est-ce que vous êtes de ceux qui disent « prenons le pouvoir alors seulement la libération de Gbagbo et de Blé Goudé deviendra possible » ?
Avec ou sans le pouvoir, leur libération est possible et nous avons foi.

Parlons de la Côte d’Ivoire. Qu’est-ce que vous voulez faire de plus qui n’ait été fait pour vouloir être président de la République ?

Parce que selon vous tout est parfait ? Je vous pose une petite question. Savez-vous qu’en Suisse et en Allemagne il n’y a pas de péage?

Répondez-y SVP!

Nous avons plusieurs projets pour que l’Ivoirien puisse aider l’ivoirien à se prendre en charge. Cela mettra fin non seulement au chômage mais aux rebellions. C’est parce que les jeunes n’ont pas d’emplois qu’ils s’adonnent à la facilité. On ne peut pas avoir vécu là où nous vivons en ce moment sans avoir un projet fiable pour la création d’emplois. Je prends par exemple le cas de mon secrétaire national à la santé. Il est l’un des meilleurs neurologues du monde. Un ivoirien, directeur d’un département de Neurologie aux Etats-Unis. Il faut être calé pour occuper ce poste devant des Américains. Nous ferons de la santé pour tous, une réalité. Bref, les Ivoiriens apprendront à rêver avec cette nouvelle génération. Notre programme de Société repose sur la démocratie au plan politique, le libéralisme au plan économique et la solidarité au plan social.

Encore des promesses diraient les ivoiriens !

Nous n’avons pas encore dit que nous allons distribuer des milliards par région, ni construire 5 universités en 5 ans. Notre programme pour développer la Côte d’Ivoire sera inspiré du fonctionnement des pouvoirs publics dans ces différents pays développés dans lesquels nous vivons. Nous sommes très fertiles en idées. Une de nos priorités sera de donner à chaque ivoirien une adresse. Cela pourra nous amener à identifier tout le monde mais surtout à permettre à chaque habitant de refaire confiance à notre système de distribution des courriers. Comme vous pouvez le deviner, avec nous, notre pays sortira de la léthargie de cette génération des héritiers d’Houphouët-Boigny.

Revenons à la question de l’emploi que vous évoquez et expliquez-nous un peu votre plan pour l’auto-emploi. Combien comptez-vous en créer par an et dans quel domaine prioritaire ?

Je vais vous donner un petit exemple sans dévoiler le reste de notre programme. Aux Etats-Unis, quand vous travaillez, vous touchez votre ‘’paycheck’’ chaque semaine, d’autres le touchent toutes les deux semaines. On vous coupe différentes taxes. A la fin de l’année, l’Etat fédéral et le Gouvernement vous font des ‘’taxes return’’. C’est-à-dire qu’on vous redonne tout ce qu’on vous a prélevé. L’Etat fédéral et le Gouvernement vous ajustent ou vous augmentent selon votre statut. On va copier ce système et l’adapter à notre pays. Tous les salariés pourront connaitre un petit abattement d’environ 1 à 2%. Cela s’appellera l’impôt au développement par exemple. Cette taxe prélevée pourra nous permettre d’emprunter sur le marché. Si ces montants peuvent atteindre par exemple 20 à 30 milliards par mois. Avec cette garantie par mois, nous pourrions emprunter des sommes colossales qui serviront à créer des usines et des unités de transformation pour donner de l’emploi. On pourra étendre ce procédé aux collectivités territoriales. Ne nous faites pas dérober notre programme. (Rires). Ce programme s’appellera les AAA, les Africains Aident les Africains. C’est juste un pan.

Et l’assurance maladie telle qu’implémentée par le gouvernement actuel vous agrée-t-elle ?

Le fait de dire que les gens vont se soigner gratuitement est banal. Le problème est que les hôpitaux sont vides. Il n’y a aucun matériel pour faire les diagnostics. Le problème qui se pose, c’est comment reconfigurer le système de santé pour rendre les hôpitaux plus compétitifs afin que chaque hôpital puisse se prendre en charge. Cela permettra à l’Etat de se décharger des dépenses inutiles. L’Etat dépense des milliards à payer les salaires des médecins et infirmiers sans que la population n’en profite. Voici le vrai problème. Tout ce que l’Etat met dans la santé est pour la plupart consacré aux salaires des médecins, infirmiers et aux mutuelles des agents de l’Etat où il y a beaucoup de fraudes et malversations. Il faut que chaque hôpital soit autonome et que chaque hôpital arrive à gérer son personnel tout en respectant la vision de l’Etat. Chaque hôpital paiera donc ses fonctionnaires et cela va créer la compétitivité. Et la volonté de chaque hôpital de produire le meilleur peut mettre fin à la nonchalance de certains médecins qui préfèrent travailler dans leur clinique au détriment de l’Etat.

Vous voulez être candidat mais est-ce que la préparation de la présidentielle et le climat préélectoral vous rassurent-ils ?

