Côte-d’Ivoire: Guillaume Soro, réflexions autour du héros légendaire et du héros historique (Tiburce Koffi)

L’Editorial de Tiburce Koffi
Ecrivain, Journaliste , Paris, France

La médiatisation de ces débuts de relations entre le Président de l’Assemblée nationale et moi, via Pr Nyamsi, a suscité des réactions aussi diverses que différentes sur les réseaux sociaux. Les statistiques donnent, dans l’ensemble, un avis favorable à ce rapprochement. Un seul argument motive cet avis : la nécessité de s’unir, entre cadres et fils du pays, pour proposer à nos populations traumatisées et rendues méfiantes et suspicieuses les unes envers les autres par les conflits et déchirures politiques, de meilleurs horizons relationnels. Il est évident que nous sommes, là, face à une raison majeure, non négociable, qui justifie, mieux, légitime, cette tentative de ralliement de leaders d’opinion à la bonne parole que prêche en ce moment, le Président du Parlement ivoirien : La paix et la Réconciliation par le Pardon. Le projet, on le sait n’est pas nouveau. Mais M Guillaume Soro n’en revendique pas la paterni
Le torrent d’avis favorables à la démarche du Président de l’Assemblée nationale (démarche sanctionnée par mon accord) ne peut cependant cacher cet autre torrent de points de vue, absolument opposé au premier. Ici aussi, un seul argument guide ce refus : le personnage moral du Président de l’Assemblée nationale. Parce qu’il a été le porte-parole d’une rébellion qui a ébranlé le régime de l’ex-président Laurent Gbagbo, Guillaume Soro est donc jugé personnage non habilité à engager le pays dans une politique de Pardon pour la Réconciliation nationale.
Disons-le tout net : l’argument nous paraît hors de raison. Et il ne saurait y en être autrement car son fondement est moral, émotionnel et sympathique. Statique et donc non évolutif, un tel argument nie le caractère dynamique des faits sociaux.
Non, nulle tentation ne m’anime de verser dans le négationnisme en prenant le risque (vraiment inutile et dangereux) d’occulter les ravages de la rébellion ; ni même de verser dans un révisionnisme d’une prudence brutale, inappropriée et horriblement suspecte. Je compte au nombre des ‘‘voix écrites’’ qui furent les plus acerbes contre la rébellion, me refusant même à les appeler « Forces nouvelles » — l’appellation officielle pour désigner ces troupes que tout en moi refusait d’appeler autrement que par le substantif (peu valorisant) de rebelles. Et mon point de vue sur la question n’a pas changé.
Mais l’Histoire a sa logique, et la morale, la sienne. Et ces deux logiques ont toujours fait mauvais ménage. C’est pourquoi la prudence recommande toujours de les dissocier ou, au mieux, d’éviter de les confondre, dans la lecture des faits et actes de grande envergure (ils ne passent pas inaperçus) que nous donnent souvent à vivre et à analyser, un certain type de personnage que la littérature a baptisé sous le vocale de héros. J’ai dis héros. Et, de mon point de vue, Guillaume Soro, à l’instar des grandes figures qui sillonnent les pages (écrites ou non) de la vie des sociétés qui les ont produites, est un héros au sens plein du terme ; c’est-à-dire, celui-là qui a livré bataille avec rage et courage, vaincu avec l’art et la raison du fort, et obtenu l’auréole du brave. En tant que tel, au-delà des passions qu’il suscite par la simple évocation de son nom, Guillaume Soro porte en lui les contradictions et énigmes que charrie le personnage peu banal du héros — un homme historique.
