Houphouëtistes en Côte-d’Ivoire: Ouattara brandit la carotte et le bâton

Le 4è Congrès extraordinaire du RDR a permis de montrer que Ouattara et le RDR ne veulent plus perdre du temps. Ils ont perdu patience et usent du chantage au mariage, menaçant les alliés du RHDP pour anéantir les perspectives de confrontations dans les urnes avec le PDCI-RDA et rester les maîtres du jeu pendant…40 ans.

Alassane Ouattara, chef de l’État et président d’honneur du RDR, a engagé une course contre la montre pour la constitution du RHDP en parti unifié. «Maintenant que nous avons les textes fondateurs et l’accord politique, je demande à la direction du RHPD de procéder au dépôt des textes au ministère de l’intérieur.

Je propose l’organisation du Congrès constitutif du RHDP dans des meilleurs délais», a-t-il intimé à la clôture du 4è Congrès extraordinaire du RDR.

Pour parvenir à ses fins, Alassane Ouattara souffle le chaud et le froid. Dans un premier temps, il a tenu à chanter à l’unisson avec son principal allié au RHDP, Henri Konan Bédié, président du PDCI-RDA, afin de le caresser dans le sens du poil et le rassurer.

Le 19 avril 2018, après la signature de l’accord politique sur le parti unifié, Bédié faisait des mises au point: «Cet accord politique ne signifie nullement la dissolution du PDCI-RDA auquel j’ai souhaité une longue et longue vie». Ouattara est en phase: «Je n’accepterai jamais la mort subite du RDR comme certains l’ont fait penser; le RDR vivra».

«Aucun parti membres du RHDP ne disparaitra, car nous avons pris les dispositions. Tous les partis membres du RHDP figureront dans le logo du RHDP; donc nos partis ne disparaitront pas. Ce qui se développe s’est les retrouvailles des enfants de Félix Houphouët-Boigny de bâtir la Côte d’Ivoire dans la paix dans l’union, la discipline et le travail, pour des décennies et des décennies», a-t-il martelé.

Pour réaliser cette mainmise sur l’État ivoirien, «pour des décennies et des décennies» surtout que le RDR ambitionne de rempiler pendant quarante ans comme le PDCI-RDA, Ouattara brandit le bâton et la carotte.

Il n’a fait aucune allusion aux morceaux du MFA et du PIT qui ont rallié la coalition politique. Ce sont des bras cassés. Mais en même temps qu’il annonce le prochain retour d’Albert Mabri Toikeusse, président de l’UDPCI, vidé du Gouvernement le 25 novembre 2016 pour avoir fait cavalier seul aux législatives, il met la pression sur Soro Brahiman, président de l’UPCI.

Le 28 avril 2018, au cours de son 2è Congrès extraordinaire et par un vote massif de 94%, les militants du parti créé par l’ancien ministre Gnamien Konan, ont désavoué leur président Soro. Et ce parti, exclu du partage du gâteau depuis le 25 novembre 2016 avec l’éviction de son fondateur du Gouvernement, est condamné à boire le calice jusqu’à la lie, sauf si ««bien évidemment il changeait d’avis cela pourrait être modifié».

Mais c’est avec le PDCI-RDA que le chantage pourrait prendre l’allure d’une partie de poker menteur. D’une part, Ouattara, avec l’organisation du Congrès constitutif du RHDP qu’il veut dans les meilleurs délais, tend un piège au PDCI-RDA et pousse Bédié à la faute; ce dernier n’entrevoyant cette perspective qu’après la présidentielle de 2020. Ouattara laisse ainsi, comme avec l’UPCI, planer l’épée de Damoclès des représailles et des limogeages.

D’autre part, si les deux leaders sont en accord sur la souveraineté de chaque parti, ils sont en désaccord total sur une question préjudicielle pour l’ex-parti unique: la candidature à la présidentielle de 2020. «Le PDCI présentera, en RHDP, un candidat en 2020.Un candidat à l’élection présidentielle de 2020 en souhaitant l’appui de ses alliés compte tenu des sacrifices qu’il a consentis pour les uns en 2010 et 2015», a soutenu Bédié le 19 avril 2018.

Et «que se passera-t-il si le RDR se refuse à le faire?» lui ont demandé les journalistes. Sa réponse: «Nous appliquerons la démocratie. Chacun se présentera et nous irons aux élections». Il entend l’exécution de la plate-forme signée à Paris le 18 mai 2005 qui a permis à tous les quatre partis membres du RHDP (PDCI-RDA, RDR, MFA et UDPCI) de présenter, en 2010, la candidature de leur président au premier tour de la présidentielle du 31 octobre 2010.

Ouattara a choisi le bras de fer. Après avoir défendu, le 6 août 2017 dans son message à la nation, que chaque parti, comme en 2010, pouvait, s’il le voulait, faire acte de candidature à la présidentielle conformément aux dispositions constitutionnelles, il est revenu sur sa position. Il fait maintenant et unilatéralement campagne pour des primaires –qui sont aussi un exercice démocratique à huis clos – au sein du RHDP. «C’est le meilleur parmi nous qui sera le candidat du RHDP et tout le monde peut-être candidat», a-t-il défendu

Il y a deux explications pertinentes: ou le RDR a peur de la confrontation avec le PDCI-RDA qui, arguant qu’il a été spolié en 2010, est gonflé à bloc et veut prendre sa revanche; Ouattara est à la manœuvre pour détruire cette perspective de duettistes qui deviennent des duellistes. Ou alors, après avoir triomphé sans gloire en 2015, le RDR souhaite ainsi rester en roue libre, sans combats électoraux.

Et alors même que Mabri Toikeusse veut aussi être le candidat unique du RHDP en 2020, le RDR qui se targue d’être le premier parti politique sur le papier en Côte d’Ivoire, apparaît ainsi comme le fleuve qui veut, contre toute logique, se jeter dans les rivières sur le terrain. Au grand désarroi de Soro Kigbafori Guillaume, président de l’Assemblée nationale et vice-président du RDR

FERRO M. Bally journaldeferro

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