Il y a un premier obstacle qu’il faut régler. C’est le cas de l’inéligibilité du chef de l’Etat actuel. C’est la clé de voute. La démission du Président du conseil constitutionnel n’est pas faite pour rassurer l’observateur de la politique ivoirienne. Alassane Ouattara évoque la jurisprudence Gbagbo pour être candidat mais il n’ignore pas que la jurisprudence est une décision de justice qui sert de référence. A ce que je sache, le président Gbagbo n’était pas un juge. Arrêtons de jouer avec les Ivoiriens. Le mandat exceptionnel du chef de l’Etat va prendre fin en octobre. Après ça, nous allons demander une transition pour permettre des élections libres, crédibles et transparentes. C’est très clair et nous serons dans notre droit.

Faut-il encore s’attarder sur l’inéligibilité de Ouattara quand on sait qu’il a déjà été chef de l’Etat ?

Selon vous, la constitution devrait-elle être contournée ? Si oui, quelle sera notre boussole ? Chacun fera ce qu’il voudra si la constitution n’est pas respectée. C’est le B A BA de la gouvernance.

Quel commentaire faites-vous de la crise au Fpi ?

Ce que les uns et les autres doivent comprendre, c’est que, unis on sera plus fort. La division vient du diable et comme nous ne sommes pas des descendants du diable, ils doivent mettre de côté leurs egos et parler d’une seule voix. Divisés, ils ne feront que faire sourire l’adversaire.

Qu’est-ce qu’ils doivent faire concrètement au regard des positions désormais inconciliables ?

J’aurais été à la place du premier ministre Pascal Affi N’guessan que le premier pas que j’aurais posé serait d’aller apporter la compassion du parti au Président Laurent Gbagbo. Il pouvait à travers les ambassadeurs qu’il a rencontrés négocier et se placer à la tête de la commission pour la libération du Président Gbagbo. Je le dis parce que j’ai vu la motivation des Ivoiriens qui avaient commencé à cotiser pour le parti. Regardez aujourd’hui ces mêmes militants qui le traitent de paria. Il y a un problème de confiance dû aux démarches qu’ils ne comprennent pas souvent. Maintenant dans la situation actuelle, je demande un peu de lucidité à tous en se mettant à la place du Président Laurent Gbagbo avec un schéma inverse. C’est-à-dire, eux en prison, et le président Laurent Gbagbo en liberté, ce qu’il aurait fait pour qu’ils recouvrent la liberté. Il l’a démontré quand Anaky Kobénan était en prison sous le président Houphouët-Boigny. Quand on a appris auprès d’un grand homme, cela se voit. Toute cette division permet à Alassane Ouattara de régner.

Ahoua Stallone candidat indépendant ou candidat d’un parti politique ?

Je suis Président du MDCI (Mouvement pour la démocratie en Côte d’Ivoire. Nous allons porter les couleurs dudit parti.

Quel souvenir gardez-vous de la galaxie patriotique et quelle leçon tirez-vous de voir l’un des vôtres, Charles Blé Goudé à La Haye ?

Je pense qu’à travers la galaxie patriotique, les Ivoiriens épris de légalité et d’amour pour leur patrie ont fait un seul corps avec nous. Ils ont été auprès de nous pour dire non à ceux qui ont planté le glaive dans le sein de la mère-patrie. C’est vraiment dommage qu’on nous serve le schéma contraire en déportant Charles Blé Goudé à La Haye en lieu et place des assassins. Le monde est assez paradoxal. Mais nous sortirons de là. Dieu est un Dieu de justice. C’est juste des périodes creuses de notre histoire à nous.

Les Eléphants de Côte d’Ivoire ont remporté la Can 2015. Quel commentaire le dirigeant sportif et le politique tirent-ils de cette deuxième victoire longtemps cherchée ?

Il faut dire que le meilleur facteur de réconciliation, de cohésion sociale et de rapprochement, c’est le sport. Le politique attend un message fort de la part du sportif. Si le politique est incapable de booster le processus de réconciliation, on peut trouver dans le sport un élément d’unification de notre peuple. Je vous donne un exemple très clair. Quand Didier Drogba a eu son ballon d’or et qu’il avait décidé d’aller le présenter à Bouaké, alors que le pays était divisé en deux, les Ivoiriens sont venus ce jour-là des quatre coins du pays. On a eu l’impression que les fils de la Côte d’Ivoire venaient de se donner la main. Cette victoire est Le fruit d’une bonne complicité et d’une solidarité sans faille entre dirigeants, entraineurs et joueurs. C’est une belle leçon que nous donne le sport. Si les fils et filles de la Côte d’Ivoire de tout bord politique pouvaient comprendre que nous sommes avant tout ivoiriens avant d’être dans les groupements politiques, il y a des actes que certains n’auraient pas posés.
Quand nous avons nous-même, par deux fois, organisé les galas de la réconciliation avec les footballeurs professionnels, les Ivoiriens sont venus de partout. Ensuite, nous avons eu l’audace de faire jouer ensemble une coalition Forces nouvelles/FDS contre une autre coalition Onuci / Licorne. C’était plaisant et cela n’était pas évident à cette époque.

Par S. Debailly via Facebook

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