La manipulation, support de la crise ivoirienne

CONTRIBUTION POUR UNE SORTIE DE CRISE

Je pense qu’il est grand temps d’arrêter de spéculer sur une situation que plus personne ne maîtrise du fait d’informations volontairement faussées, pour dès à présent, limiter les dégâts et chercher à réparer les torts causés. A cet effet, il est indispensable que chaque citoyen reprenne en main les rênes de sa propre existence, trop longtemps laissées aux mains des politiciens. Des allégations diffusées ça et là à des fins électoralistes ont, à force de résonance, fini par annihiler la conscience d’un très grand nombre de citoyens qui, dans l’incapacité d’apprécier sainement la situation, adoptent des comportements qui nuisent à l’intérêt national. Et c’est là que se joue tout le drame ivoirien car, croyant s’offrir en holocauste pour la sauvegarde de la République, ils s’érigent en fossoyeurs de leur Patrie.

Air du temps en Côte d’Ivoire, la manipulation a tant saturé l’environnement politique qu’elle a rendu complexe la notion même de démocratie, d’autant plus que les choix du peuple lui sont imposés à son insu. Ainsi, on opte pour l’un parce que « lui, il se bat pour la dignité de la Côte d’Ivoire», « il est victime d’un complot international », «on ne l’a pas laissé gouverner », « c’est le Conseil Constitutionnel qui l’a désigné, il faut respecter les Institutions », « c’est lui que Dieu a choisi » et diverses balivernes ; On récuse l’autre parce que : « C‘est lui qui a apporté la guerre et ses corollaires », « il est burkinabé », «la Côte d’Ivoire était en paix jusqu’à son apparition sur la scène politique», « il n’aime pas les ivoiriens », et autres aberrations.

Tous ces prétextes récurrents servis pour la plupart sur le plateau de l’ignorance et de la misère d’une population majoritairement désabusée ont fait le lit de la déchirure actuelle. Il est grand temps d’éveiller à la vérité, ceux dont les oreilles peuvent encore entendre et les yeux voir. C’est un devoir que doit s’imposer la Société civile. Bien entendu, tout commence par la conscience de ses propres responsabilités dans tous les actes posés par les politiciens : leur aveuglement devant les cruelles réalités que vivent la population, leur surdité aux appels des innocentes victimes, leur mutisme devant les injustices, tout cela mû par une avidité du gain et un narcissisme que cachent mal les prétextes derrière lesquels ils se retranchent. Seule la vérité peut nous conduire à la paix, qui passe par la justice. Il nous faut donc la dire.

Oui, nous ne le savons que trop bien, dire la vérité dans un pays où le mensonge est érigé en mode de gouvernement demande bien du courage. On ne peut s’y risquer sans recevoir une volée de bois vert de la part de ceux dont on n’épouse pas les idées. Il faut se taire si l’on ne veut pas être confiné dans un camp. Or, chaque camp parle « au nom des ivoiriens », et tous croient en avoir la légitimité ; L’un pour la conviction d’avoir remporté leurs suffrages par les urnes, l’autre, parce qu’une institution l’a décidé. Une personnalité religieuse a jugé bon de faire l’analyse de la situation -j’imagine, par souci d’éclairage et elle avait raison-, mais mal lui en a pris : par un ramassis de mots dont la complexité exprime la misère intellectuelle dans laquelle baigne hélas, une bonne partie de notre jeunesse -rien de surprenant-, elle s’est vue proprement insulter car en Côte d’Ivoire l’insolence est permise, quand on appartient à un clan. On comprend mieux que quelques uns des pairs de ce prélat aient préféré s’aligner, allant jusqu’à considérer comme une invitation au manichéisme des appels à demeurer dans la Vérité du Christ, et jouer les morts quand certains se permettent de désigner d’autres comme l’incarnation du mal absolu. De quoi raviver des querelles qu’on croyait tues depuis le moyen-âge !