[L’énigme du héros]
Etrange, bien étrange dialectique que celle-là, du héros réel — opposé au héros virtuel des contes, mythes et légendes qui, lui, est un personnage entièrement sympathique et en parfaite adéquation avec son peuple. Le héros de chair et d’os, en même temps qu’il suscite respect, admiration et envie, évoque crainte et effroi. Aussi, le plus souvent, finit-il par susciter contre lui antipathie et rejet, car son emprise sur la société créé inconfort et suspicion. Jean Dodo Glaziognon, auteur dramatique des années 1980 — malheureusement disparu et méconnu de la société des (jeunes) écrivains de notre pays —, a écrit cette réflexion lumineuse dans « Gba gla bada ! », un de ses textes flamboyants : « Le héros nous a délivrés du monstre. Mais qui nous délivrera d’un héros immortel ? »
L’interrogation donne entièrement dans la problématique de l’image symbolique du héros : un être d’amour et de désamour. Envers lui, l’humanité ne cultive aucun sentiment mineur, aucune approche de synthèse. Etre de passion et non de raison, le héros doit être saisi dans l’absolu et non par compromis. Non, il n’y aura pas de demi-mesure pour Guillaume Soro : il sera (est ?) aimé ou détesté. Il n’est pas toléré — il ne doit pas à la société ivoirienne qui l’a vu naître, son droit d’exister. Soro s’est toujours pleinement assumé.
A-t-il conscience des enjeux qu’offre à voir son personnage ? Je crois pouvoir répondre par l’affirmative : on ne peut pas avoir pour Conseiller spécial le Pr Nyamsi, un intellectuel versé dans l’approche de ces questions hautement philosophiques, et ignorer ces choses. Tous ceux qui ont travaillé avec Guillaume Soro (et sous ses ordres — ces ministres de nos républiques récentes) ou dont il a été le collaborateur de premier rang (Laurent Gbagbo notamment) lui ont reconnu cette capacité de saisir les complexités de la crise ivoirienne, et sa forte personnalité qui fonde et détermine son agir politique. Nous sommes indiscutablement là (il me plaît de le rappeler) en présence d’un dirigeant prêt à assumer des responsabilités majeures d’échelle étatique tout aussi majeure.
A ceux qui lui refusent le droit et la légitimité de concevoir toute démarche de contrition (sous le prétexte de sa culpabilité dans la tragédie vécue par notre peuple), je réponds simplement ceci : c’est justement parce qu’il n’est pas innocent de cette tragédie qu’il lui revient la responsabilité de tenter cette démarche réconciliatrice. A ces autres qui doutent de sa capacité à réussir dans une telle entreprise qui semble ‘‘piétiner’’, je dis aussi : rien ne nous dit qu’il n’y réussira pas, lui. Accordons-lui le droit, et même, le devoir d’essayer. Mais surtout, donnons-lui l’aide cognitive qu’il sollicite de l’Intelligences apolitique du pays pour gagner cet autre pari. Oui, je lui réitère mon aide et mon engagement à soutenir un tel projet. Pour la Côte d’Ivoire, ma raison affective et citoyenne.

