Affrontement autochtones – Bozos à Ayamé – Adjoumani après une chaude médiation « Apprenez à aimer Alassane Ouattara »

Photo DR. Adjoumani avec Soro Guillaume Golf Hotel

Le samedi 14 janvier 2012, à la résidence du ministre Aka Aouélé à Maféré dans la région d’Aboisso, c’est dans une ambiance peu habituelle que la délégation d’Ayamé, composée de la chefferie traditionnelle, des cadres, élus et des jeunes de la coopérative ainsi que des autorités administratives et politiques de ladite localité, est venue présenter officiellement ses excuses au gouvernement Ouattara pour «l’irresponsabilité dont ont fait montre les jeunes pêcheurs d’Ayamé le vendredi 13 janvier dernier, lors de la visite du ministre Adjoumani pour apporter les solutions du Chef de l’Etat afin de mettre fin au conflit entre les jeunes pêcheurs Agni et Bozo maliens». Le ministre des Ressources Animales et Halieutiques (Mirah), Adjoumani Kouassi Kobenan, a dit accepter le repentir de toutes les communautés du Dangui (Ayamé et sous- préfectures) au nom de la tradition et surtout de l’alliance interethnique entre les Bron et les Agni. « Au nom de la tradition, je ne peux pas refuser le pardon du peuple d’Ayamé. Au nom de l’alliance entre les Bron et les Agni, ce qui s’est passé est une page tournée », a-t-il confié à ses hôtes. Par ailleurs, l’émissaire du gouvernement Ouattara a invité les parties antagonistes au respect des mesures prises par l’Etat de Côte d’Ivoire qui réglementent l’activité de pêche en Côte d’Ivoire. A savoir, entre autres, l’identification des pêcheurs, la délivrance de permis de pêche (5000FCFA/an), l’immatriculation des embarcations de pêche, la déclaration des captures, la sensibilisation sur le maillage des filets de pêche, l’amélioration de la cohésion par la mise en place de coopératives de pêche. «Je ne peux en aucune manière vous faire du mal. Je ne peux pas venir prendre position pour les populations étrangères au détriment de vous. Si j’étais venu au nom du gouvernement, vous dire de chasser les pêcheurs ‘’Bozo’’, la Côte d’Ivoire allait s’embraser. C’est ce que vous voulez ? Non, chers parents d’Ayamé, je ne peux pas le faire. Si vous avez parmi vous un de vos fils qui vous demande de chasser une communauté, chassez-le parmi vous parce que c’est un mauvais fils. Chers parents, apprenez à aimer Alassane Ouattara, c’est un agent de développement», a-t-il clarifié à la chefferie, aux cadres, élus et à la jeunesse d’Ayamé. Le ministre Adjoumani Kouassi Kobenan a clos son argumentaire en remerciant la délégation d’Ayamé pour cette «attitude responsable». Et à la jeunesse, le ministre des Ressources Animales et Halieutiques a promis ceci : « Je reviendrai à Ayamé très bientôt. Je reviendrai avec du matériel. Ne faites plus de palabre. Soyez sincère, on va vous soutenir. Je vais vous donner l’appui qu’il faut pour que vous soyez compétitifs ». Le porte-parole de la délégation d’Ayamé, Kadja Brou Grégoire, s’est confondu en excuses en rappelant à l’envoyé du gouvernement que c’est « le savoir-être qui a manqué aux jeunes pêcheurs d’Ayamé. « Ayamé est prêt à s’engager dans la dynamique de développement nationale. Nous adhérons donc à vos dispositions », a promis le porte-parole au nom des populations d’Ayamé. Pour célébrer la paix à Ayamé dans l’allégresse, la délégation de ladite localité a offert un mouton au ministre Adjoumani Kobenan qui, à son tour, a offert la somme de cinq cents mille francs à celle-ci.

Patrick Krou, envoyé spécial à Maféré
L’Intelligent d’Abidjan

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Encadré

Adjoumani a vaincu le mythe du «vendredi 13»

Depuis des lustres, le mythe du vendredi 13 hante les esprits des hommes. Superstition ou réalité ? En tout cas, cette superstition populaire, qu’on y croit ou pas, reste aléatoire. Au même titre que passer sous une échelle, croiser un chat noir ou ouvrir un parapluie dans une maison, le mythe du «vendredi 13» a traversé les siècles et survécu aux progrès de la science et de la raison. C’est ainsi que spontanément, Adjoumani Kouassi Kobenan à la tête du Mirah (Ministère des Ressources animales et halieutiques) a décidé d’affronter le mythe du « vendredi 13 ». Accompagné d’une forte délégation, l’émissaire du gouvernement ivoirien effectue le déplacement d’Ayamé pour, semble-t-il, trancher aussi facilement une ‘’crise anodine’’ entre pêcheurs autochtones et étrangers. Après une trentaine de minutes, les jeunes pêcheurs d’Ayamé s’insurgent contre les mesures prises par l’Etat de Côte d’Ivoire de son gabarit, le ministre Adjoumani – réputé pour sa fougue – se lance dans la foule pour interpeller des esprits récalcitrants. De l’audace, il en fallait pour convaincre l’assistance. Hormis le Premier ministre Guillaume Soro, connu pour sa fermeté, qui du gouvernement Ouattara pouvait régler cette situation mieux que le ministre Adjoumani Kobenan ? Devant l’euphorie des jeunes surexcités d’Ayamé, il a su garder le flegme d’un chef Akan, la sérénité d’un chef Malinké et le courage d’un chef Bété. Au nom de la tradition et de l’alliance interethnique, le petit-fils du roi des Bron de Bondoukou a vaincu le mythe du « vendredi 13» en réussissant à obtenir des populations autochtones ainsi qu’étrangères le respect des mesures prises par le gouvernement dans l’application de la politique de promotion de la pêche en Côte d’Ivoire.
P.K

