CONCLUSIONS PRELIMINAIRES DE LA MISSION D’OBSERVATION ELECTORALE DE LA CSCI (Société Civile ivoirienne)

CONCLUSIONS PRELIMINAIRES DE LA MISSION D’OBSERVATION ELECTORALE DE LA CSCI RELATIVE AU SECOND TOUR DU SCRUTIN PRESIDENTIEL DU 28 NOVEMBRE 2010 EN CÔTE D’IVOIRE

I.BREVE PRESENTATION DE LA MISSION D’OBSERVATION ELECTORALE (MOE) DE LA CONVENTION DE LA SOCIETE CIVILE IVOIRIENNE (CSCI)

La Convention de la Société Civile Ivoirienne (CSCI) est la plus grande faîtière de la société civile nationale, composée de plus de 134 structures issues des confessions religieuses, des organisations professionnelles, des centrales syndicales et des Organisations Non Gouvernementales (ONG). Dans son effort de renforcer l’intégrité et la transparence du processus électoral, condition d’une sortie définitive de crise et d’une paix durable, la CSCI conduit depuis septembre 2008, une Mission d’Observation Electorale, financée par l’Union Européenne. Cette mission comprend 20 coordonnateurs régionaux, 255 observateurs de long terme et 725 observateurs de court terme. Soit un effectif de 1000 observateurs. En plus des 1000 observateurs de la CSCI, financés par l’Union Européenne, la CSCI a bénéficié, pour le 2ème tour du scrutin du 28 novembre 2010, d’un appui de 100 observateurs de court terme, pris en Charge par le RAPROJECI( ), un réseau d’organisation, membre de la CSCI. Ainsi, la CSCI a déployé 1000 observateurs au 1er tour du scrutin du 31 octobre 2010 et 1100 observateurs au second tour du scrutin du 28 novembre 2010.
La MOE de la CSCI est dirigée par Jean BOSSON, Chef de la mission, sous l’autorité de Dr. Patrick N’GOUAN, Coordonnateur National de la CSCI.

La MOE de la CSCI, depuis plus de deux ans, a produit plusieurs communiqués et déclarations ainsi que des rapports thématiques dont les principaux sont les suivants :

– Rapport analytique sur le cadre juridique des élections en Côte d’Ivoire, le 30 Juillet 2009 ;
– Rapport sur l’environnement, les activités et le comportement des médias en période préélectorale, le 1er décembre 2009.
– Rapport analytique sur l’administration électorale, le 16 Février 2010 ;
– Rapport préliminaire sur l’enrôlement des électeurs, l’affichage et la gestion administrative et judiciaire du contentieux de la liste électorale provisoire, le 27 avril 2010 ;
– Présentation des conclusions préliminaires de l’observation de la distribution des cartes d’électeurs et de la campagne électorale, le 28 octobre 2010.

Par ailleurs, deux autres rapports sont en édition :
– Le 2ème tome du rapport sur les médias en période électorale ;
– Le rapport sur le monitoring des radios de proximité.
La valeur ajoutée de la CSCI dans l’observation de cette élection repose précisément sur l’expérience accumulée à travers l’appui technique dont elle a bénéficié de l’Institut Electoral de l’Afrique Austral (EISA), de la qualité de ses rapports et déclarations sur les différentes étapes du processus électoral.
En effet, la CSCI est la seule organisation de la société civile ivoirienne à conduire une mission d’observation de long terme en Côte d’Ivoire depuis plus de deux ans pour le développement des bonnes pratiques en matière d’observation et d’organisation des élections.

II.LA METHODOLOGIE D’OBSERVATION DU SECOND TOUR DU SCRUTIN PRESIDENTIEL DU 28 NOVEMBRE 2010

Pour le second tour du scrutin présidentiel du 28 novembre 2010, la MOE de la CSCI a déployé 1100 observateurs sur toute l’étendue du territoire national , dont 1000 observateurs financés par l’Union Européenne, et 100 observateurs pris en charge par le RAPROJECI (Réseau d’appui…).

