Côte d’Ivoire – le politologue Michel Galy et le piège subtil tendu aux partisans de Gbagbo « amnistie générale »

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L’amnistie générale préconisée par le politologue Michel Galy
Et le piège subtil tendu aux partisans de Gbagbo

Isaac Pierre BANGORET (Écrivain)

Dans le quotidien ivoirien Aujourd’hui , en son numéro 634 paru le lundi 05 mai 2014, Michel Galy, politologue français, professeur de Relations Internationales à l’Ileri (Paris), spécialiste de l’Afrique sub-saharienne tire la dernière fois sur la sonnette d’alarme, dans un article intitulé : «La présidentielle 2015 risque de provoquer la violence politique ». Il écrit : « Qu’on permette à un observateur engagé, après 20 ans de suivi politologique, de tirer une dernière fois sur la sonnette d’alarme, en faveur de la paix, et de préconiser les solutions consensuelles connues de tous. Libération de Laurent Gbagbo par une CPI mise au ban des gouvernants africains mais, relais des puissances occidentales, réconciliation véritable et une conférence nationale (quelle que soit son nom ou sa forme), refonte des listes électorales, amnistie générale, reforme équitable de la CEI (la loi récente prévoit, pour cette commission électorale « indépendante » seulement 3 membres de l’opposition sur 13…) etc… Tout autre solution semble porteuse de terribles drames encore à venir ». Les solutions préconisées par Michel Galy, pour sortir de la crise ivoirienne, sont globalement celles suggérées, depuis le début de la crise, par le FPI, cependant un élément nouveau retient notre attention, il s’agit de l’amnistie générale. Lorsque nous parcourons et analysons l’actualité ivoirienne, nous nous rendons compte que les propositions du politologue français ne font que dévoiler une nouvelle stratégie politique adoptée par l’Élysée, qui ne rejette plus, du revers de la main, l’éventualité d’une amnistie générale. Les propos du président du Parlement ivoirien Guillaume Soro, invité de la rédaction du quotidien Fraternité Matin, publiés le 28/04/2014 par APA, quelques jours avant la parution de l’article du politologue français laissaient déjà présager une telle issue. Il affirma sans ambages: « Si la CPI avait un début de soupçons à mon égard, elle ne m’aurait pas invité à sa tribune aux États-Unis ». Les déclarations relatives à son éventuel transfèrement à la CPI ne sont, selon lui, que « des fantasmes de politiciens qui espèrent (le) voir à la CPI ». Quant à la question relative au transfèrement de Charles Blé Goudé, il répondit avec beaucoup d’assurance : « Laissez les choses se faire ». L’amnistie générale permit au président Gbagbo de créer les conditions favorables à la réconciliation entre les Ivoiriens. Son éventuelle adoption ne sera pas le fruit d’une analyse politique du spécialiste français, mais plutôt l’aboutissement d’une lutte obstinée, menée avec courage par les partisans de Gbagbo, par l’opposition ivoirienne, et par de nombreux africains et citoyens du monde, comme Philippe Rémond (un véritable défenseur de la chose publique ivoirienne assassiné à Yamoussoukro).

Ce combat de longue haleine mené par de nombreux anonymes a fini par attirer l’attention de tous sur la politique coloniale pratiquée par la France dans ses « ex-colonies », sur la violation des droits de l’homme dont sont victimes tous les Africains des pays francophones qui luttent pour défendre les intérêts de leurs peuples. Incapable de faire condamner le président Gbagbo, la France est obligée d’emprunter la voie de l’amnistie générale, de peur de fragiliser le camp Ouattara dont elle a besoin pour préserver son hégémonie en Côte d’Ivoire et en Afrique de l’Ouest. Le politologue français a, tout au long de son article, relevé, indirectement, dans un langage hermétique qui lui est propre, la nécessité pour la France de préserver, cette fois-ci, avant la présidentielle de 2015, l’unité du camp Ouattara, en renonçant, bien sûr, aux transfèrements à la CPI de ses partisans accusés de crimes contre l’humanité. «L’équation ivoirienne en simplifiant tourne autour de trois blocs ethniques régionaux […] il s’agit des blocs EST (Akan comme des Baoulés), OUEST (Krou, comme les peuples Bété) et Nordistes (populairement « dioula » comprenant Sénoufo et surtout Malinké, ethnie d’origine de Ouattara qui truste la plupart des postes de l’État. Aussi l’alliance du RDR de Ouattara avec le PDCI de Bédié, compose la majorité, rejetant le FPI de Laurent Gbgabo (en son absence d’Affi N’Guessan) dans l’opposition. »

