Gbagbo répète qu’il ne cédera pas

par Tim Cocks et Stéphanie Nebehay

ABIDJAN/GENEVE (Reuters) – Le président sortant Laurent Gbagbo a accusé vendredi les grandes puissances de se livrer à « une tentative de coup d’Etat » en Côte d’Ivoire en soutenant son rival Alassane Ouattara, répétant qu’il n’était pas question pour lui de « céder ».

« Il s’agit d’une tentative de coup d’Etat, menée sous la bannière de la communauté internationale », a déclaré le président sortant lors de ses voeux à la nation diffusés à la Radio-Télévision ivoirienne (RTI).

« Je suis là où les Ivoiriens m’ont placé par leur vote. Nous ne voulons pas céder »‘, a-t-il martelé.

Ces propos ont été tenus peu après une mise en garde d’un haut responsable de l’Onu à Laurent Gbagbo et à ses partisans, prévenus qu’ils risquaient d’avoir à rendre compte devant la justice de toute atteinte aux droits de l’homme.

La Haute-Commissaire des Nations unies pour les réfugiés, Navi Pillay, a écrit à Laurent Gbagbo et à d’autres responsables ivoiriens pour les prévenir qu’ils seraient tenus pour responsables de toute atrocité .

« Les chefs d’Etat et autres acteurs ne sont plus assurés de pouvoir impunément commettre des violations atroces des droits de l’homme » depuis que la communauté internationale s’est dotée avec la Cour pénale internationale (CPI) d’un « instrument pour qu’ils rendent des comptes », a-t-elle dit, faisant état de la découverte d’au moins deux charniers .

« À MAINS NUES »

La veille, le siège new-yorkais des Nations unies avait diffusé un communiqué faisant état de la vive inquiétude de conseillers du secrétaire général Ban Ki-moon quant aux risques de violence ethnique en Côte d’Ivoire, où Gbagbo refuse de céder la place à Alassane Ouattara, jugé vainqueur du second tour de l’élection présidentielle du 28 novembre.

« Même si, tout de suite, je dis: ‘je quitte le pouvoir’, qui donne la garantie que ça, ça va amener la paix et ça ne va pas amener des violences plus grandes que celles qu’on redoute ? », a déclaré à la chaîne télévision Euronews le président sortant.

Ouattara, qui est reconnu par la communauté internationale, est retranché depuis le 28 novembre à l’hôtel du Golf d’Abidjan, sous la protection des casques bleus de l’Opération des Nations unies en Côte d’Ivoire (Onuci).

Charles Blé Goudé, chef des Jeunes Patriotes proches de Laurent Gbagbo, a menacé de lancer samedi ses troupes « à mains nues » à l’assaut de l’hôtel mais Ban Ki-moon a prévenu que cela pourrait provoquer une « violence généralisée ». Il a rappelé que l’Onuci avait mandat pour « faire usage de tous les moyens nécessaires » pour protéger ses troupes et les occupants de l’hôtel.

S’adressant à la presse à l’hôtel du Golf, le Premier ministre d’Ouattara, Guillaume Soro, a invité la communauté internationale à agir vite pour renverser Laurent Gbagbo. La Côte d’Ivoire est déjà en état de guerre civile, a-t-il estimé en avançant le chiffre de 200 personnes tuées par les partisans de Gbagbo depuis le 28 novembre.

La Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest,

qui a menacé Gbagbo de recourir à la « force légitime » s’il ne cédait pas le pouvoir, renvoie lundi à Abidjan les trois émissaires qu’elle lui avait vainement dépêchés mardi dernier.

LONDRES FAVORABLE À UNE INTERVENTION

« Gbagbo ne devrait pas sous-estimer la détermination de la communauté internationale à faire reconnaître la volonté du peuple ivoirien et à assurer un transfert de pouvoir démocratique », a déclaré le chef de la diplomatie britannique, William Hague.

Il a annoncé que Londres appuierait le principe d’une intervention ouest-africaine mais il a conseillé à la CDEAO « d’obtenir l’aval des Nations unies pour cela ». Il a exclu toute intervention directe de troupes britanniques.

La France a une nouvelle fois conseillé vendredi à ses ressortissants de quitter provisoirement la Côte d’Ivoire en raison de la « crise politique aiguë » que traverse le pays « bien que les ressortissants étrangers ne soient pas, jusqu’à présent, directement menacés.

A Genève, les cinq experts du groupe de travail sur les disparitions forcées ou non-volontaires ont fait état dans un communiqué de centaines de personnes arrêtées par les éléments pro-Gbagbo qui seraient détenues au secret et exposées à la torture, sans toutefois citer le nom du président sortant.

« Quand ils sont commis dans certaines circonstances, les enlèvements équivalent à des crimes contre l’humanité. Ceux qui ont commis des actes aussi horribles doivent rendre des comptes », estiment-ils. Quant aux victimes, elles ont droit à la vérité, à la justice et à des réparations, ajoutent-ils.

Avec Ange Aboa à Abidjan; Marc Delteil et Jean-Loup Fiévet pour le service français

Par ANP/Pays-bas

Le président sortant de Côte d’Ivoire, Laurent Gbagbo, « avisera » si des Etats africains mettent à exécution leur menace de recourir à la force pour le chasser du pouvoir mais estime que l’heure est à la négociation. La Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) envisage d’intervenir militairement s’il persiste à refuser de céder sa place malgré la pression internationale et les émissaires de la Cédéao doivent retourner lundi à Abidjan. Prié de dire s’il quitterait le pouvoir en cas d’opération de la Cédéao, Laurent Gbagbo a déclaré dans une interview diffusée vendredi par la chaîne de télévision Euronews : « Je verrai, j’aviserai. Mais ce n’est pas à l’ordre du jour pour le moment. Ce qui est à l’ordre du jour c’est la discussion. Donc, nous discutons ».

Europe1.fr

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