L’ONU échoue à réguler le commerce des armes

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Par Alain Barluet
Le Figaro

Les représentants de 150 pays étaient réunis depuis le 18 mars à l’ONU pour tenter de faire aboutir une initiative sans précédent: un traité international encadrant le commerce des armes classiques, du pistolet aux avions de chasse en passant par les chars et les missiles. Trois pays, l’Iran, la Syrie et la Corée du Nord, ont fait capoter le projet en s’opposant au texte qui nécessitait un consensus pour être adopté. Ban Ki-moon s’est déclaré «profondément déçu de cet échec». Le secrétaire général de l’ONU a appelé les pays membres à «continuer leurs efforts» pour que le texte soit adopté «dès que possible».

« Ce n’est pas un échec, c’est un succès différé »
Jo Adamson, négociatrice britannique.

Tout n’est pas perdu en effet. Pour contourner le blocage, un certain nombre de pays, dont les Européens, s’accordent pour soumettre le texte au vote de l’Assemblée générale où seule une majorité des deux tiers (130 des 193 pays membres) est requise. «Un bon et solide traité a été bloqué (…) mais la plupart des pays veulent une réglementation», a affirmé la négociatrice britannique Jo Adamson. «Ce n’est pas un échec, c’est un succès différé». L’Assemblée générale pourrait se saisir du dossier dès la semaine prochaine. Si le traité est adopté, il devra ensuite être ratifié par les parlements d’au moins 50 pays avant d’entrer en vigueur.

Les tentatives pour réglementer le commerce des armes font figure de longue marche. Les discussions se poursuivent depuis sept ans. Une prédécente session de négociation, en juillet dernier, avait tourné court. L’objectif de ce traité, le premier en la matière, est de fixer des normes pour les transferts internationaux de tous les types d’armes. Les pays signataires devraient alors revoir leurs contrats de livraison d’armes à l’étranger afin de s’assurer notamment que les munitions ne soient pas utilisées en violation des droits de l’homme, et qu’ils ne violent pas les embargos.

Un marché dominé par les États-Unis, suivis par la Russie, la France, l’Allemagne et la Chine.

Les États-Unis ont indiqué qu’ils auraient voté pour le traité malgré les pressions de la National Rifle Association (NRA) estimant qu’il contrevient au droit fondamental des Américains de posséder des armes à feu. En revanche, l’Iran a dénoncé les «failles et les imperfections» du texte, notamment l’absence d’interdiction des ventes d’armes à des groupes commettant des «actes d’agression». Selon le projet, les ventes d’armes aux groupes armés ne seraient pas prohibées, mais soumises à une évaluation «rigoureuse» des risques et des conséquences sur les droits de l’homme. Déjà soumis à un embargo de l’ONU, Téhéran souhaite s’assurer que ses approvisionnements en armes ne seront pas interrompus.

Même préoccupation pour le régime syrien, qui veut continuer à bénéficier des armes fournies par la Russie et l’Iran. Dans le même temps, Damas ainsi que Moscou, dénoncent le souhait exprimé par la France et la Grande-Bretagne de fournir des armes aux rebelles syriens. Le refus de la plupart des pays européens qui s’interrogent sur l’utilisation éventuelle de ces armes par les djihadistes syriens illustre la grande complexité de cette question. Comment s’assurer en effet que des armes vendues ne tombent pas dans les mains de terroristes ou de mouvements criminels?

La Corée du Nord, engagée dans un bras de fer avec Washington, a également dénoncé un traité susceptible, selon elle, d’être «manipulé politiquement par les principaux exportateurs d’armes». Un marché dominé par les États-Unis, à la première place (30 %), suivis par la Russie (26 %), la France et l’Allemagne. La Chine, dont les exportations d’armes connaissent une progression fulgurante (162 % entre 2008 et 2012) se hisse pour la première fois cette année au cinquième rang mondial, éclipsant la Grande-Bretagne.

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