Il est bon de souligner que le politologue français, contrairement à son précédent article sur les différents scénarios pour l’après-Ouattara, n’évoque plus les liens de ce dernier avec les « apatrides » d’origine burkinabé, ainsi que l’alliance PDCI/FPI susceptible de vaincre l’alliance du RDR avec les millions d’apatrides présents dans notre pays. La nouvelle stratégie de la France, pour préserver son hégémonie en Côte d’Ivoire, selon les propos du politologue, doit désormais reposer sur l’alliance du PDCI avec le RDR et les apatrides, s’ils tiennent à briser le fer de lance de Gbagbo (ou d’Affi N’Guessan); ses partisans, qui forment un électorat pluriethnique. Les statistiques ne peuvent en fait prévoir les résultats d’un tel électorat. Une amnistie générale est donc déterminante pour reconquérir le cœur de Soro et de ses hommes, et préserver surtout la crédibilité de la France, face à l’opinion publique internationale qui attendait de voir, jusqu’à ce jour, le transfèrement d’un des partisans d’Alassane Ouattara à la CPI, pour que toute « justice » soit faite. Le politologue engagé prêt à défendre, légitimement, les intérêts de la France, son pays, tient à rassurer l’Élysée de la justesse de ses nouvelles suggestions, car le FPI d’Affi N’Guessan (et non de Gbagbo que l’on veut absent de la scène politique ivoirienne) sera, en définitive, incriminé et décapité. Le chef d’accusation contre les partisans de Gbagbo retenus, durant toute la crise postélectorale, comme les seuls coupables est déjà tout trouvé par la France: «[…] Puis decrescendo dans les mois et années qui ont succédé, de 2011 à nos jours – et que j’estime personnellement de 2002 à 2014, à plus de 5000 victimes civiles causées par le camp de Guillaume Soro et d’Alassane Ouattara. Mais en fonction de l’avenir de 2015 en particulier, la violence symbolique du trucage définitif des urnes par inscription massive des sympathisants nordistes, de culture mandingue, risque de raviver deuils et souffrances de 2011 et conduire à une explosion des passions dans les villages et les quartiers – ce que les demandeurs de vengeance ou de justice – baptisent déjà le « match retour », sanglante métaphore entendue déjà à Bangui et ailleurs – comme dans une sorte d’épidémiologie – panafricaine des représentations et formes de la violence ».

Les partisans de Gbagbo sont déjà perçus comme les anti-Balakas qui ne pourront contenir leur désir de vengeance, et les soldats au service du RHDP représentent les Selekas. Toutes les solutions en faveur de la paix préconisées par le politologue français Michel Galy, avec la bénédiction de la France, passent déjà, sous silence, ce que le professeur qualifie de graves décisions prises par le gouvernement d’Alassane Ouattara qui risquent de mettre le feu aux poudres. De quelles décisions s’agit-il ? Le spécialiste répond lui-même à la question qu’il pose : « Via un recensement de population, le don «sur déclaration » de la nationalité ivoirienne, de l’inscription sur les listes électorales d’environ un million de ressortissants d’origine sahélienne ». Ces révélations ne nous apprennent rien de nouveau. Dénoncer ces graves décisions, tout en soutenant militairement le régime d’Abidjan sont des actes contradictoires, paradoxaux. La gauche, la droite française, et la quasi-totalité des intellectuels français soutinrent le carnage d’Abidjan pour défendre les intérêts de leur Patrie. Le président Hollande invite, à dessein, les français à le juger à la fin de son mandat, en 2017, après avoir certainement rempli sa mission en Côte d’Ivoire, durant la présidentielle de 2015, en trouvant, dans notre pays, les solutions adéquates à la crise économique que traverse la France, à cause de l’égoïsme de ses hommes politiques et de ses acteurs économiques. L’Élysée ne peut que souhaiter la naissance d’une Françafrique, sous d’autres traits, plus subtile, pour respecter une feuille de route tracée par leurs pères, depuis l’époque coloniale. Les conseils avisés du politologue Michel dispensés pendant 20 ans à l’Élysée n’a rien changé à la politique africaine de son pays. Les Ivoiriens, les Africains se doivent simplement de comprendre que les conditions favorables à la paix dans leur nation seront créées par eux-mêmes. Ben Ali ou Moubarak tant de leaders africains, qui étaient aux ordres de grandes puissances eurent, un jour, leurs avoirs gelés. Ils s’exilèrent ou furent mis en prison, quand le peuple souverain se lança à la conquête du pouvoir politique. D’autres encore furent éliminés physiquement après avoir reçu le baiser de Judas, parce qu’en politique internationale il n’y a pas d’amis mais des intérêts à défendre. La paix en Côte d’Ivoire viendra de cet électorat pluriethnique qui a compris le combat que mène un digne fils de la Côte d’Ivoire, le président Gbagbo qui tient, contrairement à ses adversaires politiques, un langage franc et se soucie du bien de tous les habitants de ce pays : autochtones et allogènes.

Isaac Pierre BANGORET (Écrivain)

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