Ces observateurs étaient repartis comme suit :

– 319 dans le District d’Abidjan ;
– 42 dans la région de l’Agnéby (Agboville) ;
– 16 dans la région du Bafing (Touba) ;
– 14 dans la région du Denguelé (Odienné) ;
– 74 dans la région des Savanes (Korhogo) ;
– 47 dans la région des 18 Montagnes (Man) ;
– 43 dans la région du Haut-Sassadra (Daloa) ;
– 18 dans la région de la Marahoué (Bouaflé) ;
– 25 dans la région du Moyen-Comoé (Abengourou) ;
– 115 dans la région de la Vallée du Bandaman (Bouaké) ;
– 18 dans la région du Worodougou (Séguela) ;
– 42 dans la région du Zanzan (Bondoukou) ;
– 62 dans la région des Lagunes (Dabou, Alépé, Bingerville, Songon…) ;
– 41 dans la région du Sud-Bandaman (Divo) ;
– 31dans la région du Sud-Comoé (Aboisso)
– 33 dans la région du Bas-Sassandra (San Pedro) ;
– 38 dans la région du Fromager ;
– 34 dans la région du Moyen-Cavally ;
– 37 dans la région des Lacs ;
– 36 dans la région du N’Zi-Comoé (Dimbokro).

Les données recueillies sur le terrain ont été obtenues à partir de trois types de formulaires :

• un sur l’ouverture et le déroulement du vote ;
• un sur la clôture des bureaux de vote et le dépouillement ;
• et un sur la compilation des résultats.
Les 1100 observateurs déployés ont visité chacun, en moyenne 7 bureaux de vote, représentant 7700 bureaux de vote sur les 19 854 Bureaux de vote, soit 38%. En effet, chaque observateur a visité au moins 2 lieux ou 2 centres de vote. Dans chaque centre ou lieu de vote, l’observateur de la CSCI axe son observation sur un bureau de vote et visite tous les autres bureaux du centre.
Au total, le jour du scrutin du 28 novembre 2010, les observateurs de la MOE de la CSCI ont visité 38% des bureaux de vote et renseignés des formulaires d’observation dans 2200 bureaux de vote sur toute l’étendue du territoire ivoirien, soit 11% des bureaux de vote du pays.
Par ailleurs, avant la réception des formulaires physiques, la MOE de la CSCI a procédé par des appels téléphoniques, fax, SMS et E-mail pour le recueil des données de terrain.

III.LE DEROULEMENT DE LA CAMPAGNE ELECTORALE DU SECOND TOUR DU SCRUTIN PRESIDENTIEL DU 28 NOVEMBRE 2010

La campagne électorale du second tour de l’élection présidentielle a été officiellement ouverte le vendredi 19 novembre 2010 à minuit pour s’achever le vendredi 26 novembre à 00H00 du matin.
Un formulaire d’observation de la campagne électorale a été remis aux 20 coordonnateurs régionaux et aux 255 observateurs électoraux de long terme de la MOE de la CSCI pour suivre cette étape importante du processus électoral.
Sur la base des données recueillies par nos observateurs sur le terrain, nous pouvons dire que la campagne a été émaillée de violences localisées :

– escalades verbales entre les deux candidats et/ou entre leurs partisans durant toute la période de la campagne électorale. L’attitude de courtoisie observée par les deux candidats lors de l’émission (face à face) n’est qu’une exception qui confirme la règle générale de la montée de tension entre les deux camps ;
– affrontements violents entre partisans des candidats de LMP et du RHDP dans des régions du pays (notamment 18 montagnes (Man et Biankouman), Fromager (Bayota, Bleanada dans la sous-préfecture de Tonla), District d’Abidjan (Abobo, Yopougon, Koumassi, Cocody…), Savanes (Ferkessedougou)).
– Projection de films relatant des atrocités de la guerre et de la mort de feu Général GUEI Robert par les deux camps, accentuant les ressentiments et fragilisant la cohésion sociale (18 Montagnes, Zanzan, Bas-sassandra, District d’Abidjan …)
Toutefois, la campagne électorale a enregistré comme note positive, des débats télévisés entre les représentants des deux camps, signe de débats démocratiques. Bien plus, le « face à face » entre les candidats, s’est déroulé dans une ambiance de courtoisie.

