Interview Côte-d’Ivoire: La FESCI appelle l’État à tenir sa promesse de « réhabiliter les cités universitaires à l’abandon »

Ange TIEMOKO

A un an de la fin de son second et dernier mandat à la tête de la Fédération estudiantine et scolaire de Côte d’Ivoire (FESCI), Fulgence Assi, appelle le gouvernement à respecter sa promesse de « réhabiliter toutes les résidences universitaires » restées à l’abandon, après la crise post-électorale, dans une interview accordée à Alerte Info.

La réhabilitation des cités universitaires restées à l’abandon à Abidjan depuis la crise post-électorale de 2011 on le sait, est l’une de vos priorités. Lors de votre bilan 2017, vous avez indiqué que l’Etat a promis d’entamer et de finaliser les travaux en 2018-2019. Comment comptez-vous faire respecter cette promesse ?

La Fédération estudiantine et scolaire de Côte d’Ivoire est une organisation sérieuse qui obéit à une démarche. Une démarche singulière. Elle veut faire confiance d’abord à nos autorités avant de réagir. Ce qui nous a permis d’accepter les promesses faites, en attendant que tous les moyens soient mis à la disposition des opérateurs économiques pour d’achever les cités universitaires, ou réhabiliter celles qui sont à l’abandon dans le district d’Abidjan et construire de nouveaux bâtiments dans les villes de Man et Korhogo, pour accueillir les étudiants de Côte d’Ivoire. Comme les promesses sont datées, et que ces travaux doivent commencer cette année (2018), cela nous permet d’être très rassurés de notre démarche. Dans les jours à venir (février), une assemblée générale sera convoquée, afin d’étudier les promesses faites et de voir la démarche à suivre, parce qu’il ne s’agira pas pour nous d’attendre jusqu’à ce que nous puissions atteindre le délai avant de régir. Par principe de méthode et d’anticipation, il sera question pour nous de rappeler à nos autorités, les grandes promesses faites. Nous sommes à la fin du premier mois de 2018, ce qui nous permet de nous-même nous interroger afin de pouvoir recadrer les choses et d’emmener nos autorités à pouvoir ouvrir les yeux sur les promesses et à les mettre en exécution.

En 2017, des étudiants avaient manifesté pour réclamer le paiement des bourses 2016-2017. Ont-ils été payés ?

L’Etat avait décidé de ne plus payer les bourses 2016-2017, parce que nous étions déjà en fin d’année 2017. Nous avons manifesté pour solliciter nos autorités qui ont eu une écoute et nous ont promis de payer ces bourses. Il faut dire vrai, depuis début décembre 2017, il y a un programme de paiement de cette bourse qui a été établi, nous suivons ce programme et nous rassurons les étudiants boursiers des UFR qui n’ont pas été payés que nous sommes très regardant sur cette question. Nous allons veiller à ce que les bourses de toutes les unités de formation et des universités puissent entrer en possession de leur bourse.

Est-ce que vous avez conscience que la FESCI à mauvaise presse auprès des autorités ivoiriennes et de certains parents d’élèves et d’étudiants ?

Je dirai clairement que le gouvernement a un regard lointain des réalités des élèves et étudiants de Côte d’Ivoire. Ils ont des préjugés sur la communauté estudiantine et scolaire. J’ai l’impression qu’ils ne connaissent pas cette communauté-là. Sinon, aujourd’hui, les élèves et étudiants ne sont pas réfractaires à l’Etat. Quand nous sentons que nous avons des difficultés, nous posons le problème d’une manière responsable, nous adressons des courriers, nous allons croiser des responsables. Mais quand on le fait, cela sous-entend qu’un cadre d’échange soit créé. Je pense que certaines mauvaises décisions prises contre la FESCI sont dues à un mauvais diagnostic, une méconnaissance de la gestion et de la vie universitaire et scolaire. Aujourd’hui, les élèves et étudiants sont conscients de leur contribution à développer cette nation. Et ils savent quel est le rôle qu’ils doivent jouer dans le développement de cette société estudiantine et scolaire. C’est pareil pour les parents. S’ils approchent de la FESCI, ils verront que c’est la seule organisation qui combat foncièrement la violence, et qui lutte contre toute forme d’injustice et de comportement malicieux qui ont tendance à ternir l’image des institutions universitaires.
La FESCI n’a pas pour vocation d’emmener les élèves et étudiants dans un gouffre. Un gouffre dans lequel, l’Etat et la société veulent nous maintenir. Donc, il y a lieu que l’Etat et les parents puissent changer leur regard sur la FESCI. Depuis que nous sommes aux affaires, il n’y a pratiquement pas eu d’actions violentes de la part de la FESCI.

Beaucoup de personnes en Côte d’Ivoire ne seront pas d’accord avec ce que vous dites. Qu’est-ce que vous entendez par « il n’y a pas eu d’actions violentes de la part de la FESCI » ?