tiburce_koffi@yahoo.fr

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10 réflexions au sujet de “Côte-d’Ivoire: Guillaume Soro, réflexions autour du héros légendaire et du héros historique (Tiburce Koffi)”

  1. Je n’ai pas dit.Tout ce qui sera dissonant à leur pavillon auditif sera assimilé à de la traîtrise ou à de l’acheté.

    À chacun sa lorgnette !!!

  2. Arrête ton bla-bla honteux Turbice Koffi. Passe à la caisse et empoche ce que Soro t’a donné. Tu es libre de devenir le directeur de champagne de Soro à la présidentielle prochaine. Tu n’as de compte à rendre qu’à ta conscience… Mais tu dois comprendre que, ici, nous sommes dans le concret. Ce n’est plus le moment des belles phrases alignées vides se sens. Ce n’est plus le moment de la poésie qui n’a rien à voir avec la réalité. Il est évident que ta famille n’a pas été victime des tueries de Soro. Tu n’aurais pas tenu un tel discours emprunt d’insensibilité si toi-même ou un membre de ta famille avait été victime des tueries de Soro. Faites votre similacre de reconciliation. Nous, nous ne sommes pas intéressées…. Merci …

  3. -Ils ont conduit Bedié dans l’erreur en développant la philosophie ivoiritaire.
    -Ensuite, ils reviennent installer et accompagner par des éloges cette dictature terrible de Ouattara que la Côte D’ivoire vit aujourd’hui.
    -Maintenant, ils nous reviennent avec un autre concept: Celui qui a défiguré la Côte D’ivoire saura comment réparer ce qu’il a détruit.
    Question : Comment des gens peuvent s’être trompé autant de fois, ne jamais assumer leurs errements passé avec les conséquences que nous vivons et croire que cette fois ci, ils seront dans la vérité ?
    Très souvent, celui qui répare connaît les éléments sensibles d’un mécanisme ou d’une machine, il est de ce fait très difficile, voir impossible pour un tel personnage d’être celui par qui les dysfonctionnements de la machine ont lieu.
    Que Tiburce Koffi publie ici et maintenant les résultats des statistiques sur lesquelles il fonde et encourage sa démarche.
    La Côte D’ivoire se pacifiera certainement, mais ça ne sera pas par la main de ceux qui cherchent à préserver les intérêts acquis sur le sang des ivoiriens.

  4. « c’est justement parce qu’il n’est pas innocent de cette tragédie qu’il lui revient la responsabilité de tenter cette démarche réconciliatrice » tiburce koffi.
    Ceux qui sont responsibles ou soupçonnés responsables de la tragédie ivoirienne, répondent devant la justice. C’est pour cela que Gbagbo et Blé Goudé sont en prison à la Haye… C’est pour cela que Simone Gbagbo et bien d’autres sont en prison en Côte d’Ivoire.. Vous feriez mieux de militer pour que le sanguinaire Soro réponde devant la justice au lieu de cautioner son similacre de réconciliation uniquement fait pour se constituer une base électorale pour la présidentielle de 2020.

    M. Turbice Koffi, vous avez toujours milité dans le mauvais côté… Et ce n’est pas en train de changer… Je me demande bien si vous Turbice Koffi avez un sens de justice… Dans votre conscience, dans quele case mettez-vous les victimes ? Auriez-vous cautionné une telle demarche de réconciliation, si elle venait d’un Ivoiren qui n’a aucun sang sur les bras et qui ne s’appelle Guillaume ? Vous êtes aussi un Ivoirien, pourquoi vous-même, vous ne prenez pas cette initiative que vous trouvez si louable ?

    Il fallait que cette initiative vienne du sanguinaire Soro pour vous la trouviez louable? Vous me decevez Turbice Koffi…
    @Age, je suis d’accord avec toi…

  5. @age @zott

    parfaitement d’accord

    « Comment des gens peuvent s’être trompé autant de fois, ne jamais assumer leurs errements passé avec les conséquences que nous vivons et croire que cette fois ci, ils seront dans la vérité ? »

    j’ajoute: un homme politique ou mieux un intellectuel, il se juge aux actes qu’il a posé ou à la posture qu’il se donne au présent?

    Et il y a une différence entre Pr de Soro et tiburce: le prof a toujours été dans une logique Soro, donc ses actions ne surprennent guère, mais lui le pseudo intellectuel aux réactions et écrits changeant au gré des réalités qui veut il convaincre ? n’est il pas simplement dans une démarche de division du rdr pour ouvrir la voie à la tribu: le pdci?

    Comment on peut dire qu’on fait une démarche d’union quand déjà cette démarche créée déjà une division dans son propre camp?

    Compter sur les LMP pour aider Mr Soro dans son positionnement c’est vraiment mal connaitre l’esprit LMP.

    Mr Soro, faites l’union dans votre camp au rdr, puis au rhdp et ensuite tendez les mains aux LMP, ça me semble une bonne méthodologie. Mais être vomi par les siens et compter sur les LMP sous prétexte qu’ils sont avides de reconciliation…

    Mr Soro peut être que vous êtes sincère et vraiment désireux d’arranger ce que vous avez gâté, mais ça sent trop l’opportunisme.

  6. Entretemps, des centaines de milliers d’ivoiriens n’ont toujours pas fait leur deuil à l’ouest du pays !!

    Certains sont en fuite et ne peuvent toujours pas réintégrer leurs villages, leurs maisons, leurs champs !!

    Des puits sont encore remplis de squelettes humains, des charniers sans noms attendent à DUEKOUE et ailleurs, que la justice soit faite un de ces jours !!