IV. RESULTATS PRELIMINAIRES DU SECOND TOUR DU SCRUTIN PRESIDENTIEL EN COTE D’IVOIRE

Le dimanche 28 novembre 2010, s’est tenu le second tour de l’élection présidentielle en Côte d’Ivoire.
Ce second tour a opposé M. Laurent Gbagbo et Alassane Ouattara, arrivés en tête du premier tour du scrutin du 31 octobre 2010.
La MOE de la CSCI réitère ses félicitations à la CEI, au Gouvernement, au Représentant Spécial du Secrétaire Général des Nations Unies, à la Primature, aux acteurs techniques, à la société civile et à la communauté internationale pour la tenue effective de ce scrutin.
Contrairement au premier tour du scrutin qui s’est déroulé globalement dans le calme et dans un esprit de civisme, la MOE de la CSCI note que le second tour a été émaillé de quelques incidents localisés.

Les résultats de l’observation du second tour du scrutin portent sur cinq (5) points :
– l’accès aux centres et aux bureaux de vote ;
– l’ouverture des bureaux de vote ;
– l’environnement et déroulement du vote ;
– le dépouillement et la transmission des résultats ;
– la collecte du matériel électoral.

1. L’accès aux centres et aux bureaux de vote

De façon générale, les observateurs de la CSCI ont eu accès à l’ensemble des centres et bureaux de vote ; car une note-circulaire de la CEI du 25 novembre 2010 a facilité «l’observation et le suivi de l’ensemble des opérations» de vote par les observateurs.
Toutefois, certains observateurs de la CSCI pourtant munis de leur mandant et de la note-circulaire de la CEI ont rencontré quelques résistances de la part de certains présidents de bureaux de vote :Lycée William Ponty de Yopougon, EPP Kouetinfla dans la région de la Marahoué…

2. L’ouverture des bureaux de vote

Conformément au code électoral modifié, l’ouverture des bureaux de vote est fixée à 7H00 du matin.
En général, les bureaux de vote ont ouvert entre 7H00 et 8H00 le dimanche 28 novembre 2010. Certains bureaux ont même ouvert au-delà de 8 heures en raison de :
– absence de certains agents électoraux dans les bureaux de vote (INSAAC-Cocody, Centre Foyer de Touba…) ;
– arrivée tardive et insuffisance du matériel électoral dans les centres et bureaux de vote (EPP 2 Blokhauss, Lycée moderne de Tabou, EPP Gbon 1 et 3 à Korhogo, EPP Zimbabwé de Sans-Pedro, EPP Badikaha à Niakaramandougou…) ;

3. le déroulement du vote

Les opérations de vote se sont effectivement déroulées sur toute l’étendue du territoire national. Le déroulement peut être apprécié par rapport à la sécurité, à l’affluence des électeurs et à l’environnement interne et externe au niveau des bureaux de vote.
De la sécurité
La sécurité des lieux de vote et des électeurs était assurée par le Centre de Commandement Intégré(CCI), les Forces Armées des Forces nouvelles(FAFN) les Forces de Défense et de Sécurité ivoiriennes(FDS).
A certains endroits, la MOE de la CSCI a noté l’absence ou le retard de forces de sécurité officielle (EPP Siporex7 à Yopougon, EPP Goulia et EPP Kaniasso dans le Denguélé, INSAAC de Cocody, Dianra, Massala dans le Worodougon…).
Malgré le dispositif sécuritaire mis en place par les autorités compétentes, des violences localisées ont émaillé le déroulement du scrutin du 28 novembre 2010 :

