Le S/P de Danané en Côte-d’Ivoire interdit les porteurs de cercueils «épreuves de vérité» pour démasquer les sorciers

Le sous-préfet de Danané, Bénédict Goua Bi Lézié, sur instruction du préfet, a interdit le recours aux pratiques ordaliques ou «épreuves de vérité» pour démasquer les sorciers dans les villages du canton Blossé, au sud de Danané, lors d’une rencontre avec les populations à la préfecture.

Selon le sous-préfet Bénédict Goua Bi Lézié, en vertu du code pénal, toutes les formes de sorcellerie, de pratiques ordaliques dites «épreuves de vérité» destinées à démasquer les sorciers, sont formellement interdites et punies par la loi. Agissant sur instruction du préfet, Diarra Abdoul Karim, le sous-préfet a demandé mardi aux populations de recourir à la justice comme le dispose la loi.

AIP

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2 réflexions au sujet de “Le S/P de Danané en Côte-d’Ivoire interdit les porteurs de cercueils «épreuves de vérité» pour démasquer les sorciers”

  1. AFFAIRE DE SORCIERS !

    « Après la ville de Grand-Bassam et le balafon Sénoufo, le ZAOULI, danse du pays Gouro, vient d’être inscrit, sur la liste du Patrimoine Mondial Immatériel de l’UNESCO. Notre pays rayonne à nouveau à travers le monde sur tous les plans. Nous devons, tous, en être fiers ! »

    Le Président ADO avait pleinement raison ! Notre culture est riche et doit être valorisée !

    Ainsi la prochaine place au Patrimoine Mondial Immatériel de l’UNESCO, je parie qu’elle sera conquise par le Grand Ouest !

    Des grandes chanteuses traditionnelles Dan comme le Groupe Super de Gouetimba, au des chansonniers Wè comme Oulaï Kayor, des troupes de Cors de l’ouest dont le « KO de Tacouably est emblématique aux danses populaires comme le Tématé des Wè ou les pas synchronisés Yacouba, la richesse intarissable de la culture du grand ouest de notre pays, mérite reconnaissance mondiale et valorisation !

    Que dire alors des des grandes masques Dan ou Wè ?

    Venons en plutôt au sujet du jour !

    L’ORDALIE UNE SCIENCE BIEN AFRICAINE

    Ce n’est par hasard si le législateur dans notre Code Pénal, CHAPITRE III Infractions Contre La Paix Et La Tranquillité Publique, SECTION 9. CHARLATANISME, a rédigé cet article :
    Art. 205.
    « Est puni d’un emprisonnement d’un à cinq ans et d’une amende de 100 000 à 1 000 000 de francs, quiconque se livre à des pratiques de charlatanisme, sorcellerie ou magie, susceptibles de troubler l’ordre public ou de porter atteinte aux personnes ou aux biens. »

    Le sorcier est donc lui-même interdit par la Loi ! Mais comment le découvrir ?

    Malheureusement il n’existe que quatre méthodes plus ou moins « maitrisées »
    1. L’ordalie, épreuve du Gôpô, sous ses formes diverses (qui permet faire avouer)
    2. La dénonciation par des attrapeurs de sorciers (masques ou hommes de science religieuse)..qui permet de faire avouer
    3. La pratique du cercueil qui conduit droit au coupable
    L’ordalie elle-même a plusieurs variantes bien décrites dans le travail de recherches de Varlet réalisé en 1959 en Côte d’Ivoire…qui permet de faire avouer
    4. L’aveu..volontaire !

    Concernant la première technique, la Société Française d’Ethnopharmacologie, dans son répertoire de Plantes médicinales et pharmacopées traditionnelles, identifie sous le nom scientifique, Erythrophleum guineense, une même plante utilisée dans plusieurs régions africaines de la Côte d’Ivoire au Congo en passant par le Bénin, le Gabon, la RCA !

    Son pouvoir est connu et sert à plusieurs objets dont le poison d’ordalie pour faire avouer les sorciers.

    Elle serait identifiée chez les Baoulé sous le nom ELUI …
    Naturellement on connait les dérives des sociétés secrètes en Afrique !

    Dans plusieurs contrées du côté ouest de la Côte d’Ivoire, la dénonciation du sorcier est surtout le fait des masques chargés de réguler la société. Mission qui s’étend donc à attraper les sorciers, fauteur troubles, au sens de chapitre 3 du Code Pénal de la Côte d’Ivoire ! Celui de Glanlé en est un grand spécialiste, dit-on !