Manipulation infâme, on a réussi à convaincre que tout est dit et fait dans l’intérêt et par amour du pays ; sauf à préciser que les uns l’aiment à un point tel qu’ils ne la voient qu’à travers leurs humbles personnes -qui a dit patriotisme ?, les autres au point de risquer leurs vies pour lui redonner une Ame. Quelle noblesse ! Au milieu de tout ce monde, la multitude vogue à vue, solidement attachée à des paralogismes ou ballotée par des flots de mensonges et de vérités, dans un jeu d’ombre et de lumière.
Combien de temps encore, en se basant sur ce qui nous est servi, allons-nous frapper d’ostracisme un homme dont la valeur dépasse nos frontières et dont on sait qu’il est capable d’aider à l’émergence de la Côte d’Ivoire ? Est-ce aimer notre chère patrie que de sacrifier ses élites et le peu de crédit qui lui reste au plan international, sur l’autel d’un supposé patriotisme aux accents clairement égoïstes ? Comment définir autrement le satanisme, si ce n’est cette propension à distiller la haine et le mensonge aux fins d’exterminer son semblable ? Est-ce moral que conduire une population sans repères à une totale aliénation intellectuelle ? Peut-on prétendre aimer Dieu et surtout croire en lui avec autant d’immoralité, de cruauté ? Pourrions-nous seulement répondre à toutes ces questions avec une conscience à l’aise ? C’est à chacun de voir.

Des Ivoiriens ont été manipulés et le sont encore. Il est un devoir de les informer sur certaines réalités, pour leur permettre une lecture intelligente des éléments qui leur sont servis. Car Ils sont nombreux, ceux qui s’engagent dans les mouvances des politiciens, sans une pleine conscience des causes ni des conséquences réelles de leurs choix. Il leur manque les loupes qui leur permettront de réaliser, en scrutant le champ d’action ivoirien, que les ‘’idéaux’’ prônés –libéralisme, multipartisme, nationalisme, et divers prismes- auxquels ils ont adhéré de bonne foi, ont contribué à l’avènement d’une société basée sur du virtuel et où, en réalité, la satisfaction des égoïsmes prime sur les besoins de l’Etat et de sa population.

Sinon comment comprendre que, vivant dans une société dite démocratique, c’est-à-dire dont le mode de fonctionnement est fondé sur le libre choix des citoyens, nous en soyons arrivés à cette extrême et déplorable situation pour le moins choquant ? Où allons-nous si l’on applaudit le fait que, une ou deux personnes trouvant leur légitimité dans leurs capacités financières et militaires, s’octroient le droit d’influencer la vie de tout un pays ? Nous aurons beau nous poser toutes sortes d’interrogations, si les réponses ne sont pas judicieuses, toutes les solutions pour une sortie de crise ne seront que vaines !
Il nous est encore possible d’opter pour une société aseptisée, où toutes les potentialités humaines et matérielles serviront à contribuer au développement du pays et à assurer le bien-être de tous. Pour ce faire, Il est impératif que chacun ne cherche pas à s’accrocher à sa vérité, mais recherche plutôt la Vérité et affiche beaucoup de prudence dans l’acceptation sans conteste de ce que les politiciens lui débitent. Le film auquel nous assistons n’est pas un western, c’est un film d’horreur dont il faut souhaiter rapidement la fin. L’heure n’est plus à la désignation d’un candidat, mais à l’acceptation par tous du candidat élu. Donnons à la Nation ivoirienne son plein sens et ne nous faisons pas complice de la pérennisation d’une société désespérante dont on assumera inéluctablement le poids, tôt ou tard.

Il est des moments où l’homme est si perturbé par l’ampleur de ses fautes qu’il ne croit plus en aucune possibilité de réhabilitation. C’est le point de non-retour. Et alors, plutôt que de saisir les opportunités qui lui sont offertes pour s’en sortir, il les rejette pour mieux s’enfoncer dans le mal, dévoré par une sorte de rage contre lui-même qu’il manifeste dans ses comportements vis-à-vis des autres. C’est une caractéristique odieuse de l’orgueil qu’il faut être capable de dominer pour mériter de diriger un groupe, un peuple, une Nation. Il est très difficile de s’en sortir sans aide de véritables amis. Le véritable ami, c’est celui qui, au risque de ses intérêts voire de sa vie, vous aide à sauver votre vie, voire au détriment de vos intérêts qui ne sont que… vanité !
Mesdames et messieurs de la Cour, soyez de vrais amis. Persévérez, même s’il n’ya pas plus sourd que celui qui ne veut pas entendre !

Mme Jordan Kohn
Kjord2010@yahoo.fr

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