Côte-d’Ivoire – Le renvoi du procès des prisonniers politiques pro-gbagbo ou les bavures d’une justice aux ordres ?

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Par SAM L’Africain, leader d’opinion, président de la NACIP

Le renvoi Sine die du procès des prisonniers politiques pro-gbagbo ou les bavures d’une justice aux ordres ?

A. LA JUSTICE UNE ARME POLITIQUE DE GUERRE CONTRE LES PRO GBAGBO ?

Selon un adage bien connu, ‘’vous connaîtrez la vérité et la vérité vous rendra libre’’. De plus, il est écrit, ’’la connaissance permet d’échapper à la mort’’. Dans l’affaire du renvoi sine die, c’est-à-dire renvoi sans date fixe, du procès des prisonniers pro- Gbagbo, la connaissance d’une vérité juridique essentielle s’impose : c’est qu’en droit de la procédure pénale, la décision de renvoi sine die est par nature une décision inconstitutionnelle et illégale, nulle et non avenue. Or en Côte d’Ivoire, une affaire de procédure criminelle de haute envergure a été renvoyée sine die dans l’indifférence totale, puisque ni les concernés que sont les 96 accusés, ni leurs avocats, ni les organisations de défense des droits de l’homme ni les chancelleries occidentales, ni leurs gouvernements si prompts à donner des leçons de démocratie et de justice indépendante en Afrique, n’élèvent la plus faible protestation contre une telle violation massive des droits de la défense.
On se souviendra que, Madame Bamba Affoussiata Lamine, Porte-parole adjointe du gouvernement du régime au pouvoir à Abidjan avait martelé très solennellement devant les médias nationaux et internationaux, à l’occasion du compte rendu du conseil des ministres annonçant officiellement l’ouverture pour la date….. du procès en assises des détenus de guerre de la crise post-électorale, dit prisonniers pro-Gbagbo, que ledit procès est bien un procès politique.

Si certains dans le clan même de cette ministre avaient pu prendre la déclaration de celle-ci comme une méprise de cette personnalité considérée à tort ou à raison comme encline aux incartades verbales, force est de retenir que suite à la déclaration de la ministre porte- parole adjointe du gouvernement sur le caractère très politique du procès des pro Gbagbo, la justice ivoirienne qui, dans la foulée, a feint d’ouvrir le procès, a pleinement confirmée l’aveu de la porte-parole adjointe du gouvernement au travers de la décision dite de « Renvoi sine die » qu’elle a rendue d’entrée de jeu.

Ainsi donc, pour cette affaire, la porte-parole adjointe du gouvernement avait bien traduit la position du Chef de l’État dont le secret projet est de faire maintenir Gbagbo Laurent et tous ses partisans dits pro Gbagbo en prison. C’est pourquoi, le Chef de l’État ne manque pas de s’irriter des pressions acharnées dirigés contre son régime quand il lui est fait injonction d’organiser le procès des pro Gbagbo pour démontrer sa capacité à gérer un État de droit au lieu de l’ État de désordre actuellement ambiant.

Non, le Chef du régime au pouvoir à d’Abidjan, ne fait pas confiance aux juges et à l’efficacité des procédures judicaires car il sait qu’une décision de justice est toujours une aventure susceptible de réserver des surprises désagréables. Il le sait d’autant plus que dans le contexte ivoirien, les procédures contre les pro-Gbagbo l’ont été dans l’opacité, mais surtout dans une atmosphère de haine contre les accusés perçus comme des adversaires à écarter à tout prix du jeu politique. Le Chef de l’État ne veut pas, en œuvrant à l’organisation d’un procès, prendre le risque de laisser « un juge courageux » prononcer une relaxe contre un pro Gbagbo que le régime voudrait continuer de voir croupir au fond de la prison.
Dans ce contexte, tous les discours politiques tendant à faire croire que le procès des prisonniers pro Gbagbo est imminent et que le gouvernement met tout en œuvre pour la tenue effective des audiences, ne sont en réalité que des stratagèmes pour permettre au régime au pouvoir à Abidjan, de se dégager des pressions de plus en plus insidieuses ses organisations des droits de l’homme et des bailleurs de fonds, et ceci, pour masquer l’absence de volonté ou en tout cas la faible volonté des autorités ivoiriennes à faire tenir les assises du procès.
C’est donc dans cet exercice de manipulation de la justice ivoirienne qu’il faut comprendre la décision de renvoi sine die du procès des prisonniers politiques pro Gbagbo.
Cependant, le hic, c’est que cette décision de renvoi sine die est manifestement anti constitutionnelle, illégale comme recelant une violation massive des droits de l’homme et des droits de la défense.
C’est pourquoi le silence des avocats des prisonniers pro Gbagbo est cruelle et regrettable mais aussi celui de l’opposition, de la société civile et des organisations des droits de l’homme ainsi que celui des gouvernements et chancelleries occidentales qui se targuent de défendre les africains de toutes formes de régime de dictature.