    Ce qui est donc interdit, ce n’est donc pas exactement ce que le sous-préfet Bénédict Goua Bi Lézié, aurait dit « en vertu du code pénal, toutes les formes de sorcellerie, de pratiques ordaliques dites «épreuves de vérité» destinées à démasquer les sorciers, sont formellement interdites et punies par la loi. » !
    C’est plutôt celles qui « susceptibles de troubler l’ordre public ou de porter atteinte aux personnes ou aux biens ». Le reste de l’article 205 est important !

    Mais ce ne serait pas la première fois où dans le cas de sorcellerie, il y aurait interprétation contradictoire de la loi !
    Au Tribunal de première instance de Daloa, en décembre 2014, des palabres entre procureur et juges autour d’une présumée sorcière ont défrayé la chronique !

    En janvier 2015, un mois plus tard, d’autres sorciers seront condamnés par le même Tribunal de Daloa !

    Mais le plus important est d’avoir ramené l’ordre à Danané !

    Un ordre précaire qui sera remis en cause à la première occasion ?

    La loi devrait être plus claire ! Afin d’éviter que le sorcier de Daloa soit condamné et celui de Danané relâché !

    La différence est certainement le fait qu’à Daloa personne ne s’est fait justice ….

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    Daloa: Trois jeunes sorciers condamnés à 5 ans chacun
    Publié le lundi 12 janvier 2015 | Le Sursaut

    Kassa Gbessi Donatien (32ans), Gnahoré Tehiba Charles (25 ans) et Gnounouva Gbessi Séverin (36 ans), tous des jeunes planteurs originaires du village de Ketro (Vavoua), sont prévenus pour pratique de sorcellerie ayant entraîné la mort à mademoiselle Gnahoré Sabine (27ans) en décembre 2014 à Ketro. En effet, le dimanche, 21 décembre 2014, Mlle Gnahoré Sabine est subitement arrachée à l’affection des siens. Mais avant sa mort, la victime a confié à son cousin Bouazo, que son jeune frère utérin, Gnahoré Tehiba Charles, est à la base de la maladie aux origines mystiques dont elle souffre. Hélas ! La mystérieuse maladie aura raison de Sabine quelques heures après. Son cousin Bouazo porte l’affaire à la connaissance du chef du village de Ketro qui convoque l’accusé sans autre forme de procès. Une fois devant le gardien de la tradition, la famille biologique de la défunte réitère ses accusations. Mais Gnahoré Tehiba Charles jure ses grands dieux qu’il est étranger à cette mort. Mais acculé, celui-ci craque et avoue son forfait. Mieux, il ne manque pas de citer ses complices que sont Kassa Gbessi Donatien et Gnounouva Séverin qui seraient deux piliers de sa confrérie. Ces derniers ont nié en bloc ne rien savoir de la mort de Gnahoré Sabine. Gnahoré Tehiba Charles ne fléchit pas. Il affirme que le trio est bien un spécialiste du monde invisible. Que tous les trois sont en connexion avec le diable pour exécuter ses œuvres maléfiques. Pour tout dire, ils sont de redoutables sorciers opérant dans une même confrérie. «C’est sur leur insistance que j’ai sacrifié Sabine parce que mon tour de livrer un membre de ma famille est arrivé», a enfoncé Charles. Prévenus tous les trois de pratique de sorcellerie, ils étaient récemment devant la barre du tribunal pour répondre de leurs actes. Interrogé sur leur responsabilité dans la mort de Sabine, les accusés n’ont pu se disculper. Verdict, Kassa Gbessi Donatien, Gnahoré Tehiba Charles et Gnounouva Gbessi Séverin ont été reconnus coupables. En répression, ils ont été condamnés, chacun, à 05 ans de prison fermes et 50.000fcfa d’amende.

    Touré Tiany

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  2. LA PLUS GRANDE DYNASTIE DU MONDE

    (Dossier Balafon – Textes: Luigi Elongui – Photos: Catherine Millet)

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    Au pays des dix-huit montagnes, dans l’Ouest de la Côte d’Ivoire, l’assemblée des masques est le double de la communauté humaine. Dans cette vaste région de reliefs moyens et de plateaux verdoyants, couverte de savanes arborées et d’épaisses forêts, vivent des peuplades aux origines disparates et farouchement attachées à leurs coutumes ancestrales. Ici les masques interviennent dans la dynamique complexe des rapports de pouvoir, occupent la fonction de garants de l’ordre social, président aux activités culturelles et aux réjouissances populaires.

