En Côte d’Ivoire pourquoi les « monstres » de Ouattara s’entretuent

Frci : les clans de Bouaké et d’Abidjan se déchirent. Bercés par une propagande mensongère qui leur promettait monts et merveilles, les «volontaires» enrôlés pour la «bataille d’Abidjan» sont désormais inutiles. Et traqués à tous les coins de rue. Certains s’organisent pour leur survie. Comment on en est arrivé là ?

Par Le nouveau courrier – Abidjan

Alors que les hommes d’Alassane Ouattara s’adonnent avec plaisir à leur sport préféré, le «Gbagbo-bashing» (dénigrement systématique de Gbagbo), leurs esprits sont surtout préoccupés par la guerre secrète et meurtrière qui déchire les nervis armés qui ont servi de supplétifs à l’exécutif et aux militaires français, qui leur ont «offert» le pouvoir. Il est désormais question, pour le «noyau» constitué des commandants historiques des Forces nouvelles, de se débarrasser de tous les «ralliés» devenus indésirables et qui refusent de disparaître de la circulation sans regimber.
Ainsi à Abidjan Sud, la tension est à couper au couteau. Entre d’une part, « les volontaires » à qui le camp Ouattara a distribué des armes dans le district d’Abidjan en prélude à la «mère des batailles», et les FRCI venus des zones contrôlées par l’exrébellion, emmenés par le commandant Issiaka dit «Wattao». Les seconds sont
impliqués dans une vaste traque sans merci dans les communes de Treichville, Marcory, Koumassi et Port-Bouët, dont l’objectif est d’éliminer les premiers. En effet, les «volontaires» trépignent et se rendent compte qu’ils ont été bercés d’illusions.

La récompense tant attendue ne viendra jamais. Invités à «se chercher», beaucoup d’entre eux ont fui avec leurs armes, et se sont transformés en braqueurs. D’autres ont bien l’intention de vendre leur kalachnikov ou de la garder pour se défendre au cas où on voudrait leur faire la peau après les avoir instrumentalisés.

Des disparitions suspectes

Leurs angoisses sont justifiées. Après la mort d’un chef de guerre de ce qu’on appellera le «clan d’Abidjan», en opposition au «clan de Bouaké», surnommé «Chef Assalé Tout contrôle», lundi dernier, on signale la disparition suspecte du «commandant Froufrou», basé à la salle des fêtes de Koumassi Sicogi. Ce dernier avait, à plusieurs reprises, refusé de répondre à des convocations du commandant Wattao…

A Abobo, les nombreux «commandants» se regardent en chiens de faïence. Chacun gère son «territoire» tout en ayant un oeil sur le «commandant» d’en face. Depuis la semaine dernière, la plupart des jeunes qui avaient pris les armes ont disparu des «radars» Frci, avec des armes pour certains.

Même le quotidien L’Expression, proche du pouvoir Ouattara, s’est alarmé dans son édition du 17 août. Evoquant une «vague de règlement de comptes», le journal s’émeut : «Dans la capitale économique, des éléments de plusieurs unités se sont déclarés la guerre et se font de petits meurtres entres amis comme dans le Far West. A Abidjan Sud où la situation est plus que préoccupante, les différends se règlent désormais avec des RPG7, des DCA et, au mieux, à la kalachnikov. Des volontaires qui ont pris les armes avant l’arrivée des Frci à Abidjan vivent désormais en cavale. Le constat que nous avons fait dans certains commissariats de Koumassi, Marcory et Zone 4 annonce des jours sombres entre frères d’armes. La situation est explosive et peut péter à tout moment dans la mesure où des ‘‘commandants’’ lourdement armés ont pris la poudre d’escampette, ils sont dans la nature».

Le mensonge, la principale cause de désordre

A qui la faute ? Comment en est-on arrivé là ? Fondamentalement, c’est le mensonge, utilisé depuis de nombreuses années comme outil de ralliement par le Rassemblement des républicains (RDR) et ses cadres, qui est en cause. Persuadé que c’est la guerre qui lui apporterait le pouvoir, le camp Ouattara a, en toute irresponsabilité, armé des jeunes civils en leur faisant toutes sortes de promesses mirobolantes. En 2002 à Bouaké, on promettait à chaque combattant la somme de 5 millions de FCFA une fois le pouvoir «cueilli». Bien entendu, cet engagement n’a jamais été tenu. Et ne le sera jamais.

Le même type de chimères a été vendu aux ex-prisonniers et aux travailleurs de rue hâtivement enrôlés à Abidjan avant la bataille d’Abidjan. A celui-ci, on promettait qu’il serait désormais propriétaire de son garage. A celui-là, on faisait miroiter un taxi en son propre nom.

Dans son ingratitude toute politicienne, le nouveau pouvoir n’a pourtant même pas procédé à un recensement digne de ce nom, et à un traitement «sérieux» de la question de la démobilisation. Les «volontaires» ont été «jetés» comme des vieilles chaussettes. Et ils sont désormais traqués, comme ceux de septembre 2002, qui sont morts par centaines après l’opération de nettoyage décrétée par un MPCI qui avait atteint son objectif et se débarrassait de ses éléments soit trop revendicateurs soit trop criminalisés.

Des “non-combattants” insérés dans les FRCI

En plus du caractère expéditif de la vraie fausse démobilisation des «volontaires», chassés des commissariats avec la même irresponsabilité qui les avait poussés à s’y installer, ce qui choque beaucoup est toute l’atmosphère de corruption qui a entouré l’intégration de 2 300 «volontaires» récemment «enrôlés» au sein de la «nouvelle armée». Déjà, on reste perplexe sur la décision. Pourquoi prendre le risque d’en recruter une minorité alimentant rancoeurs et ressentiments.

Pour ne rien arranger, cette opération de recrutement au sein de l’armée «officielle» ne s’est fondée sur aucun critère objectif. Laissant donc les réseaux de corruption en roue libre. Ainsi de nombreux recrutés n’ont jamais tenu la moindre kalachnikov, surtout pas durant la bataille d’Abidjan.

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