Congo-Brazzaville – Quand des Francs-Maçons écrivaient à leur « Frère » Sassou Nguesso

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A son excellence Monsieur le Président de la République du Congo

A NTCF et TRGM

Monsieur le Président,

Ne pouvant restés indifférents face à la situation de notre pays, et nous référant à la pensée d’un illustre chantre de la liberté et de la non-violence, le Révérend Pasteur Martin Luther KING, que nous citons : « Nos vies commencent à prendre fin, le jour où nous devenons silencieux à propos des choses qui comptent », fin de citation,

Ainsi qu’en nous remémorant votre propre appel au soulèvement des démocrates du Congo et du monde, face aux velléités de népotisme du Président Lissouba,

Nous venons respectueusement par la présente vous exprimer notre modeste point de vue.

Notre pays le Congo est à la croisée des chemins dans un monde en pleine mutation. Pour l’intérêt de tous et celui des générations futures, nous pensons que la parole et les actes des hommes politiques doivent avoir du sens. Et l’éthique politique voudrait que l’homme ou le responsable politique place l’intérêt du pays au-dessus de toute autre considération.

Il est indéniable pour tout observateur que toutes les violences politiques qui ont eu lieu dans notre pays depuis son indépendance ont pour seule origine les joutes électorales, et plus précisément les rivalités dans l’accès au pouvoir et les stratégies dilatoires pour sa confiscation par le camp aux affaires. Ce qui dénote d’une incapacité à appliquer les dispositions constitutionnelles en matière d’alternance. Aussi le climat actuel nous amène à nous poser la question de savoir si les acteurs politiques congolais aiment leur pays, puisque même les acquis de la conférence nationale souveraine sont aujourd’hui remis en cause. Si les politiques ne peuvent sauvegarder les acquis obtenus après de grandes messes nationales, à quoi servent ces dialogues ?

Monsieur le Président,

Il est impossible de construire un pays en opposant une partie du peuple contre une autre ; une nation ne peut se bâtir que dans la paix et la concorde ; les hommes passent les Nations restent. Nous considérons le débat sur les institutions comme une polémique dilatoire et inopportune, car s’il y a une question essentielle dont personne ne veut parler même au sein du PCT, c’est celle de la satisfaction des besoins fondamentaux du peuple. Le changement de constitution va-t-il résoudre cette question essentielle ?

Evoquer le sujet sur l’évolution des institutions la veille d’une élection majeure c’est mettre sciemment le feu aux poudres. Cette question bien qu’importante doit être analysée dans le calme et la sérénité en prenant le temps nécessaire, et en donnant des possibilités d’expression égales à toutes les parties prenantes. Ce qui n’est pas le cas. Ce débat porté et instrumentalisé par le PCT mène le pays dans une impasse, qui pourrait engendrer à nouveau des violences, dont le peuple subirait encore comme par le passé les lourdes conséquences.

La violence sera et restera un frein à l’unité nationale, de nombreux crimes et assassinats politiques, élucidés ou non, demeurent à ce jour des éléments bloquants. Il faut donc éviter d’en rallonger la liste. Surtout qu’à chaque crise ce sont des innocents qui ont font les frais.

TCF et TRGM,

La culture que nous avons en partage dit que la binarité est une constante de la vie humaine ; ainsi toute chose a un début et une fin, et que rien n’est éternel. Vous êtes à l’aube de votre descente de charge par rapport au contrat que vous avez scellé avec le peuple congolais, et pour lequel vous avez prêté serment. Nous croyons et pensons que vous êtes liés par votre serment. Nul ne doit et ne peut vous en détourner, car ce serait un parjure. Cela ne vous échappe pas qu’aucun homme n’est irremplaçable, et en tant qu’humaniste vous ne pouvez renier votre serment. Tout comme vous avez conscience qu’aucune œuvre n’est jamais parfaite ni achevée. De l’Orient où vous êtes, vous vous entendez répondre à chaque fin de tenue, que l’ouvrage quotidien n’est jamais fini ; nous rentrons les outils même si la pierre est à peine dégrossie et que c’est en persévérant et en comptant sur la contribution des générations futures à l’édifice que nous espérons parvenir à la polir.

Ne pas respecter votre serment serait commettre un parjure. Mais que vaudra alors la parole de l’humaniste et de l’homme politique dans notre pays ; dans un pays où la culture citoyenne est encore en construction ? Quelle sera l’image des humanistes dans la cité, déjà qu’elle est largement écornée ? Quelles hautes valeurs morales allons-nous répandre dans la cité, dans le prolongement de nos travaux ? N’est-ce pas l’occasion de nous donner un peu d’honorabilité ?

Nul homme n’est parfait mais tout humaniste doit faire au mieux pour être un digne héritier de nos illustres anciens qui ont bâti l’Europe et les Etats Unis d’Amérique pour faire du Congo une nation moderne où l’homme doit rester le centre de toutes les préoccupations. Il n y a ni vénérable ni grand Maître à vie.

Quels que soient nos grades et qualités en loge, l’humilité consubstantielle à notre engagement veut que ce soit au pied du mur qu’on voit le Maçon. D’où les interrogations suivantes qui taraudent tous les enfants de la veuve : à cette croisée des chemins de l’histoire du Congo et à cette confluence des considérations profanes et sacrées, que donnerez-vous à voir, dans les jours et mois à venir, à l’humanité qui vous regarde ? Quelle leçon d’humanisme, d’abnégation, d’élévation et de grandeur d’âme entendez-vous laisser de votre vie presque toute entièrement consacrée à la vie politique du Congo ? Que doivent retentir vos jeunes frères, apprentis, compagnons et maîtres de votre obédience, et au-delà, de votre Magistère ?

