Côte d’Ivoire Le Subjectivisme – Un poison pour la justice…

LE SUBJECTIVISME EST UN VERITABLE POISON POUR LA JUSTICE…

Tout esprit épris de vérité devra s’incliner devant cette maxime et en reconnaître le bien-fondé : ce qui fonde la magnificence et l’essence de la justice, c’est sans conteste son impartialité et son impersonnalité. Elle n’est faite contre personne, pour personne, mais concerne dans le même temps l’humanité dans son entièreté, sans exclusive ; car visant principiellement l’harmonie, la cohésion au sein du genre humain en réparant les torts subis par les uns et les autres, en veillant au strict respect des droits les plus imprescriptibles de l’individu humain et ; même quelquefois, ceux des animaux. Faillir à cette mission, la vide de toute quiddité. C’est dire qu’elle doit en tout lieu et en toute circonstance s’appliquer dans la stricte légalité rationnelle sans basculer dans le sentimentalisme, les rets de la pitié, mais en épousant parfaitement les canons de l’objectivité, de la truculence, sine qua non, en la matière. Raison pour laquelle, aucun magistrat digne de ce nom, pleinement instruit de ses charges et obligations et ayant une claire conscience de sa mission, ne s’empresse de rendre un jugement sans cet acte fondateur, inaugural qu’est l’investigation, la recherche consistant en un questionnement itératif et scrupuleux des faits qui se sont produits, à compulser l’Histoire qui, seule, cache dans ses entrailles, les rudiments nécessaires, cette sève nourricière incontournable pour un verdict final immaculé, pur, ne souffrant d’aucune amphibologie ni incongruités. Nous avons pu voir, à la faveur de l’affaire ayant opposé Nafissatou Diallo, femme de chambre exerçant dans le prestigieux et luxueux hôtel SOFITEL de Manhattan à l’ex Directeur Général du FMI, Dominique STRAUSS KAHN, à quel point, ce sens de l’objectivité dans l’examen des faits, des pièces à conviction peut être déterminant dans le dénouement d’un procès au paraître simple, mais à la vérité très alambiqué, soumis à une décomposition analytique. L’ayant-été, c’est-à-dire le passé de la plaignante et le faisceau de contradictions, de fabulations débitées lors de son audition ont éminemment concouru à déconstruire une victoire qui, au matin inaugural de l’intrigue, était plus que certaine. L’avocat attitré de Monsieur STRAUSS-KAHN, en l’occurrence Benjamin BRAFFMAN, maniant le scalpel de la critique avec une dextérité rarement vue, a su tirer de réelles dividendes judiciaires des inconséquences et palinodies de la partie accusatrice ; ce qui aura conséquemment engendré la relaxe pure et simple de l’inculpé pour délit non constitué, le doute profitant toujours à l’accusé. Certaines péripéties immanentes à la vie de la plaignante, ressuscitées, ont été d’un éclairage saisissant pour le juge et le procureur qui en sont arrivés à la conclusion heureuse pour le prévenu et malheureuse pour la ‘’victime’’ d’abandonner toutes les charges contre l’ex Directeur Général du FMI. On peut donc en inférer que l’Histoire, lorsqu’elle est sondée avec méthode et minutie est pourvoyeuse de vérité, donc de justice, car ces termes, en notre sens sont indissociables.