    Leurs apparitions publiques sont la manifestation des forces surnaturelles, des héros mythiques ou de la voix des ancêtres veillant au respect de la tradition. Ainsi, ils jaillissent sur la place du village pour accueillir un notable provincial, dansent pendant la fête de l’igname ou participent à l’initiation des jeunes aux mystères de la vie dans les profondeurs du bois sacré. Le masque du chef est le masque suprême, il incarne la loi totémique et administre la justice avec le conseil des anciens, véritable tribunal villageois. Les battements des tambours à fente accompagnent sa démarche à pas lents et mesurés et rendent solennelles ses délibérations sans appel.

    A Mahapleu, chez les Dan, qui avec les Wé sont l’ethnie plus importante dans la sous- région, cet autorité est exercée par le masque Gnialo ou  » rayon de soleil « . Muni d’un pair de gants rouges, d’une couronne de feuilles et d’une barbe en cheveux humains, la figure aux yeux légèrement cylindriques et au front bombé et peint en blanc, Gnialo est l’instance supérieure qui guide la construction sociale. Il ne quitte la  » la case royale « , située dans la forêt, qu’en cas de graves conflits. Dans le même village, la réunion générale des masques du canton est dirigée par le masque guerrier Jbleukpan, personnage à l’accoutrement tout à fait similaire à Gnialo, mais la sculpture faciale en rouge vif. Avec les pommettes saillantes, les traits de la bouche grossiers et les yeux bridés entourés par le blanc du kaolin en signe de joie, le masque comédien Koui-Yeo a un aspect volontairement caricatural. Il intervient dans les réjouissances à Zouhan Hounien et amuse l’assistance en minant contes populaires et scènes de la vie quotidienne.

    Le masque de sagesse, à la figure toujours blanche, est paré d’une coiffure en plumes d’aigle pêcheur et son costume est orné d’une peau de panthère, symbole de puissance, déambule appuyé sur une canne et sort pour régler les disputes dans son propre clan. En cas de querelles opposant deux lignages différents, on demande le jugement d’un masque d’un troisième clan, qui sera par la suite récompensé par le sacrifice d’un boeuf.

    Dans cette zone frontalière avec le Liberia, l’immanence de l’élément mystique s’exprime par les agissements des masques et s’explique autant par l’histoire du peuplement que par un cadre naturel presque impénétrable à cause des hauteurs abruptes et de la densité de la végétation. Rien d’étonnant par conséquent, que celui que ses habitants appellent » le pays des dix-huit montagnes  » soit resté à l’abri des incursions des marchands d’esclaves pendant toute la période de la traite.

    D’origine « soudanaise », les Dan fuyant l’expansionnisme dioula y ont trouvé également refuge aux alentours de 1700. Selon d’autres sources historiques, ils seraient en revanche arrivés quatre siècles auparavant pour s’installer à côté de leurs actuels voisins, les Wé.

    Ces derniers, animistes rudes et fiers, chassent les éléphants et pratiquent la pêche, l’agriculture sur brûlis et l’élevage de petit bétail. Danseurs, sculpteurs et musiciens éprouvés, ils sont doués d’un sens artistique inné et se considèrent eux-mêmes comme  » les créateurs des masques « . C’est ainsi qu’ils confient, depuis des siècles, le gouvernement de leurs chefferies fragmentaires aux diverses sociétés secrètes de masques, qui ont élu leur royaume sur ces terres aux pics escarpés et sur-plombant de nombreuses rivières alimentées par des cascades bruyantes. Parmi les plus fameux de toute la Côte d’Ivoire, où leur importance et l’intensité de leur présence augmente en progressant de la bande côtière méridionale en direction de nord-ouest, les masques de la région de Man ont fait leur entrée sur le marché européen de l’art africain vers 1910-12 et ont vite suscité l’intérêt d’artistes tels que Matisse, Picasso ou Braque.

    Par la suite, des questions ont été posées quant à l’aspect difforme, qui caractérise les masques dan et wé. Si les premiers arborent des traits fins, une expression paisible et l’ovale du visage pur et bien poli, les autres impressionnent par l’hyper-trophie des yeux et de la bouche et les arrangements chromatiques agressifs.

    C’est là un décalage esthétique qui remonte aux origines diverses des deux principaux groupes ethniques, mais aussi à l’histoire tourmentée de leur voisinage. Cette région en effet, s’est peu à peu stabilisée après des centaines d’années de guerres tribales, dues en principe à la dispersion des peuples poussés à sud par l’éclatement des Empires du Ghana, du Mali et Songhaï.