Monsieur le Président,

Nous considérons que le projet de référendum en vue d’un changement de constitution est dangereux pour notre pays. Et nous ne comprenons pas que dans votre dernier discours sur l’état de la nation, vous n’ayez pris en compte que les éléments du dialogue de Sibiti, ignorant ceux du dialogue alternatif dit de Diata, privilégiant ainsi de n’écouter que vos partisans. La fonction de Chef de l’Etat vous oblige d’être à l’écoute de tout le pays, y compris de ceux qui ne sont pas d’accord avec vous.

Monsieur le Président,

Ne vous y méprenez pas. La ligne de fracture n’est pas entre des sympathisants et opposants à votre personne, mais entre les défenseurs de Votre constitution, celle que vous avez donnée au pays par REFERENDUM, et ses fossoyeurs. Il n’est donc pas trop tard pour bien agir. Vous avez la possibilité de vous mettre au-dessus de la mêlée et d’éviter d’engager le Congo dans un scénario déplorable.

Vous auriez pu créer les conditions permissives d’un vrai dialogue consensuel et non celui qui consiste à choisir vos interlocuteurs, afin d’organiser votre sortie et permettre à votre successeur de continuer l’œuvre que vous avez commencée depuis plus de trois décennies. Mais qu’à cela ne tienne, il n’est pas trop tard pour initier et promulguer un calendrier électoral conformément aux dispositions constitutionnelles en vigueur, et aux recommandations des dialogues organisés dans le pays depuis plus de dix ans, à votre propre initiative (Ewo, Dolisie…), et en mobilisant les moyens et les compétences nationales et ou internationales si nécessaire, pour parvenir à une élection libre, juste et parfaite d’ici juillet 2016. Ce défi est encore à votre portée.

Si vous choisissez de n’écouter que vos partisans, vous entrez dans l’inconstitutionnalité, préférant de fait la voie de la violence, à celle de la raison ; alors qu’hier lorsque vous étiez dans l’opposition, vous condamniez avec force et vigueur toute forme de violation de la constitution.

L’alternance démocratique reste le seul gage pour la paix et le renforcement de la démocratie congolaise dont vous êtes l’un des pères fondateurs en ayant permis la tenue de la conférence souveraine. Depuis 15 ans vos opposants se sont pliés aux règles que vous leur avez imposées pour préserver la paix. Aujourd’hui si menace de guerre civile il y a au Congo, elle ne viendrait que de l’obstination de votre camp à bafouer les dispositions de votre propre constitution. Ainsi, toutes les invectives, intimidations et manipulations du PCT tendant à rechercher des bouc-émissaires dans le camp d’en face sont vaines et dénuées de fondement, aux yeux des observateurs objectifs.

Enfin Monsieur Le Président, permettez-nous de vous rappeler que la Constitution du 20 janvier 2002 est la première de l’histoire du Congo, en ce qu’elle aura permis le déroulement sans le moindre heurt de deux élections présidentielles successives. Et elle affronte bientôt son baptême de feu, en servant de socle à la première véritable échéance alternative à la tête de l’Etat. Nous sommes convaincus que quelles que soient ses insuffisances, elle constituera le meilleur legs de votre règne à l’histoire du Congo.

Votre destin vous a rendu témoin et acteur majeur de l’histoire moderne du Congo dès le départ en 1960. D’abord, en vous faisant collaborer avec ses premiers dirigeants (officier de la garde présidentielle sous Youlou, directeur de cabinet d’un ministre de Massamba, Ministre sous Ngouabi, vice-président sous Yhombi). Ensuite, après une première expérience de magistrature suprême de 1979 à 1990, il vous a donné une première chance de réparer les injustices ou erreurs passées, en vous donnant le pouvoir d’empêcher ou permettre la première tentative de rétablissement de la Démocratie en 1991. Enfin, comme jamais deux sans trois, votre étoile extraordinaire vous donne aujourd’hui l’ultime opportunité de sortir par la grande porte et d’entrer à jamais dans l’estime des Congolais : en permettant à notre pays de tourner votre propre page, d’en tirer le meilleur de votre œuvre et d’aller de l’avant sans violence…

50 ans après les indépendances, s’ouvre un nouveau tournant de l’histoire de l’Afrique, qui devrait voir s’ancrer deux principes forts de la Démocratie, en tant que mode de gouvernance universel :

l’Emergence de la conscience citoyenne, qui accompagnera la mobilisation de la société civile face aux enjeux majeurs du développement à l’échelle continentale et

la Consolidation des institutions, au-delà du charisme de quelque leader politique que ce soit.

C’est dans cette optique, que nous faisons du Respect de la Constitution par tous les pouvoirs élus par le Peuple souverain, un principe intangible. Car au-delà d’établir par la Loi, opposable à TOUS par essence, et de fixer les règles de gouvernance et de l’alternance au pouvoir, observables par TOUS, comme son nom l’indique, ce texte constitutionnel CONSTITUE LE CONGO, parce qu’il rassemble ce qui est épars… Autrement dit, IL fait de la diversité et de la richesse socioculturelle et ethnique congolaise une NATION, UNE et INDIVISE.

TCF, TRGM, pour entrer dans l’Histoire par la grande porte, nous vous conseillons humblement de reprendre votre place dans notre éternelle Chaîne d’Union, celle que nous ont léguée nos illustres prédécesseurs. Non seulement, vous allez en redevenir un simple maillon, mais un maillon indispensable car vous allez à partir d’août 2016, rejoindre le cercle fermé des couvreurs du Temple. Comme vous le savez, dans la vie profane, seul le Président Yhombi jouit librement de ce privilège à ce jour !

LES FF.°. SIGNATAIRES : BMK, EBEBA, GATAZ, McNG, YANDZE

Octobre 2015

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