Débat courtois et civilisé – Désaccord total sur le couvre feu du dimanche

L’Intelligent d’Abidjan

«LE PREMIER MINISTRE Alassane Ouattara », a dit Laurent Gbagbo. Pour rappeler qu’il est le chef de l’Etat mais également qu’il respecte son adversaire. Cela a peut-être mis à l’aise Alassane Ouattara qui s’est voulu familier, avec du ‘’Laurent, mon frère Laurent’’. Le candidat du RHDP choisit le ton familier pour éviter de dire «chef de l’Etat», et pour éviter de rehausser plus que lui-même son interlocuteur qui parlant en tant que chef de l’Etat, annonce des mesures pour sécuriser les élections et décrète en direct un couvre-feu à partir du Dimanche 22 heures. Gbagbo tente le coup de François Mitterrand face à Jacques Chirac. Alassane Ouattara a critiqué la décision de couvre-feu prise par Laurent Gbagbo. Il estime que ce n’était pas nécessaire. Pour lui cette décision peut contribuer à alourdir l’atmosphère et donner l’impression que tout ira mal. Le chef de l’Etat n’a pas voulu revenir là dessus aussitôt. Un décret d’une telle nature, en pleine campagne est-il utile, alors que la situation de violence ne s’est pas aggravée. C’est vrai, gouverner, c’est prévenir. Mais….En tout cas, l’on dit déjà que Blaise Compaoré sera saisi. La CEI qui organise l’élection a-t-elle, posé le problème ? Comment les agents électoraux et le personnel des médias, et autres travailleurs de nuit, vont-ils travailler ? Tout le long du débat, il y a eu confrontation entre le Laurent Gbagbo candidat et le Laurent Gbagbo président. Après la polémique du départ sur la responsabilité de Ouattara, Laurent Gbagbo a calmé le jeu. Et il a reconnu beaucoup d’affinités entre lui et son adversaire. Trente minutes après le début du débat, Brou Aka Pascal semblait bien serein et maître du jeu. Laurent Gbagbo paraît après moins concentré sur certains sujets quand il parle de la justice, notamment l’affaire Cora dont il ne souvient pas. La difficulté de l’exercice pour Laurent Gbagbo est que justement il est chef de l’Etat sortant et en exercice. Alassane Ouattara commence à parler de chiffres avec la question de la grande et future école de magistrature et les dix milliards de FCFA promis par lui. Sur la question de la décentralisation et l’organisation des pouvoirs, Alassane Ouattara s’oppose à Laurent Gbagbo. Laurent Gbagbo rectifie encore Alassane Ouattara sur la question de l’élection de 2000. La division demeure sur la question. Il sera difficile de réconcilier les uns et les autres. Sur la question de la réconciliation nationale, Laurent Gbagbo annonce un autre forum. Il dénonce l’injustice et plaide pour la justice. Le chef de l’Etat rappelle son bilan de paix, ses efforts pour la réconciliation. Gbagbo vagabond de la paix ! Ouattara revient, rebondit en parlant de commission d’enquête et de commission vérité et réconciliation. Brou Aka Pascal reste vigilant et passe au second thème du débat, notamment la défense nationale. Gbagbo parle de pays divisé comme cause de non organisation des élections. Pour lui Marcoussis et les résolutions de l’Onu n’ont pas permis d’aller à l’élection. Seul l’accord de Ouaga a ouvert la voie. Ouattara avait estimé que les différents accords pouvaient et devaient permettre d’aller aux élections un peu plus tôt. Sur la question de la défense et de la sécurité, pas de grande polémique. On arrive à l’économie. Le débat dure une heure déjà. Alassane Ouattara est, pense-t-on, dans son domaine. Il peint un tableau sombre de l’état de l’économie de la Côte d’Ivoire. Et sort encore les chiffres : 12 mille milliards de FCFA. Gbagbo reconnaît que l’économie ivoirienne est malade, en partie à cause de la guerre. Il parle de la dette de 6500 milliards de FCFA qu’il a dû endosser. De la reprise des négociations avec les bailleurs de fonds. Gbagbo se veut positif. Il ne fait pas de la guerre un prétexte et le raccourci pour tout expliquer. Mais pourquoi n’a-t-il pas choisi depuis ce registre. Le candidat LMP annonce l’abondance : pétrole, manganèse, chemin de fer, Touba-San Pedro. Gbagbo dégage des perspectives au niveau de l’agriculture. « La pauvreté n’est pas une fatalité », rassure Ouattara qui met en avant ses qualités d’économistes face au politique, à l’enseignant et historien Laurent Gbagbo. Le candidat RHDP revient sur une information qu’il a donnée sur Africa 24 : «près de 3000 milliards de dollars d’avoirs appartenant aux Ivoiriens seraient disponibles dans des banques à l’étranger». Sur la question des incitations au secteur privé, Ouattara se fait l’avocat des opérateurs privés et des investisseurs. Transparence, lutte contre le racket, la corruption, etc. Les engagements sont forts. Laurent Gbagbo à son tour revient sur ses idées : « Depuis 87, j’ai écrit que le secteur privé est le moteur de l’économie ». Toutefois il fait une mise au point : « Nous sommes à une élection présidentielle. A une élection présidentielle, on ne cherche pas forcément un bon économiste » Gbagbo réagit aux valorisations que se donne Ouattara en sa qualité d’économiste. On voit le candidat chercheur en Histoire excédé par la profession de foi et la proclamation du candidat-économiste. Le chômage, Laurent Gbagbo le reconnaît, mais il estime que la question a commencé depuis le temps d’Houphouët, dont Ouattara se réclame, ajoute-t-il. Sur la question de la réduction du train de vie de l’Etat, Ouattara estime que des ressources peuvent être dégagées pour la construction d’écoles et diverses infrastructures. Une proposition qui rappelle un peu les critiques passées de Gbagbo contre le budget de souveraineté du temps de Bédié et d’Houphouët. Il est possible de sortir du chômage massif, reconnaît Laurent Gbagbo qui ajoute qu’il ya vraiment une détresse sur la question. Pour sauver la Côte d’Ivoire de demain, et que les jeunes ne soient plus désespérés, il faut mettre l’accent sur le chômage. « Le chômage, tel est le point essentiel du moment ». Pas trop content de la distance que Laurent Gbagbo prend en le désignant avec l’appellation M le Premier ministre, Alassane Ouattara, précise qu’ils s’appellent pourtant en privé par leurs prénoms respectifs. Gbagbo le lui concède et précise que dès la fin de l’émission, il l’appellera Alassane comme d’habitude. Mais le candidat LMP explique qu’il a ainsi voulu garder le caractère solennel que lui-même avait souhaité donner au débat, qui est une première. N’empêche, selon Ouattara que ce caractère ne doit pas jouer sur la convivialité dans leurs relations. Le faire savoir, le montrer est selon lui, un acte de sincérité et de vérité, pouvant rassurer les Ivoiriens. A 25 minutes de la fin du débat, une panne d’électricité interrompt l’ambiance à l’intelligent. L’électricité revient mais le débat est presque finit. Les duettistes sont un peu fatigués. Ouattara semble accuser un peu plus le coup de la durée du débât de même que Laurent Gbagbo qui le reconnaît

Charles Kouassi

L’Intelligent d’Abidjan

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