– fusillade à Dignago, dans la région du fromager (un mort), à Niboua, dans la région du Haut Sassandra (deux éléments des forces de l’ordre et de nombreux blessés) ;
– Bastonnade et destruction de biens ( à Korhogo, dans la région des Savanes , à Daoukro, dans la région du N’zi Comoé, à NIDROU, dans la région des 18 montagnes, à San-pédro, dans la région du Bas-Sassandra…
– Affrontements violents à Kononfla dans la région de la Marahoué (deux morts)…
Destruction de PV et enlèvement d’urnes :
– Dans les 18 montagnes à Man dans la localité de Voungoué (destructions des urnes et PV des 3 bureaux de vote par des hommes armés et en treillis) ;
– Dans la région du bas-Sassandra, à Garage belek, dans la sous-préfecture d’Okrouyo (destruction de PV et d’urnes) et vol d’urnes à Waté;
– Dans la région du fromager, à Gabia dans le Département d’Oumé (Urnes bloquées par la population.
– Dans la région de la Marhaoué à Blama et Garango des campements baoulé et allogènes des hommes armés ont emporté les urnes.
Des empêchements de vote et de représentants de candidats dans les BV :
– Dans la région du Sud Bandama à l’EPP Fresco 3 ;
– Dans la région du Haut Sassandra à ISSIA, précisément dans les localités de Cailloukro et de Kouadiokouakoukro ;
– Dans les campements baoulés de Léonkro, d’Aklomianbla, de koffikoussikro et de Bandamakro, dans la sous-préfecture d’Issia. Il faut toutefois noter que les résultats des BV de ces localités ont été annulés.
De la transmission des résultats
La transmission des résultats pour ce 2ème tour a connu des améliorations comparativement au 1er tour. En, effet, le problème logistique a été résolu. Toutefois, il faut signaler que certains convois de transmission des résultats n’étaient pas sécurisés. Même ceux qui étaient sécurisés ont été parfois attaqués notamment à Gabia dans la sous-préfecture d’Oumé et à Okrouyo, dans le Bas-sassandra.

Au délai de ces faits, nos observateurs ont constatés à l’intérieur des BV des stickers de mauvaise qualité, des bulletins tachetés, des isoloirs dont l’emplacement viole le secret du scrutin, insuffisance de bulletin de vote, des urnes non scellés ou partiellement scellées, vole de stickers à la suite d’échauffourées.

V.
CONCLUSIONS PRELIMINAIRES ET RECOMMANDATIONS

1. Conclusions préliminaires

Sur la base des différents rapports de ses 1100 observateurs électoraux déployés sur toute l’étendue du territoire national le jour du 2ème tour du scrutin du 28 novembre 2010, la MOE de la CSCI a relevé des irrégularités et des violences localisées ont été constatées au nord et à l’ouest du pays.
Pour une saine appréciation de ces faits observés, la MOE de la CSCI voudrait bien confronter ses données d’observations avec les PV de la CEI.
Contrairement à la très forte mobilisation du premier tour (83,7%), la MOE de la CSCI estime le taux de participation du 2ème tour du scrutin à plus de 70%.
Elle note également une forte mobilisation des observateurs nationaux et internationaux.
La MOE de la CSCI reste attentive à l’annonce des résultats et la gestion d’un éventuel contentieux électoral.
2. Recommandations
La Mission d’observation électorale de la Convention de la Société Civile Ivoirienne fait les recommandations suivantes :
A la CEI:
– D’accélérer la publication des résultats provisoires afin de dissiper toute suspicion ;
Aux CCI et forces impartiales :
– la CSCI encourage les forces impartiales, le Centre de Commandement Intégré, les forces de défense et de sécurité et les Forces Armées de Forces Nouvelles pour tous les efforts consentis pour la sécurisation du processus.
– Aux candidats :
– la CSCI encourage les candidats à continuer d’observer l’esprit de fairplay qui a prévalu jusqu’à maintenant ;
– la CSCI demande de respecter le code de bonne de conduite des candidats et aux partis politiques d’appeler leurs militants et sympathisants au calme après la proclamation des résultats provisoires et définitifs.
– De suivre les voies légales de réclamation.

A la population

– de ne pas se fier aux rumeurs afin de ne pas être induite en erreur. Elle devra se fier uniquement aux informations officielles communiquées par la CEI afin de préserver le climat de paix. ;
– la CSCI félicite le peuple de Côte d’Ivoire pour sa forte mobilisation et son esprit de civisme ayant prévalu à l’occasion du vote du 31 octobre 2010. Ainsi, durant cette phase cruciale de la proclamation des résultats du 2ème tour elle lui demande d’observer les mêmes attitudes.

A la Communauté internationale :

La CSCI adresse à la communauté internationale ses remerciements et lui demande de continuer à soutenir la Côte d’Ivoire pour une période postélectorale pacifique.

Fait à Abidjan, le 30 novembre 2010
Pour la CSCI
Le Chef de Projet

Jean BOSSON

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