    Les souvenirs de cette époque hantent encore aujourd’hui les récits des vieux et les mythes d’origine relatifs à certains masques. Selon une légende répandue en pays Wobé, le masque de sagesse Seiblignon exerce ses fonctions dans le village de Facobly après avoir fait cesser une guerre inter-clanique. Voilà de quoi éclaircir le rôle institutionnel des masques dans la pacification des gens et la réglementation de leurs diatribes…

    Il est incontestable que ce passée de guerres ethniques, de mouvements migratoires et de scissions lignagères a produit des rapports différents avec la réalité, formé des perceptions particulières de l’activité des masques et, par conséquent, un goût pour les formes qui change d’une communauté à une autre.

    Vivant dans la partie septentrionale, les Dan, improprement appelés Yacouba, font partie du groupe linguistique mandé. L’emploi ornemental de balafres dans leurs masques rappelle ainsi les scarifications claniques propres aux ethnies de souche mandingue. Les Dan étaient jadis installés plus à nord, sur les terres habitées par les Malinké, d’où ils se seraient détachés pour franchir le Bafing et envahir la cuvette de Man.

    Leurs voisins du sud, les Wé, appartiennent à l’ensemble krou. Considérés comme autochtones, ils sont partagés entre Wobé au nord-est et Guéré au sud-ouest. Mises à part les zones défrichées aux alentours de Guiglo et Bangolo, la forêt dense constitue le cadre naturel de ces paysans adonnés à la culture de l’igname.

    Comme tout peuple forestier, les Wé ont une relation de spiritualité intense avec l’environnement. Demeure de puissances maléfiques ou d’esprit bienfaisants, la forêt hante leur imaginaire et occupe une place importante dans leur système de croyances. Quoi qu’il en soit, leurs masques sont une manifestation de l’esthétique forestière. Ils présentent une morphologie à la taille souvent imposante, où l’ampleur des couleurs, la surcharge vestimentaire avec des longues jupes en fibres de raphia, les parures bigarrées et pourvues de dents de fauve évoquent l’épouvante ou l’insolite. Les Wé, et notamment les Guéré, sont les inventeurs de cet art expressionniste, dont la recherche de l’effroi se manifeste dans la dureté des traits ou les faces cauchemardesques.

    Maîtres dans les activités occultes, ils organisent leurs cérémonies masquées pour entrer en contact avec les entités tutélaires. Suivant une rigide hiérarchie, celles-ci sont invoquées par les défunts du village, à leur tour appelés par la grappe de clochettes entourant le visage du masque et rythmant les mouvements de la danse.

    Les Dan ont au fur et à mesure développé une culture matérielle similaires à celle de leurs voisins. La seule opposition flagrante se manifeste dans … les masques ! tout en utilisant certains dispositifs lourds du modèle Wé, leur sens esthétique se traduit par un masque de dimensions plus petites, souvent blanchi au kaolin, ovoïdal, verni de noir, reproduisant le visage humain.

    Les courants esthétiques Dan et Guéré toutefois, se rapprochent dans certains cas et les Wobé semblent adopter une conception stylistique intermédiaire entre ces deux expressions.

    Mais l’univers magique du masque ne saura pas se réduire aux formes sculptées. Institution veillant au bon fonctionnement de l’appareil social, les masques ont en charge le maintien de l’équilibre cosmique entre les énergies des humains et celles des éléments. Leur symbolisme révèle des grands secrets enfouis dans les tréfonds de la mémoire collective et opère en relation à la dynamique des pouvoirs propre de ces communautés montagnardes. Il y a des circonstances dans lesquelles certains masques ne peuvent pas « sortir » car d’autres les mutilent de leur force. Les premiers doivent alors supplier leurs plus puissants antagonistes et leur offrir de la cola pour qu’ils consentent à leur apparition. Ainsi, à l’occasion d’un enterrement, le prestige de la famille du défunt est égal au nombre de masques qui participent aux funérailles.

    L’âge d’un masque se mesure en siècles et ses porteurs se transmettent sa langue et ses messages de génération en génération.

    Officiant la justice et la paix, le masque est aussi dépositaire de l’histoire du clan auquel il appartient. Ce qui fait dire aux gens de Man que les masques sont la plus grande dynastie du monde.

    Dossier Balafon – Textes: Luigi Elongui – Photos: Catherine Millet
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