Côte d’Ivoire, le temps de donner l’assaut

C’est cas d’école qu’on enseignera sûrement dans les académies militaires en espérant qu’il ne se répétera jamais.
Imaginez un braquage raté, des braqueurs cernés à l’intérieur de la banque centrale américaine avec leur butin, des centaines d’employés et le secrétaire d’état aux finances transformés en otages. Imaginez-les otages disséminés à travers la banque un grand nombre parqué dans la salle des coffres truffée d’explosifs sous la menace des armes de leurs geôliers.
Les preneurs d’otage exigent qu’on les laisse partir avec toutes les réserves de devises et d’or faute de quoi ils abattront les otages toutes les heures jusqu’à leur départ. Que faut-il faire lorsqu’ils commencent à exécuter les otages par dizaines pour montrer leur détermination.

La réponse n’est pas évidente. Les laisser partir avec les réserves fédérales au risque d’affaiblir le dollar, saper la crédibilité des USA et ruiner la nation. Négocier en sachant qu’ils continueront de tuer des otages. Donner un assaut qui même en cas de succès serait très mortel.

La fin tragique des prises d’otage de Beslan ou de Bombay montre la difficulté à résoudre les prises d’otage de masse.
Voici pourtant une version miniature de l’équation que doit résoudre la communauté internationale en Côte-d’Ivoire. Un hold-up électoral manqué qui se transforme en prise d’otage de dizaines de millions d’ivoiriens. Des preneurs d’otages surarmés retranchés au cœur du dispositif, enfermés à Abidjan avec des dizaines de milliers d’occidentaux, des millions d’ivoiriens et d’africains le canon sur la tempe. Les heures qui passent allongent le décompte macabre des otages « de second rang » exécutés pour mettre la pression sur les négociateurs.

La prise d’otages n’a de sens que si celui sur qui on veut faire pression est soucieux de protéger les victimes innocentes. Gbagbo et son gang le savent bien et en usent. Ce qui se passe là est un plan à double détente. Un rapt mûrement réfléchi, savamment préparé et exécuté avec cynisme pour faire accepter par le chantage un braquage électoral raté.
Comme nous l’ont enseigné Beslan et Bombay, la négociation ne peut et ne doit servir à rien d’autre qu’à évaluer les dispositifs avant de préparer et exécuter l’assaut.

Accepter leurs conditions serait ruiner à jamais l’avenir de la Côte-d’Ivoire et de la sous-région, cautionner un fait politique malsain qui va inexorablement se propager à l’ensemble de l’Afrique. Continuer de négocier, attendre la mise sur pied d’une hypothétique force Ouest-africaine, c’est porter la responsabilité de morts inutiles.

Le temps de donner l’assaut est arrivé. Nul n’ignore que le prix à payer sera élevé. Les ivoiriens otages malheureux de ces crapules le savent et y sont désormais résignés. Il s’agit de sauver l’avenir d’une nation prospère et bien au delà.
Les militairesde l’ONUCI fort de leur action au Liberia ont les moyens de faire face. C’est surtout à la France fer de lance du dispositif militaire international d’assumer le rôle difficile et ingrat, de mettre fin au rapt de Gbagbo. Ses hommes y sont préparés. Leur expérience permettra de faire face à un théâtre d’opération bien plus vaste que celui testé pour l’exercice militaire de « papangue 2010 » à la Réunion. La France sera critiquée dans tous les cas de figure.
Mais ne vaut-il pas mieux l’être pour un assaut meurtrier mais réussi que pour avoir laissé mourir de milliers d’innocents les armes aux pieds. Qu’elle sache qu’elle porte avec elle l’espoir de la communauté internationale unanime pour une fois, et surtout de millions d’ivoiriens qui veulent tourner définitivement le dos à une décennie de cauchemar.

SOUMAHORO Sahi
Journaliste diplômé de la 78ième promotion de l’ESJ
EX SG de la FESCI du campus de Cocody (1999-2000)
Ex porte-parole du collectif des SG de la FESCI

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