WikiLeaks sur le « cas » Charles Blé Goudé en Côte d’Ivoire

Abidjan, envoyé spécial – Depuis 2002, Charles Blé Goudé, surnommé « ministre de la rue » de Laurent Gbagbo, a mené ses groupes de « patriotes » dans des démonstrations de rue pour assurer la protection du régime. Lundi 6 décembre, il est devenu ministre dans le gouvernement mis sur pied en toute hâte dans la situation d’exception où se trouve la Côte d’Ivoire, avec Laurent Gbagbo continuant d’affirmer qu’il a gagné l’élection présidentielle du 28 novembre, et le reste du monde, à commencer par l’Afrique soutenant la légitimité d’Alassane Ouattara. Avant l’élection, les diplomates américains s’étaient intéressé au cas de Charles Blé Goudé. Dans un télégramme de juin 2008, il est précisé que ce dernier « a adopté un profil bas depuis qu’il a été frappé par des sanctions ». Ces sanctions ont été mises en place le 7 février 2006, « pour des déclarations répétées appelant à la violence contre des installations des Nations unies, des personnels des Nations unies et des étrangers, mais aussi pour avoir organisé et participé à des actes de violences commis par des milices de rue, incluant des passages à tabac, des viols et des exécutions extrajudiciaires », résume le télégramme américain obtenu par WikiLeaks et révélé par Le Monde.

« Depuis quelques temps, remarquent les diplomates, Charles Blé Goudé s’efforce de « transformer son image de chef de milice en celle d’homme d’Etat ». Mais, comme l’assurent des sources diplomatiques françaises à leurs homologues américains, « Blé Goudé est devenu un homme d’affaires très prospère, avec des intérêts conséquents dans des hôtels, boîtes de nuit, restaurants, stations service et dans l’immobilier en Côte d’Ivoire ».

MOINS D’INFLUENCE SUR LES JEUNES

Le télégramme poursuit : « Blé Goudé demande un paiement pour toutes les activités qu’il entreprend au nom de la présidence et du parti au pouvoir, le FPI. » Le leader du Cojep (Congrès des jeunes et des patriotes), évaluent les diplomates américains, « semble ne plus avoir l’autorité [sur les masses de jeunes] qui était la sienne il y a quelques années, mais il peut toujours mobilier ses fidèles. Il exerce aussi toujours une influence sur la Fesci [Fédération estudiantine et scolaire de Côte d’Ivoire, proche de la présidence ivoirienne et dont Blé Goudé est l’ancien responsable] ».

Entre Charles Blé Goudé et le président Gbagbo, la proximité semble évidente aux auteurs du télégramme. « Le président Gbagbo a fait des demandes répétées aux Nations unies pour qu’ils lèvent les sanctions contre Blé Goudé », notent les diplomates américains, qui remarquent à quel point il est « gênant » de voir que le leader des patriotes semble être « préparé [par la présidence] pour de futures responsabilités au sein du parti et-ou dans le gouvernement au lieu que soient prises des distances avec une personne faisant l’objet de sanction des Nations unies et qui demeure une personnalité source de divisions dans son pays. »

L’ambassade des Etats-Unis se dit également « convaincue » que le pouvoir ivoirien « finance la totalité des activités de Blé Goudé, ce qui soulève des questions au sujet de la sincérité de l’engagement de Gbagbo en faveur de l’accord de paix de Ouagadougou ».

Jean-Philippe Rémy
LeMonde.fr

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