Sur les traces du Pdci-Rda en Côte-d’Ivoire: Un navire qui tangue ?

Siandou Fofana

Éminent cardiologue pédiatre dont la renommée a largement dépassé les frontières ivoiriennes, médecin personnel du Président Félix Houphouët-Boigny, ancien ministre de la santé du Président Bédié, Maurice Kakou Guikahué est un pur produit du PDCI-RDA. Façonné dans le moule du Parti septuagénaire, il a gravi les échelons palier par palier pour être aujourd’hui le Chef du Secrétariat Exécutif du vieux Parti. Malgré les difficultés qui ont jalonné son parcours après le retour au multipartisme, maison saccagée et incendiée, Guikahué a été de tous les combats, et son ardeur militante n’a jamais baissé d’un iota.

Si du haut de son poste de secrétaire à l’organisation, il forçait l’admiration, aujourd’hui le constat est moins reluisant. Sa gestion du PDCI, en qualité de secrétaire exécutif en chef, est chaotique. Jamais le PDCI-RDA ne s’était donné à pareil spectacle. Les militants sont radiés à tour de bras, les animateurs du Parti à la base sont dégommés à tout va. Des nominations sont faites le jour pour être remis en cause le lendemain. D’illustres inconnus sont propulsés au-devant de la scène au détriment de militants reconnus. Le parrainage du PDCI est accordé aux enfants de la tante qui n’en ont que faire, et refusé à ceux qui en ont besoin pour consolider les bases du PDCI dans leurs régions. De grands animateurs du Parti sont poussés à la porte de sortie. Bref, c’est la pagaille totale.

Le PDCI-RDA a toujours été caractérisé par la sagesse de ces prises de décisions et par la recherche constante du compromis. D’où vient cette propension au radicalisme comme modèle de gestion ces temps-ci ?

Gouverner c’est prévoir, a-t-on coutume de dire. Qu’est-ce qui urgeait pour que le PDCI prononce le divorce d’avec ses alliés du RDHP avant les échéances municipales et régionales ? Alors que tous les cadres du PDCI, élus locaux, avaient plus ou moins constitué leurs listes autour du RHDP. A-t-on pris à leurs justes mesures les conséquences d’une telle décision ? Pourquoi met-on les cadres du Parti dans cette situation inconfortable ?

De façon stratégique, le PDCI aurait pu faire l’économie de cette situation qui n’est guère à son avantage. Les cadres auraient pu partir tranquillement aux élections sous la bannière du RHDP, gagner les sièges dans les différentes circonscriptions électorales, être inscrits sur les listes dans des régions où le PDCI, qui se targue d’avoir une assise nationale, n’a pas de candidat. Il n’y aurait ni radiation, ni destitution, ni indiscipline.

A l’orée des échéances électorales de 2020, le divorce aurait pu être prononcé sans grande conséquence. Les cadres n’auraient eu aucun mal à quitter les lambris dorés du pouvoir. Et le PDCI-RDA avec toutes ses forces vives pouvait aller à la conquête du pouvoir d’Etat. Au lieu d’être aujourd’hui obligé de se séparer de ses meilleurs atouts.

L’adversaire politique, que le PDCI s’est à nouveau mis à dos, est redoutable et ne s’embarrasse pas de fioritures. Il sait comment tordre le bras à ses adversaires, et est d’autant plus dangereux qu’il a aujourd’hui l’appareil étatique avec lui. Billon en a fait les frais dans le Hambol, Akossi Bendjo, démis de ses fonctions de maire, est contraint à l’exil. La presse nous apprend que l’entreprise du candidat PDCI du Plateau serait fermée, les maires Aby Raoul de Marcory et N’dohi Raymond de Koumassi, pour avoir refusé le parrainage du RHDP, seraient soumis à des inspections de l’Etat. Et il n’y aura aucune surprise, s’ils étaient démis tout comme Bendjo. Les cris d’orfraie ou les déclarations d’indignation ne changeraient pas grande chose. La partie s’avère difficile et la Direction du PDCI doit veiller à ne pas faire le vide autour d’elle.

