Monde – Les émigrés envoient toujours plus d’argent vers le Sud (World Bank)

Les envois de fonds vers l’Afrique résistent à la crise financière, selon la Banque mondiale

WASHINGTON, 9 novembre 2010/African Press Organization (APO)/ — Les fonds envoyés par les migrants à leurs proches en Afrique subsaharienne atteindront 21,5 milliards de dollars américains cette année, malgré une légère baisse en 2009 en raison de la crise financière mondiale, selon « Remittances and Migrations Factbook 2011 » (Recueil des statistiques de 2011 de la Banque mondiale sur les migrations et les envois de fonds).

Les données indiquent que les envois de fonds en direction de l’Afrique ont chuté d’environ 4% entre 2008 et 2009 ; c’est la première fois qu’il y a une baisse d’une année à l’autre depuis 1995.

« Selon nos estimations, la reprise se poursuivra au cours des deux prochaines années ; et les envois de fonds vers l’Afrique subsaharienne devraient atteindre environ 24 milliards de dollars d’ici 2012 », a déclaré Dilip Ratha, Chef de l’unité Migrations et Envois de Fonds à la Banque mondiale.

M. Ratha souligne que les chiffres sur lesquels se base le rapport ne tiennent pas compte des canaux informels utilisés par des millions de migrants. Ces chiffres sont donc en-deçà des montants réels.
Dans l’ensemble, les envois de fonds à travers le monde devraient atteindre 440 milliards de dollars d’ici fin 2010, en hausse par rapport au niveau de 2009 (416 milliards). Environ les trois quarts de ces fonds, soit 325 milliards, iront aux pays en voie de développement.

La Banque mondiale estime par ailleurs que les flux vers les pays en développement devraient encore augmenter au cours des deux prochaines années et franchir la barre de 370 milliards de dollars d’ici 2012.

« Ces fonds sont une bouée de sauvetage pour des familles et des communautés entières à travers l’Afrique, surtout au lendemain de la crise financière », précise Dilip Ratha. « De par leur ampleur et du fait qu’ils sont en devises étrangères et vont directement aux ménages, ces transferts ont un impact significatif sur la réduction de la pauvreté, le financement du logement, de l’éducation, et d’autres besoins essentiels, et même sur les investissements et la création d’entreprises », a-t-il ajouté.

Il est donc essentiel de faciliter les envois de fonds et de les rendre moins coûteux. Or à l’heure actuelle, les frais d’envoi vers le continent africain s’élèvent en moyenne à 10% du montant, ce qui constitue le taux le plus élevé d’une région à l’autre du globe. Envoyer de l’argent coûte encore plus cher d’un pays à l’autre au sein du continent.

En termes de montants, le Nigeria est de loin la première destination des fonds envoyés par les migrants, recevant à lui seul 10 milliards de dollars en 2010. Ce montant représente une légère avancée par rapport à l’année précédente, où le pays avait perçu 9,6 milliards de dollars. Viennent ensuite le Soudan (3,2 milliards de dollars), le Kenya (1,8 milliard), le Sénégal (1,2 milliard), l’Afrique du Sud (1 milliard), l’Ouganda (800 millions), le Lesotho (500 millions), l’Éthiopie (387 millions), le Mali (385 millions) et le Togo (385 millions).

En termes de pourcentage du produit intérieur brut, les principaux bénéficiaires en 2009 étaient le Lesotho (25% du PIB), le Togo (10,3%), le Cap-Vert (9,1%), la Guinée-Bissau (9,1%), le Sénégal (9,1%), la Gambie ( 7,9%), le Libéria (6,2%), le Soudan (5,6%), le Nigeria (5,6%) et le Kenya (5,4%).

Flux migratoires

Selon l’estimations, près de 22 millions de personnes ont migré hors de l’Afrique subsaharienne. Le continent détient le taux de migration interne le plus élevé au monde, avec notamment trois migrants africains sur quatre qui vivent dans un autre pays d’Afrique.

Par ailleurs, les îles et les pays dits « fragiles » ou touchés par un conflit ont en général des taux élevés d’émigration de personnel hautement qualifié. Dans le cas du Cap-Vert, par exemple, ce sont 68% des personnes qui ont fait des études supérieures qui ont quitté l’archipel. Un phénomène observé aussi en Gambie (63%), en Île Maurice (56%), aux Seychelles (56%), en Sierra Leone (53%), au Ghana (47%), au Mozambique (45%), mais aussi au Liberia (45%), au Kenya (38%) et en Ouganda (36%).