Je vais vous dire ce qu’il se passe en réalité. Ce, à quoi nous avons assisté, lors de toutes nos manifestations pacifiques pour revendiquer nos droits, c’est que c’est des agents de la police qui font irruption dans les cités universitaires, qui violentent les élèves et étudiants, qui violent le principe de la franchise universitaire. Tout ceci est la preuve que ce ne sont pas les élèves et étudiants qui sont violents. La violence a plutôt changé de camp. C’est l’Etat qui violente les élèves, les étudiants et les enseignants. Il faut que nos autorités changent de stratégie, parce que cette stratégie n’est pas faite pour amener la paix et pacifier le milieu estudiantin et scolaire de Côte d’Ivoire. Nous avons toujours cherché un cadre d’échange avec nos autorités. Nous ne comprenons pas tout cet acharnement. Pourquoi les autorités sont violentes avec les élèves et étudiants, pourquoi ils veulent forcement embastiller la jeunesse estudiantine. Pourquoi ils veulent forcement caporaliser le milieu scolaire et universitaire. Pourquoi ils veulent empêcher les élèves et étudiants de militer dans une organisation de leur choix. Cela est anticonstitutionnel. Cela est le début de la violence et il faut le condamner. Il faut que le président de la République comprenne qu’intégrer les élèves et étudiants à la gestion des problèmes, c’est anticiper sur des crises. Tant que cela n’est pas défini dans la politique nationale, les élèves et étudiants seront obligés de manifester chaque fois qu’ils auront besoin d’obtenir un certain nombre de chose. Aujourd’hui nous prenons pratiquement un mois, deux mois à poser un problème, à chercher à négocier, à rentrer en contact avec les autorités avant de manifester. La FESCI n’est pas une petite organisation. Nous avons 28 ans d’existence aujourd’hui et nous sommes bien organisés. Ce n’est pas à nous de verser dans de petites choses.

Etes-vous en colère contre les autorités ivoiriennes ?

J’ai l’impression que d’autres se plaisent à maintenir la FESCI dans un carcan de violence, dans un monde diabolisé et penser qu’à partir de cela, ils pourront avoir le calme, la sérénité et la paix. C’est faux. La meilleure manière d’avoir la paix, c’est d’emmener tout le monde à contribuer au développement de cette nation.

Que pensez-vous de la FESCI et de la politique en Côte d’Ivoire ?

La FESCI est une chance pour le gotha politique ivoirien, parce que toutes les organisations politiques ont tendance à piocher au sein des anciens de la FESCI pour animer leur structure. La FESCI facilite la formation idéologique et politique de l’ensemble des élèves et étudiants Côte d’Ivoire. Au sortir des universités, ces personnes sont plus aguerries pour militer dans tous les partis politiques. C’est la FESCI en 1990 qui a été le fer de lance de la démocratisation dans nos sociétés. Tous les partis politiques doivent pouvoir féliciter notre organisation et reconnaître son poids dans la politique ivoirienne.

Qu’avez-vous à répondre à ceux qui pensent que la FESCI est manipulée par certains hommes politiques ?

La FESCI est plutôt manipulée par les élèves et étudiants de Côte d’Ivoire, manipulée par les problèmes des élèves et étudiants qui sont en réalité les seuls acteurs. La FESCI est une organisation apolitique, réellement apolitique, qui prend ses décisions en Assemblée générale, selon les textes, et nous ne sortons pas de ce principe-là. C’est ce qui fait que nous sommes encore en vie, équidistante de tous les partis politiques.

Quel regard portez-vous sur la FESCI d’hier à aujourd’hui ?

Nous tenons à féliciter tous les militants de la FESCI, qui aujourd’hui ont atteint une maturité légendaire, exceptionnelle, qui contribuent à donner une belle image de la communauté estudiantine et scolaire de Côte d’Ivoire. Ceci, pour vous faire comprendre qu’a un an de la fin de mon mandat, le congrès électif prévu par les textes et qui aura lieu à la fin de ma mission sera une fête dans la pure tradition de la FESCI. Notre rôle, c’est de grandir, de contribuer au développement du système éducatif, de rendre le système un peu plus compétitif.
Nous avons la chance d’être en contact avec tous nos anciens de la FESCI, avec qui nous sommes en de bons termes. Du premier secrétaire général Ahipeaud Martial, en passant par Eugène Djué, jusqu’à Mian Augustin avec qui nous échangeons toujours. Et pour ceux qui ne sont pas en Côte d’Ivoire, comme Charles Blé Goudé, nous prions Dieu qu’il puisse avoir la santé et qu’il puisse nous revenir.

Avez-vous des ambitions politiques ?

Pas pour l’instant. Vous savez, quand vous êtes très actif, il y a certaines questions qui vous passent difficilement dans la tête. A dire vrai, je suis pour le moment concentré sur mon mandat. Je serai donc à même de jauger à la fin de mon militantisme.

Alerte info/Connectionivoirienne.net

Commentaires Facebook

3 réflexions au sujet de “Interview Côte-d’Ivoire: La FESCI appelle l’État à tenir sa promesse de « réhabiliter les cités universitaires à l’abandon »”

  1. Quand je vous les préfabriqués des jeux de la francophonie je me dis qu’ il y a eu gâchis quelque part…

  2. Des jeunes « vieux » à 40 ans révolus et toujours en formation initiale…Ça vous donne bonne une idée du niveau académique et intellectuel de ces gens, Cote d’ivoire yako ton avenir n’est pas du tout gagné !

    Si déjà tous ces « vieux » pouvaient quitter la FAC et les cités universitaires (eux, leurs femmes et leurs enfants), cela laisserait plus de places aux gamins qui méritent d’y être.

Les commentaires sont fermés.