    Pourquoi diantre veut-on faire de SORO le réconciliateur, quand il est et demeure celui qui a porté cette rébellion et assumé tous les crimes commis par elle, impunis et impardonnables ??

    Pourquoi diantre exiger de GBAGBO LAURENT qu’il paye pour des crimes supposés, quand SORO chercher à se refaire une conduite malgré ses crimes avérés ??

    Franchement, ce que Tiburce KOFFI ou NYAMSI font, cela n’engage que leur petit nombril, mais entre nous, si jamais dans la rue, SORO se fait tuer par une femme désemparée, ou par un enfant de la rue meurtri, je ne crois pas que je ressentirais le moindre regret ou remord, car la consolation la plus minuscule qui pourrait exister pour ces gens, c’est de voir leur bourreau un jour subir les mêmes douleurs et le même sort que leurs proches !!

    Non, il ne faut pas se moquer de la mémoire ivoirienne, des douleurs perçues et passées, du sentiment d’injustice permanent, et les volontés de représailles qui s’éterniseront tant que certaines personnes continueront de se pavaner dans la capitale ivoirienne en costume trois pièces, quand d’autres croupissent dans les geôles de la HAYE.

    Tchrrrr !!!!!

    Allons seulement, monsieur le héros !!

    Épilogue !!

  7. La Question que l’on est tenté de poser à ce « Comique » soit disant Écrivain -Journaliste c’est :
    1/ Monsieur Kamagaté alias SOUL TO SOUL est-il le Chef de protocole principal du Génocidaire GUILLAUME SORO, Oui ou Non ?
    2/ Monsieur Kamagaté alias SOUL TO SOUL était-il, et est-il toujours un des combattants et principal acteur de terrain de la Rébellion armée ayant ensanglanté la Côte d’Ivoire (pas le régime de l’ex -président ivoirien comme ce comique l’insinue dans son article) mais les populations ivoiriennes entières avec son lot de massacre, Oui ou Non ?

    3/ A t-on retrouvé des Tonnes d’Armes lourdes y compris des Kalachnikovs et lances roquettes RPG au domicile privé de Monsieur Kamagaté alias SOUL TO SOUL, Collaborateur principal du Génocidaire GUILLAUME SORO, là même où dormait la maman du premier cité, Oui ou Non ?

    Monsieur le comique Écrivain-Journaliste, Que fait encore Monsieur Kamagaté alias SOUL TO SOUL en liberté, au regard du danger considérable que lui et son Patron Génocidaire font encore courir à la Nation ivoirienne ???

  8. C’est vrai, cedrik, dabakala, zott, Marianne et autres,
    Vous avez raison. Ce qui s’est passé à l’ouest, nos frères actuellement en prison, en exil, etc. Tous ces comptes gelés, …

    C’est difficile.

    Au village, lorsque de telles situations graves se produisent, les sages se réunissent. Ils convoquent les belligérants sous l’arbre à palabres. Ils situent les responsabilités.
    Puis, le fils du village qui a tors demande pardon. Il se lève ensuite pour aller vers ses frères envers qui il a fauté et leur tend la main en guise de réconciliation.
    Quand il revient s’asseoir, les sages du village lui font les dernières reproches et les recommandations pour la répartition des fautes.

    Ivoiriennes, mes soeurs,
    Ivoiriens, mes frères,

    GKS est notre frère qui a fauté. Il le reconnaît. Il a gravement fauté.
    Comme au village, sous l’arbre à palabres, allons ensemble dans un cadre de réconciliation pour se parler, se serrer la main, puis, lui donner les directives pour la paix dans notre pays.

    Nous, qui avons souffert de cette crise, nous, qui avons des enfants à éduquer, nous ne devons pas baisser les bras.
    Nous, qui avons des parents encore en exil et qui souffrent et nous font souffrir,
    Nous devons œuvrer au retour d’une paix durable.

    Agissons conformément à nos coutumes et recherchons sans cesse la paix.

  9. Il est vrai que tout le monde ne pourra pas prendre part aux premières rencontres pour la réconciliation. Mais, il faut commencer. Il faut démarrer le processus.

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