Côte-d’Ivoire: Diomandé Youssouf dit Wattao, l’histoire d’un «microbe» repenti sur la télévision nationale

Par Connectionivoirienne

En rupture avec la société –

L’émission « C’Midi » diffusée sur la première chaîne de la télévision nationale (Rti 1) a montré le lundi 23 avril 2018, un ex-membre des gangs à la machette plus connus sous le nom de microbes. Ces enfants sans scrupule et sans foi ni loi qui écument les rues abidjanaises et sèment la désolation en volant et en tuant.

L’animatrice Caroline Da Sylva qui recevait sur le plateau son invité du jour Diomandé Youssouf alias Wattao a, d’entrée de jeu, demandé au public dans le studio de se garder d’applaudir, sans doute à cause de la réputation sordide de son interlocuteur du jour. Souriant mais avec un air de regret sur le visage Diomandé Youssouf, aujourd’hui reconverti à la couture qu’il avait commencé dès son jeune âge a relaté un pan de sa vie. De la situation de sa famille et de sa propre condition sociale qui l’ont conduit dans l’abîme pour devenir un dangereux criminel.
« J’ai été à l’école coranique. En 2002 ça n’allait plus chez mon père et j’ai arrêté. Mon père a décidé que je fasse la couture. Quant à ma mère, elle avait dix enfants dont je suis l’aîné. Mon père est tombé malade par la suite et ma mère était obligée de faire la lessive des gens pour avoir de quoi à nous nourrir. En 2004, mon père gravement malade a été transféré à Boundiali et je ne pouvais pas supporter cette misère. Surtout je me suis dit que ma mère ne pouvait pas être esclave de quelqu’un. C’est ainsi qu’un jour, un truc (une opération microbe) s’est passé au quartier et j’y ai participé. J’ai eu un peu d’argent que je suis venu remettre à ma mère», fait-il savoir. Ayant pris goût à la violence et au gain facile, le jeune Diomandé s’est converti en enfant de la rue, abandonnant ainsi le domicile familial et l’apprentissage de la couture. Les agressions et les vols sont devenus son quotidien et il fallait y gagner des grades. « Dans la rue, le plus fort gagne et il faut se rendre plus féroce pour s’en sortir. On le faisait pour s’enrichir. En 2006, le phénomène était limité mais il a évolué avec le temps », explique-t-il.

Dans cette gangrène, Diomandé Youssouf a eu trois enfants et il lui fallait les prendre en charge. Il lui arrivait au détour de quelques opérations, d’avoir des regrets mais la violence était ancrée en lui. Comment y sortir ?

Au moins deux faits vont créer un déclic en lui. Diomandé raconte qu’un jour, alors qu’il était sorti pour une promenade en compagnie de sa petite fille dans les bras, il a été reconnu par des gens dans un quartier d’Abobo. Ceux-ci l’ont alors pris en chasse pour le lyncher et d’après lui, il dut son salut à sa petite fille. Revenu à la maison, il s’était posé beaucoup de questions sur le sens à donner à sa vie et à sa progéniture. Un soir, pendant qu’il regardait la télé, relate-t-il, il tombe sur une émission qui parlait de paix. Selon lui, un jeune invité qu’il trouve innocent parle de l’importance de la paix. Il se demande alors mais qu’a bien pu faire de mal ce jeune homme pour insister tant sur la paix alors que s’il y a des gens qui doivent parler de paix, c’est bien ceux de sa trempe.
Vint alors sa rencontre avec l’ONG Indigo par le biais d’un ‘’vieux père du quartier’’ comme il le dit. Au départ réticent parce que dans le jargon de rue ‘’indigo’’ renvoie à indic donc à dénonciateur, il finit par s’accrocher avec l’aide de l’ONG. Un moment de sa vie qui lui sera bénéfique car il va retrouver son métier de couturier. Aujourd’hui, il dit être épanoui même si la couture ne lui remporte pas de gros gains. Le fait de ne pas avoir à craindre une descente policière à tout moment est pour lui une source de satisfaction. Aujourd’hui, il veut participer à la sensibilisation contre le fléau des ‘’enfants en rupture avec la société’’, nouveau vocable moins stigmatisant pour les désigner à la place de ‘’enfants en conflit avec la loi’’.

SD à Abidjan
sdebailly@yahoo.fr

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3 réflexions au sujet de “Côte-d’Ivoire: Diomandé Youssouf dit Wattao, l’histoire d’un «microbe» repenti sur la télévision nationale”

  1. Voilà un témoignage qui montre que cette histoire de « microbes » a commencé sous le régime des refondateurs et a pris de l’ampleur au fil des années contrairement à ce qu’ils racontent à tue-tête.

    Comme pour tout le reste, ce sont les autres qui doivent nettoyer leur merde…

  2. Non mon ami, la paternité de « microbes  » se définit selon les contextes !!

    Qu’il y ait eu des « microbes » sous la refondation n’est pas impossible. Par contre faire de la refondation les responsables de cette criminalité juvénile est une grossière connerie. On parle ici bien d ‘un petit dioula qui a choisi la criminalité pour subvenir à ses besoins, comme tous ces rebelles qui ont pris les armes en 2002 au nom d’un homme OUATTARA et qui ont pillé les zones CNO et réduit la ville de BOUAKE en « cendres » !!