Les couloirs migratoires les plus actifs d’Afrique subsaharienne se situent entre le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire (1,3 million de migrants), le Zimbabwe et l’Afrique du Sud (900 millions de migrants) et aussi entre la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso (800 millions de migrants). À cette liste s’ajoutent les flux migratoires entre l’Ouganda et le Kenya, l’Erythrée et le Soudan, le Mozambique et l’Afrique du Sud, le Mali et la Côte d’Ivoire, la République démocratique du Congo et le Rwanda, le Lesotho et l’Afrique du Sud, ainsi qu’entre l’Érythrée et l’Éthiopie.

Migration and Remittances Factbook 2011 est la deuxième édition d’un volume publié en 2008. Le recueil se base sur les données statistiques rendues publiques par des sources fiables, ce qui explique le manque de données relatives à certains couloirs importants, par exemple Zimbabwe-Afrique du Sud.

SOURCE 

The World Bank

Monde – Les émigrés envoient toujours plus d’argent vers le Sud
La Banque mondiale vient de publier un état des lieux sur les transferts de fonds déclarés par les immigrés au niveau mondial. Les États-Unis, l’Arabie saoudite et la Suisse sont les principaux États expéditeurs, l’Inde, la Chine et le Mexique en sont les principaux récipiendaires

Jeannine, de nationalité ivoirienne, travaille à Paris comme nourrice. Elle garde trois enfants et dépasse les 40 heures par semaine, ce qui lui assure 2 000 € net de revenus mensuels. Près de la moitié de son salaire est envoyé à sa famille, chaque mois, en Côte d’Ivoire.

« Je nourris ma mère, mes trois enfants restés au pays, plus mon petit frère qui ne travaille pas », résume-t-elle. À l’instar de Jeannine, des dizaines de millions d’expatriés garantissent un revenu minimal aux familles de leur pays d’origine.
Embellie d’après-crise

Le volume d’argent envoyé par ces immigrés a atteint 325 milliards de dollars (233 millions d’euros) en 2010, d’après le dernier rapport de la Banque mondiale. Ces transferts de fonds déclarés égalent aujourd’hui le niveau record qu’ils avaient atteint en 2008, peu avant le déclenchement de la crise économique. Ils sont en augmentation de 6 % par rapport à 2009, année au cours de laquelle la hausse du chômage dans les pays riches avait d’abord frappé les immigrés.

Actuellement, l’argent part d’abord des États-Unis, qui comptent 42,8 millions d’immigrés, avec 48,3 milliards de dollars envoyés vers les pays d’origine, suivis de l’Arabie saoudite (26 milliards de dollars), de la Suisse (19,6 milliards), de la Russie (18,6 milliards) et de l’Italie (13 milliards). De la France, qui compte 6,7 millions d’immigrés, sortent 5,2 milliards de dollars, ce qui la place au 14e rang des États expéditeurs.
La France, 5e bénéficiaire des transferts de fonds

En valeur, l’Inde, deuxième nation à compter le plus de ressortissants travaillant à l’étranger (11,4 millions d’émigrés), après le Mexique (11,9 millions), reçoit le plus d’argent de ses émigrés (55 milliards de dollars), suivie de la Chine (51 milliards de dollars), du Mexique (22,6 milliards) et des Philippines (21,3 milliards).

Plus surprenant, la France, avec 1,7 million de ressortissants travaillant à l’étranger, principalement en Europe, se place en 5e position avec 15,9 milliards de dollars de transferts de fonds en sa faveur.

Le volume de ces échanges devrait encore se renforcer en 2011 et 2012 selon les prévisions des experts pour dépasser les 370 millions de dollars (265 millions d’euros).

« Cependant, le niveau élevé du chômage pousse de nombreux pays d’accueil à durcir leur quota d’immigration, ce qui ralentira probablement la croissance des transferts de fonds, commente Dilip Ratha, chef de l’unité migrations à la Banque mondiale. Par ailleurs, les variations de change pourraient avoir des effets imprévisibles sur ces flux. »

Olivier TALLÈS

la-croix.com

Commentaires Facebook