Nous voulons ainsi rappeler aux juges de la Cour pénale internationale, chargés du dossier ivoirien, d’accorder une attention particulière à la jeune histoire de ce pays qui n’a malheureusement basculé dans cette violence animalisante qu’avec l’intrusion d’un homme, faux dans tout son être, fabulateur invétéré devant l’Eternel, apôtre de la violence aux commandes d’une formation politique se réclamant d’un national-socialisme d’inspiration hitlérienne. En effet, sous la conduite éclairée du père de la Nation ivoirienne, SEM Félix HOUPHOUËT-BOIGNY, la Côte d’Ivoire était un havre de paix, économiquement prospère, invariablement retenue comme terre d’immigration par les ressortissants de la sous-région. La forte présence des populations étrangères en Côte d’Ivoire est un indice majeur de cette donne qui a été une certitude vécue. Qui plus est, des non ivoiriens ont appartenu aux différents gouvernements formés par le Président HOUPHOUËT-BOIGNY (Dicko Garba ; Amadou Thiam ; …), panafricaniste convaincu, ardent partisan de l’intégration sous-régionale. Cette atmosphère heureuse d’acceptation mutuelle, d’entente, de convivialité, de tolérance se délitera progressivement et pernicieusement à partir de l’an 1990 avec l’avènement du multipartisme et l’apparition sur la scène politique d’un genre nouveau de politiciens pour qui, les invectives, la violence physique et verbale sonne et résonne comme un véritable sésame, chapeauté par le tonitruant et virevoltant au sens le plus abject du terme, Laurent GBAGBO. A partir de ce moment, la Côte d’Ivoire basculera dans une série de violences, une avalanche d’évènements malheureux et ne connaîtra véritablement pas de moment d’accalmie sous le feu ardent des propos haineux, atrabilaires véhiculés tous azimuts par Laurent GBAGBO et les ectoplasmes à sa solde. Les meetings inauguraux de ce politicien cabalistique tenus à Agboville, à Dabou et même à Abidjan en disaient long sur sa nature réelle et ses intentions. Rien qu’une foire d’injures, de discours excrémentiels : « Ceux que vous adulez tant étaient nos derniers à l’école » ; « Ces tocards, cette bande de vauriens qui pillent les ressources du pays » ; « Houphouët n’est qu’un vulgaire voleur.. ». A cette violence verbale, s’ajouteront très rapidement des actes inqualifiables de violences physiques tirant leur substance de l’idéologie infecte défendue par ces politicards qu’ils instillaient à dose homéopathique, avec une réelle volupté, dans le mental du citoyen ivoirien qui s’affichait de plus en plus, le temps aidant, comme un loup pour son semblable biologique. Rappelez-vous du boycott actif en 1995 ; de la manipulation des étudiants à l’effet de les instrumentaliser contre le pouvoir en place qui l’amènera à décréter l’année blanche en 1990 suite à une séries de violences perpétrées dans les lycées et collèges du pays, les écoles primaires ainsi qu’à l’université (année scolaire et universitaire sauvée quelques mois plus tard grâce au génie politique du Président Houphouët-Boigny), la large diffusion via ses satellites à travers le pays de slogans confligènes sapant les rapports d’antan harmonieux entre les groupes ethniques et mettant ainsi à mal les bases de l’unité nationale, l’utilisation à des fins politiques de la mort de Kragbé Gnagbé, celle d’Ernest Boka, de Dignan Bailly, du massacre des Guébié qui a contribué à raviver les tensions entre les populations. Nous ne saurons occulter la triste et honteuse parenthèse de l’ivoirité par souci d’objectivité scientifique. Mais nous considérons que c’est un concept qui a été dévoyé de son contexte culturel comme vecteur de l’identité culturelle ivoirienne pour assouvir des fins bassement politiciennes et ne visait nullement, in statu nascendi, à catégoriser les ivoiriens en êtres supérieurs et inférieurs.

