Café-cacao: Qui a intérêt à bloquer le verdict ?

Le Nouveau Réveil

La question, sérieuse, de la « rétention » du verdict tant attendu du procès pénal mené contre les ex-dirigeants des 5 structures (Bcc, Arcc, Fgccc, Fdpcc, Frc) de gestion de la filière café-cacao commence à se poser, tant dans l’opinion publique qu’au niveau des prévenus. Notamment, à cause de la situation d’ « usure » qui enlise le déroulement de ce procès. Des pistes d’explications se présenteraient sous les pas des investigations, car un retour sur la matière donne un brusque éclairage sur l’affaire.

En effet, le 25 avril 2012, à la comparution du magistrat hors hiérarchie, Sandélé Charles, en qualité d’Inspecteur général d’Etat (pour avoir fait un audit sur l’organisation des structures en cause et sur la nature des fonds brassés par elles), la nature juridique de ces structures de gestion avait été abordée. On n’y avait pas bien prêté attention, mais là se trouverait, selon la défense des prévenus, le hic du problème. «Quelle est la nature juridique des 5 structures qui ont géré la filière ?» avait interrogé, à cette audition publique de l’Inspecteur général d’Etat, le procureur Oulaï Ferdinand, représentant le ministère public. Réponse claire et directe de l’Inspecteur général d’Etat: «Ce ne sont pas des sociétés d’Etat. En réalité, l’Etat a voulu doubler les institutions de Bretton Woods.» La réaction de la défense ne s’était pas fait attendre, en déclarant : « Ce procès finit si on détermine la nature juridique des structures mises en cause ». En fait, selon les sources de l’Inspection générale d’Etat, sur les 5 structures susmentionnées qui ont géré la filière café-cacao, seuls l’Arcc et le Fgccc sont des sociétés d’Etat, les 3 autres n’étant que des structures privées. Alors, questions : Pourquoi donc l’Etat se constitue-t-il partie civile et poursuit des structures qui sont déclarées privées ? Etait-il du ressort de l’Etat de poursuivre en Justice les prévenus de ces structures privées ? Entendu, lui aussi, à cette date du 25 avril 2012 à la barre, Zogbo Raphaël, ex-président du Conseil d’administration du Fgccc, déclarait ceci : «Je ne sais pas ce qu’on reproche aux prévenus de la filière. Je n’ai donc rien à dire sur leur situation.» Ici, l’intervention du bâtonnier Adjé Luc (avocat de la défense), faite le même jour, clarifierait les choses : «Quand le président Laurent Gbagbo avait déclaré dans le journal pro-gouvernemental, Fraternité Matin, des 17 et 18 octobre 2007, que « Lorsque moi, Etat, je perçois mon Dus (Ndlr : Droit unique de sortie), le reste n’est plus mon affaire, mais celui des paysans », les fonds des producteurs reviennent-ils réellement à l’Etat ?» avait interrogé le bâtonnier. L’un des principaux prévenus, ex-président du Conseil de gestion d’une des 3 structures privées, que nous avons approché pour se prononcer sur la question, n’a pas caché son agacement. «La base de la comptabilité, c’est la pièce justificative. Je me marre, parce que ce qui se passe au tribunal ne correspond à rien», avait-il fait savoir. Avant de poursuivre, incisif: «Sachez que pour qu’un kilo de cacao sorte de la Côte d’Ivoire, il faut le cachet du directeur général des Douanes, du ministre de l’Economie et des finances et de celui de l’Agriculture (…) La moitié des membres du gouvernement d’aujourd’hui est impliquée dans cette crise du café-cacao. Les ministres sont impliqués et les exportateurs sont protégés.»

SYLVAIN TAKOUE

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