A Port-Bouët, le PDCI-RDA a envoyé le Ministre Siandou Fofana, un autre enfant du sérail, en mission. Il avait pour tâche de remplacer la défunte Déléguée communale et Maire, Hortense Aka-Anghui, et d’élargir les sillons qu’elle a tracés dans la commune. Il s’y est tellement bien pris qu’en un rien de temps, il a ravivé la flamme militante et dynamisé les bases. Pendant qu’il s’attelait à remplir au mieux sa mission sur le terrain, son adversaire le plus farouche a été nommé au Bureau politique. C’était le signe annonciateur de ce qui se tramait dans l’ombre. L’investiture du PDCI va lui être refusée pour être attribuée à son adversaire qui n’a jamais été demandeur. Alors qu’en sa qualité de Délégué communal, il est le seul à avoir sollicité cette onction. Il a beau clamé son indéfectible attachement au PDCI, ceux qui ont actuellement le pouvoir de décision, vont pousser le cynisme jusqu’à le démettre de ses fonctions de Délégué communal. Comment envoyer quelqu’un en mission et chercher à l’humilier de la sorte ? Ce cadre émérite, qui met sa fortune personnelle à la disposition du PDCI, est obligé de se réfugier au RHDP pour respecter l’engagement pris devant Hortense Aka-Anghui.

Le pilotage à vue de la Direction du PDCI se manifeste avec la nomination du Permanent de la délégation communale de Port-Bouët. Nommé le samedi 1er septembre comme Délégué communal, il sera remplacé 3 jours plus tard par un autre cadre du Parti. Ce dernier, brillant intellectuel, hérite d’un cadeau empoisonné puisque toutes les structures formelles du PDCI sont engagés aux côtés du Ministre Siandou Fofana, n’admettant pas les décisions cavalières prises par le Parti. Le PDCI est désormais dans la rue à Port-Bouët, le bâtiment mis gracieusement à sa disposition par la famille Aka-Anghui, lui a été retiré devant La valse des décisions alambiquées de ses dirigeants. Et Le comble, c’est que toutes ces décisions tombent sur la tête des militants sans aucune consultation préalable, ni enquête de terrain. Ce qui se passe à Port-Bouët est à l’image de la gestion chaotique du Parti par le Secrétariat Exécutif.

Houphouët-Boigny a toujours dit qu’il préférait l’injustice au désordre. Une injustice, ça se répare mais le désordre quand il s’installe, c’est la désolation. Le navire du PDCI-RDA tangue. Y a-t-il encore un capitaine à bord pour éviter le naufrage ?

Justice Konan

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1 réflexion au sujet de « Sur les traces du Pdci-Rda en Côte-d’Ivoire: Un navire qui tangue ? »

  1. COURAGE ENCORE ! LE GÔPÔ DESIGNERA LE VRAI SORCIER…

    Revenons quelques années en arrière.

    En 2013, au 12eme congrès du PDCI des aménagements importants avaient été opérés. Fin de l’organe SG ! Place au Secrétariat Exécutif.

    Ainsi ’le secrétaire exécutif nommé sera le véritable numéro deux et homme fort du parti, agissant par délégation et sous les ordres du président du parti’’.
     
    La grande innovation était que, le secrétariat exécutif n’etait plus un organe autonome du parti. A ce titre, le Président du parti pouvait désormais débarquer à tout moment le secrétaire exécutif, ce qui était différent avec le texte et l’appellation précédents….

    Cinq ans plus tard pourquoi peut on accuser Guikahué ?

    Le gouvernail du navire est UNIQUE.

    Si le navire tangue sur les eaux alors qu’il n’y a ni orage ni vents violents en vue et que de surcroit l’on est loin du Triangle des Bermudes, il faut s’interroger sur l’aptitude et l’état physique du Commandant !

    Lui seul doit être soumis au GÔPÔ. L’epreuve de l’ordalie nous situera définitivement sur ce qui mine le vieux parti.

    A moins que tout simplement le PDCI comme tous les partis issus du RDA de Bamako, usé par le temps et le pouvoir, incapable d’opérer les mutations de l’heure, empêtré dans un management à l’ancienne désormais inopérant, ne soit au terme de son voyage terrestre !

    Certains pensent même, à tort ou à raison que le PDCI est mort en vérité depuis le siècle dernier.
    Précisément le 7 décembre 1993.

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