L’expérience démontrera un peu plus tard que les penseurs, les concepteurs de cette dérive clanique, ethniciste étaient en réalité des partisans de l’idéologie frontiste voilés sous des masques. Suivez notre regard ! Puis arriva le coup d’Etat de 1999 qui porta au pouvoir une junte militaire dirigée par le Général Robert GUEI ; putsch que Laurent GBAGBO, dans l’intention de faire diversion, a vite fait d’attribuer au RDR et à son mentor. Mais tous les observateurs avertis savent à qui a profité ce pronunciamiento et des témoignages établissant clairement la collusion entre Laurent GBAGBO et les putschistes existent. D’ailleurs, le RDR, face à la kyrielle de turpitudes du pouvoir militaire téléguidé par de simulacres de conseillers issus du Front populaire ivoirien dont Lida Kouassi Moïse, feu Emile Boga Doudou, a du prendre ses responsabilités en rendant les portefeuilles ministériels qui lui avaient été confiés dans le gouvernement d’union nationale qui avait été formé à l’occasion. La suite, on la connaît : organisation d’une parodie d’élection d’où ont été exclus les candidats significatifs dont le Président du PDCI Henri Konan Bédié et le Président du RDR Alassane Dramane Ouattara. La félonie inscrite dans les gènes, Laurent GBAGBO dont les palinodies et retournements spectaculaires sont connus de tous va violer le pacte scellé entre lui et le chef de la junte en se proclamant Président de République de Côte d’Ivoire sur les antennes de RFI, oint du soutien actif du gouvernement Jospin d’alors. Ainsi la tentative de confiscation du pouvoir ourdi par le Général GUEI vola en éclats. Ayant désormais entre ses mains le pouvoir suprême, Laurent GBAGBO affichera au grand jour son immoralité caractéristique en déployant une machine infernale qui broiera tout sur son chemin. Surfant sur la rhétorique du sentiment national et en s’érigeant en chantre d’un ségrégationnisme éhonté diffusé à travers des discours fleuve, Laurent GBAGBO a fini par convaincre les esprits les plus sceptiques et les plus difficiles à contenter qu’il est le vrai père de l’ivoirité dans son versant exclusionniste, discriminatoire. Le charnier de Yopougon composé exclusivement de corps de ressortissants de la partie septentrionale du pays, les pièces d’identité retirées et détruites à tous qui osaient s’aventurer dehors vêtus de boubous (identifiant selon leur curieuse logique de tous les ressortissants du nord), les tueries massives des militants du RDR durant une décennie parce que taxés de rejetons de dioulas ou d’immigrés venus arracher leur pays, eux les vrais ivoiriens, sont des faits irrécusables qui confortent nos affirmations. Etablir un certificat de nationalité, un passeport ou une pièce d’identité pour le nordiste était devenu un véritable sacerdoce, tant les difficultés à surmonter étaient innombrables. Potentiels candidats à l’apatridie, il fallait nécessairement réagir ou se laisser déposséder de sa nationalité. Or, il y a des choses qui ne se négocient pas dans une existence donnée. Parmi elles, figurent en bonne place l’identité, la dignité, la liberté, le droit, la vie… Lorsqu’on en est spolié, on est comme réifié, ravalé à l’état de chose. En niant ces valeurs à une importante frange de la population ivoirienne, Laurent GBAGBO a ouvert ainsi la boîte de pandore et, de cette boîte se sont échappés de nombreux démons. Il était donc impérieux de développer des stratégies assorties d’actions concrètes pour se sortir de cette oppression intenable. Et lorsque le dialogue, les interpellations de toutes sortes viennent à confesser leurs limites et que l’Etat, dont la mission principale est d’assurer la sécurité et le bien-être des populations sous sa régence s’adonnent à jet continu à des exactions de toute nature sur elles, seule la violence qui est loin d’être une fin en soi, s’offre in fine, comme ultime alternative. En effet, il y a des moments dans la vie des peuples où la violence salvatrice ne peut plus être évitée malgré les efforts qu’on fait sur soi pour se contrôler, pour lénifier sa colère. Car il est en ce moment question de choisir entre vivre ou périr. C’est, ce qui s’est passé en Côte d’Ivoire. Ces héros qui, sacrifiant leur vie, ont choisi d’assurer la défense des populations du nord de la Côte d’Ivoire en prenant les armes c’est-à-dire le premier Ministre Guillaume Soro, actuel chef du parlement ivoirien, les commandants Ousmane Chérif, Koné Zakaria, Ouattara Morou, Fofié Kouakou, Ouattara Issiaka, Fofana Losseni, Tuo Fozié… ont quasiment tous croupi dans les geôles infernales de la junte militaire et du régime frontiste pour des raisons infondées liées au patronyme et au faciès et y ont subi des atrocités défiant la raison humaine (Arrachage de dents à la pince sans anesthésie ; brûlures au fer à repasser ; flagellations…). Les actions de ces valeureux soldats dignes d’être magnifiés à travers des chansons de geste et écrits laudateurs s’inscrivent toutes sous la bannière de la légitime défense comme on peut le constater. Si défendre son identité et conquérir sa liberté ont pu conduire à des pertes en vie humaine, cela n’est pas à considérer comme quelque chose de délibéré, de planifié et exécuté avec cynisme. Loin s’en faut. D’ailleurs un recours au parcours professionnel de ces hommes précités, une incursion euristique dans les conditions socioculturelles de leur éducation démontrent avec une clarté cristalline que la violence et ses corollaires leur sont étrangers, qu’ils sont d’essence, magnanimes, doux et tolérants et ne visent, à travers les actes qu’ils posent au quotidien, que le bonheur de l’autre, participant de la même manière d’être qu’eux. Ce n’est aucunement pour nuire au peuple de Côte d’Ivoire que cette rébellion a été organisée mais pour son intérêt supérieur.