    Non mon ami, tout était fait par le gouvernement GBAGBO pour relever ce pays quand des rebelles ont choisi délibérément de le détruire et de le ramener à l’âge de pierre. Ces rebelles on servi de modèle et d’inspiration pour de nombreux jeunes qui ont rejeté l’autorité d’état !!

    WATTAO n’est ici qu’un effet accompagnateur.

    Par contre, les « microbes », tels qu’on les connait de nos jours, des jeunes, en majorité dioula, qui sévissent dans à ABOBO et ailleurs, qui remettent une partie de leur butin à des chefs de guerre protecteurs, son nés et produits par le système OUATTARA qui accède au pouvoir sans réussir à contrôler ses chefs de guerre, encore mois à récupérer les armes en circulation.

    Ces jeunes représentent la frustration perçue par des hommes qui pensent ne pas avoir été correctement rémunérés par OUATTARA, qui roule carrosse dans la ville, lui et ses cadres RDR !!

    Ne confondons pas les choses et surtout, ne lions pas ces microbes avec la criminalité infantile qui sert de prétexte ou de fourre-tout à ce pouvoir pour ignorer la question ou la minimiser !!

    Tous ces jeunes devenus adultes entretemps, faisaient bien parti des troupes pro OUATTARA qui se sont déversées sur les villes d’ABIDJAN ou de SAN PEDRO et se considèrent comme des réservistes en cas de reprise des hostilités !!

    Comme pour le reste, personne ne viendra nettoyer la merde de OUATTARA et il est à redouter que ces jeunes se permettent encore de sévir si jamais le système OUATTARA tombe !!

    Et je ne serai pas surpris de voir des « microbes » s’en prendre aux biens d’anciens cadres RDR en fuite, dans Abidjan ou dans les zones CNO.

    Les règlements de comptes ne se font pas toujours entre faction opposée ! Ceux qui jugent avoir été oubliés par ce pouvoir seront les premiers à se servir dans les domiciles des cadres RDR, si jamais les choses se gâtent !

    Et alors on ne pourra dire qu’un chose : OUATTARA aurait du nettoyer sa propre merde avant de partir !!

    Mais bon, c’est entre vous et nous, on s’en fout !!

    Dabakala !!

  3. « Voilà un témoignage qui montre que cette histoire de “microbes” a commencé sous le régime des refondateurs et a pris de l’ampleur au fil des années contrairement à ce qu’ils racontent à tue-tête. Comme pour tout le reste, ce sont les autres qui doivent nettoyer leur merde… »

    Encore un vernis qui s’écaille et laisse voir la conviction profonde, au grand étonnement de ceux qui avaient cru à la posture neutre de l’auteur. Comme @Peace, comme @Wara et tant d’autres avant lui affichés d’entrée neutres avant que tombe le masque. Les Microbes, parlons-en donc.

    Il y a toujours eu une criminalité juvénile en Côte d’Ivoire, et des amis de mon enfance ont fait des séjours (à 10-12 ans) derrière les grilles du commissariat du quartier, et certains envoyés dans des centres spécialisés comme il en existaient en Côte d’Ivoire sous FHB. Je n’irai pas jusqu’à dire que Houphouët était l’auteur du phénomène, mais le fait est que des parent irresponsables prenant pour prétexte la vie dure démissionnent depuis toujours de leur responsabilité dans l’éducation de leur progéniture, ce qui a pour conséquence la naissance d’une criminalité juvénile.

    C’est en 2003 qu’est sorti en salle « La Cité de Dieu », un film Brésilien hyper-violent mettant en scène les enfants criminels, voleurs, drogués, superstitieux, etc. Ce film débarque en partage PtoP (peer to peer) sur lex sites de Bit Torrent autour de 2005. A cette période, la piraterie explosait avec des CD de piètre qualité vendus aux carrefour, dont des films pornographiques et ceux dits d’action. Voilà comment un film interdit aux mineurs partout dans le monde investit les bas-quartiers, Abobo notamment, à une période où le pseudo-lecteur DVD se démocratisait (ces lecteurs raccordables aux TV se vendaient à 15-20 mille FCFA). Ainsi donc, peu de familles d’Abobo avaient échappé au succès de « La Cité de Dieu ». C’est dans ce film qu’un gang d’enfants de 7 à 12 ans est né, prenant pour nom « Les Microbes ». Ils attaquaient en bande au couteau, à la machette, au gourdin votre même au pistolet.

    Les Microbes naîtront suite à cette inspiration offerte par le cinéma quand, après la victoire rebelle par les armes, Abobo continuera sur sa lancée rebelle : commune morcelées en zone d’influence et sous la coupe de nouveaux « Commandants » sortis du néant et levant impôts, taxes et exerçant divers passe-droits sur la population, s’enrichissant à vitesse exponentielle. Au grand dam d’enfants qui aidèrent au combat, utilisés comme indics voire comme chair à canon. Dans une commune sinistrée, manquant de tout et abandonnée à elle-même, ces gosses se mirent à chercher leur pitance en s’organisant en bandes. Et quel nom leur donna la population qui avait déjà abondamment regardé « La Cité de Dieu », en constatant la similitude du mode opératoire ? Je vous le donne en mille.

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