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Propos de ….
Aka Brou Louis Blaise, maire d’Ayamé :
‘’La solution reste l’identification des jeunes pêcheurs’’
«En 1998, quand le problème s’est produit entre les Bozo et les jeunes pêcheurs, la solution que l’administration d’alors avait trouvée était de réglementer la pêche. Le lac a été fermé pendant six mois. Et nous avons profité de ce délai pour créer des coopératives. Selon les textes, le lac ne peut contenir que trois cents pêcheurs. Or, le lac n’appartient pas exclusivement à Ayamé. C’est tout le ‘’Dangui’’, c’est-à-dire la sous-préfecture d’Ayamé, celle de Bianouhan. Il n’y a pas que le seul village d’Ayamé qui est concerné par le lac. Il y a en effet quatorze villages qui sont concernés par le lac Bia. La même réglementation doit s’appliquer à tous les villages. Par rapport à cet effectif de trois cents, nous avons proposé le système de pêche par embarcation. Le ministre Adjoumani a parlé d’immatriculation ; toutes ces mesures ont été prises et les jeunes ne les ont pas respectées. Aujourd’hui, pour moi, la solution qu’il faut, c’est l’identification des jeunes pêcheurs. Le problème à leur niveau est la fixation d’un taux de cotisation de cinq cents francs CFA pour être membre de la coopérative des pêcheurs. En 1998, nous avons raisonné par embarcation. Nous avons dit qu’une embarcation prend trois pêcheurs. C’est ainsi qu’on a résolu le problème. C’est un problème d’organisation interne. Mais, pour pouvoir le faire, il faut un climat de sérénité. Mon objectif en tant que fils de la région, est de faire en sorte que chacun puisse vivre du lac Bia. Anciennement, les jeunes pêcheurs d’Ayamé faisaient la pêche de manière artisanale. Aujourd’hui, nous souhaitons qu’ils travaillent de manière professionnelle. C’est-à-dire des pêcheurs identifiés, intégrés et équipés afin qu’ils soient appuyés par l’Etat. Aux pêcheurs « Bozo», selon les textes, toutes autres communautés peuvent pêcher, mais, je souhaite que le lac profite aux jeunes d’Ayamé. Ce que nous déplorons et qui n’est pas normal concernant les « Bozo », ils arrivent par vagues successives, sponsorisés par des commerçants et planteurs maliens installés dans la région. Sans même qu’on puisse savoir qui est entré dans notre zone. Cela n’est pas normal ! Aussi, méprisent-ils nos règles en vigueur vis-à-vis de nos coutumes et les dispositions de l’Administration ivoirienne. Cela n’est pas normal. Parce que cela participe de la sécurité des populations de la région. En 1998, en tant que maire, j’avais inscrit sur mes fichiers soixante-trois (63) pêcheurs « Bozo ». Quand les populations ont demandé leur départ, nous en avons dénombré deux mille cinq cents pêcheurs « Bozo ». Nous minimisions leur présence alors que c’était une présence massive».

Le ministre Aka Aouélé, président du Conseil général d’Aboisso :
‘’Tout est rentré dans l’ordre’’
«Les conclusions pour un dénouement heureux auxquelles nous sommes parvenus suite aux mauvais comportements des jeunes d’Ayamé le vendredi 13 janvier dernier, je puis dire qu’il y a une garantie au retour au calme. D’abord, ce qui caractérise le plus notre région (Aboisso), c’est le respect des valeurs morales, c’est aussi le respect de la tradition et de la hiérarchie. Ce qui s’est passé à Ayamé est un incident de parcours. S’agissant d’un membre du gouvernement, il n’était pas normal que pour un peuple qui a une forte culture du respect, ne puisse pas rebondir après l’incident du vendredi 13 janvier dernier. Il faut noter par ailleurs que la personnalité qui a été l’objet de cet incident est un allié du Sanwi par rapport à la tradition. Finalement, je crois qu’il y a eu une incompréhension sur la position du gouvernement exprimée ce même vendredi à Ayamé. Tout est rentré dans l’ordre parce que la clarification a été donnée par le ministre Adjoumani en ce qui concerne l’application des textes de la politique du gouvernement en matière de pêche. Et dans ces conditions, je voudrais croire que les fils et filles du Sanwi et particulièrement d’Ayamé ne peuvent pas ne pas agir conformément à la politique du gouvernement en matière de pêche. Nous – élus de la région-sommes présents en tant qu’agents de développement aux côtés du corps préfectoral pour aider à mettre en place les dispositions qui ont été annoncées par le ministre Adjoumani Kobenan. Personnellement, je suis satisfait et je suis convaincu que les choses iront dans le bon sens. On peut commettre des erreurs mais c’est la persistance dans l’erreur qui est diabolique. Mais, je crois que les jeunes d’Ayamé ne vont pas persister dans l’erreur».
Propos recueillis par P.K

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