Nous espérons donc que la noble décision arrêtée par la CPI d’étendre les enquêtes sur la période allant de 2002 à 2010 ne s’origine pas dans un autre dessein que celui de faire triompher la vérité. Sinon ce serait immoler la justice sur l’autel de nos sentiments personnels. Or, ces sentiments personnels, subjectifs, la justice vraie au sens de respect du droit et de l’équité, n’en a cure ! Ce n’est pas parce que, Laurent GBAGBO, pour son irrespect pour la vie humaine, est en train de répondre de ses monstruosités devant les magistrats de la Cour pénale internationale, que l’on doit, au mépris des canons du droit, se sentir obligé, par souci d’équilibrisme, de procéder à des inculpations infondées dans le camp adverse. Juridiquement, c’est un non-sens. Seuls ceux qui ont véritablement fauté au regard du droit, doivent payer. Il y a par conséquent une nuance étanche à établir entre le libérateur et le bourreau. Le libérateur, s’il commet des actes ‘’répréhensibles’’ dans son élan salvateur, n’en est pas au sens de la pensée pensante, le législateur. A la vérité, il est agi sous la contrainte intenable de l’agir méphistophélique et luciférien du bourreau. Sa responsabilité pénale n’est par ricochet aucunement engagée ici puisque n’ayant pas agi en ayant les coudées franches, c’est-à-dire sous la dictée du verdict absolu de son libre-arbitre. Or, la responsabilité pénale s’adosse à la liberté de l’individu comme capacité à s’autodéterminer. Est-il possible, humainement parlant, de rester sourds, imperméables aux jérémiades, aux cris de détresse de populations massacrées par les balles assassines d’individus désaxés, fous à lier ? Peut-on rester inactif lorsque son vis-à-vis est un chantre de la violence nue, farouchement opposé aux vertus du dialogue ? Si la non-violence telle que définie par Mohandas GANDHI et par Martin Luther KING est une philosophie à promouvoir dans nos actes quotidiens, cela suppose comme postulat de base qu’on soit en rapport effectivement avec des humains et non avec des êtres laissant transparaître une apparence humaine mais logeant sous ce plastique aguichant de véritables bêtes, des monstres. Or, Laurent GBAGBO et ses inconditionnels avaient transformé notre cher pays en une véritable jungle, un état de nature où la survie était conditionnée par la capacité à se défendre, à user de la force comme des bêtes sauvages. Dans une telle atmosphère délétère, sans repères moraux, axiologiques, l’éthique pouvait-t-elle encore avoir un sens, la vie étant au fondement de tout ?

DIARRA CHEICKH OUMAR
Professeur certifié de philosophie
Doctorant en sciences politiques
E-mail : diarra.skououmar262@gmail.com

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