Côte d’Ivoire – Les signes avant-coureurs qui annoncent le désert électoral

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Référendum du 30 octobre – Echec au félicia, mobilisation réussie à Yopougon

En annonçant un giga meeting au stade Houphouët-Boigny samedi dernier, le camp du « oui » prenait un pari fou pour tester avant le jour-J la popularité du projet de changement de constitution en Côte d’Ivoire. Eu égard à la mauvaise expérience de 2015, lors de l’investiture du candidat unique du Rhdp au cours de laquelle Ouattara avait parlé devant des gradins pratiquement vides, l’organisateur en chef Adama Bictogo (toujours le même) a revu à la baisse ses projections pour avancer le chiffre de 50 mille participants au meeting. Un pari fou dans une atmosphère de désaffection de la chose politique en général par les Ivoiriens et particulièrement de la politique ultralibérale du régime Ouattara qui ne donne aucune lueur d’espoir aux pauvres.

Le camp au pouvoir a réussi à mobiliser, selon des chiffres officiels, près de 10 mille participants. 10 mille participants au bout de mille et un efforts avec usage de tous les moyens de mobilisation : médias d’Etat, médias privés, cars de transport, bus de la Sotra, tournée des cadres de la coalition au pouvoir… Le tout offert gracieusement avec des moyens financiers colossaux sans commune mesure avec ceux de l’opposition. La capitale économique ivoirienne, Abidjan compte, à elle seule, près de 4 millions d’habitants. Les organisateurs n’ont pas pu convaincre 50 mille habitants pour faire le déplacement, soit près de 1,25 % de la population abidjanaise. Faire venir du renfort de l’intérieur du pays, en particulier de Korhogo qui a battu le record avec 35 cars, selon des sources, dénote d’un cuisant échec quelles que soient les justifications que l’on pourrait donner.
A dire vrai, aucune mobilisation ne se décrète et ne se fait au forceps. C’est une cause qui mobilise. Et la question qui se pose est de savoir si la constitution à laquelle le camp au pouvoir appelle à voter massivement a été largement expliquée et si les populations y trouvent vraiment leur intérêt. Jusque-là, les cadres au pouvoir se contentent de dire qu’il faut faire confiance au chef de l’Etat Alassane Ouattara qui est le bâtisseur du projet. Comme c’est lui qui en est l’initiateur, il faut aller simplement pour voter « oui ». En somme on veut susciter un électorat moutonnier sans vraiment se livrer à une claire explication de texte dans un langage que les populations comprennent le mieux et les thématiques qui captiveraient leur adhésion au projet. A moins d’une semaine maintenant du référendum, rares sont les Ivoiriens dans les rues qui savent qu’il y a vote dimanche prochain. Beaucoup ne savent même pas encore l’enjeu réel à part une frange minoritaire de la population habituée aux informations à la une des journaux.

Tout se passe dans une précipitation inédite, une sorte de course contre la montre comme si le taux de participation n’intéresse pas vraiment l’initiateur du projet. Malgré tout Alassane Ouattara lui-même est entré en campagne depuis samedi et il a recommencé ce qu’il avait déjà fait. A savoir rencontrer les couches sociales. Ce lundi 24 octobre 2016, il a vendu son projet aux chefs traditionnels en attendant la société civile ce mardi.
Un début de campagne morose

72 h après le lancement de la campagne, aussi bien chez les partisans du « oui » que chez les opposants au texte, c’est la morosité totale. Pas de meeting, pas de parade dans les rues, pas de caravanes motorisées. Seules des affiches de campagne aux messages aussi muets qu’insipides du genre « je vote oui à la cohésion sociale » sont visibles sur des panneaux à Abidjan.

A Yopougon, une réunion du Rhdp s’est tenue à la mairie entre les différents responsables de la campagne. Ce qui était plus intéressant ici, c’est ce que chaque délégation aura comme budget de campagne. Et selon des indiscrétions et des fiches techniques que nous avons pu consulter tout le monde n’est pas logé à la même enseigne. Les gros partis Pdci et Rdr s’octroyant la part du lion et les autres (Mfa et Udpci) se contentant du reste.

Toujours à la mairie, une rencontre avec la communauté gouro a été programmée par le maire Kafana qui compte sur l’alliance interethnique entre gouros et sénoufos pour convaincre ses hôtes. Il en sera ainsi tout au long de la semaine avec d’autres communautés ethniques.

Pendant ce temps, les opposants tardent à donner leur mot d’ordre entre le boycott actif dont l’idée a germé un moment, le boycott passif et le vote du « non ». Cette dernière option semble avoir du mal à prospérer tant la CEI chargée d’organiser l’élection a perdu en crédibilité après la violation de la disposition sur le bulletin unique. Toutefois, ils trouvent leur satisfaction (morale) dans le meeting réussi de Yopougon au cours duquel samedi dernier, aucun son discordant n’a sonné sur l’objectif visé : amener Ouattara à retirer simplement son projet de nouvelle constitution après son passage avec une majorité mécanique à l’Assemblée nationale.

Dans ce contexte de dialogue de sourds entre pouvoir et opposition, il est fort à parier que les lieux de vote soient envahis dimanche par les Ivoiriens. Au contraire il faut craindre une journée mouvementée si l’opposition choisissait le boycott actif comme moyen d’expression.

SD à Abidjan

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