B. DE LA NULLITÉ DE LA DÉCISION DE RENVOI SINE DIE.

Pour s’en rendre compte, il convient d’expliciter certains concepts juridiques dont l’ignorance pourrait excuser en partie le silence constaté jusque-là depuis le prononcé du renvoi sine die du procès des prisonniers politiques pro Gbagbo.
Ainsi donc, il est bon de savoir que le mot Renvoi en droit processuel, c’est dire droit du procès, signifie «Report d’une audience à une autre date; contrairement aux instances civiles, où un ajournement peut renvoyer à une date indéfinie, un renvoi exige que le tribunal fixe la date à venir, à laquelle l’affaire sera de nouveau présentée au tribunal.

La locution latine « sine die » signifie « sans jour fixé ».

Dès lors, lorsqu’une instance du tribunal est ajournée « sine die », aucune date précise n’est fixée pour ce qui est du moment où l’instance sera présentée à nouveau au tribunal. Cette expression est souvent utilisée dans des instances civiles lorsque le tribunal accorde un ajournement « sine die » et qu’il incombe aux parties de présenter à nouveau l’affaire au tribunal à une date et à une heure dont elles peuvent convenir.
Aujourd’hui la décision dite  » Renvoi sine die du procès des prisonniers politiques pro Gbagbo » se révèle sous son vrai jour. Il fallait éliminer les empêcheurs de tourner en rond, en particulier ceux qui pouvaient dire NON au monarque local qui entend installer une monarchie ethnique. Il faut croire que les prisonniers politiques pro Gbagbo embastillés depuis bientôt 4 ans ! Une éternité ! faisaient partie de cette catégorie-là.
La vérité finira bien par triompher un jour. Mieux vaut tard que jamais.
Et pour cause, une fois le plan de torture des pro Gbagbo imposé par voie de justice dénoncé au grand jour, progressivement les fenêtres de la vérité au sujet de l’inique renvoi sine die s’ouvrent enfin, face à une impasse politico-judiciaire, pointant une énième incohérence du régime.
Les avocats au barreau, les syndicats et unions de magistrats, les organisations des droits de l’homme, tous les démocrates doivent crier à la « violation des droits de la défense » et à la « violation du Code de procédure pénale ». L’opinion élèverait ainsi un mur d’interrogations et de protestations dans une affaire qui semble avoir emprunté un obscur labyrinthe. »

C. OUATTARA COMME DANS LES DICTATURES D’ASIE

L’histoire retiendra qu’en Asie du Sud – Pakistan, la justice avait ordonné le Renvoi sine die du procès en appel d’Asia Bibi.
L’affaire Asia Bibi, qui mobilise depuis plusieurs années les militants des droits de l’homme au Pakistan et à l’étranger, est suspendue sine die par « ordre venu d’en haut », ont annoncé les avocats de la défense. Mère de quatre enfants, la jeune femme chrétienne, condamnée à mort en 2010 pour blasphème, …attend depuis quatre ans de passer devant la Cour d’appel de Lahore.
Ces derniers mois, les dates d’audiences qui avaient été fixées ont toutes été annulées à la dernière minute ou reportées, pour des motifs aussi divers que peu crédibles. Des atermoiements qui, selon les observateurs, sont dus au fait qu’Asia Bibi est devenue le symbole de la cause des victimes des lois anti-blasphème qui sévissent au Pakistan, et le porte-drapeau des nombreuses campagnes internationales qui font pression sur le gouvernement du pays, dénonçant une situation « de violation permanente des droits de l’homme ».
Le cas d’Asia Bibi est « un dossier trop sensible », confirme Me Sardar Mushtaq Gill, avocat chrétien à la tête de l’équipe chargée de défendre l’accusée, et qui tente actuellement d’avoir des explications plus précises de la Haute Cour sur le blocage du procès en appel de sa cliente. Le 27 mai dernier, la dernière audience, déjà renvoyée à de multiples reprises, avait été annulée le jour même, tandis que l’affaire Asia Bibi disparaissait inexplicablement du rôle du tribunal. « L’audience était bien inscrite sur le rôle le mardi matin, et subitement dans l’après-midi elle a disparu sans aucune explication ! », s’était étonné Me Naeem Shakir, qui reconnaît n’avoir « jamais rencontré ce cas de figure auparavant ».

D. Le Cul-de-sac politico-judiciaire

Le renvoi d’audience sine die est contraire au nouveau Code de procédure pénale. «En décidant unilatéralement de ne pas tenir l’audience, et de ne pas fixer la date de la prochaine audience, la justice du régime d’Abidjan a pris une décision occulte et clandestine. Cette décision occulte a pour conséquence de placer les prisonniers politiques pro Gbagbo dans une situation proscrite par le Code de procédure pénale, c’est-à-dire, sans connaissance de la date de la prochaine audience compte tenu de l’interdiction des « renvois sine die»

Cette lacune est déplorable et les organisations démocratiques doivent exercer des pressions de tous ordres sur le gouvernement d’Abidjan aux fins de tout mettre en œuvre en vue de la reprise immédiate des audiences du procès des prisonniers politiques pro Gbagbo.

SAM L’Africain
Leader d’opinion
Président de la NACIP

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