La gauche grecque peut-elle changer l’Europe ?

Yanis Varoufakis, le ministre grec des Finances avec le président de l'Eurogroupe, le Néerlandais Jeroen Dijsselbloem 30 janvier 2015
Yanis Varoufakis, le ministre grec des Finances avec le président de l’Eurogroupe, le Néerlandais Jeroen Dijsselbloem 30 janvier 2015

Par Serge Halimi Monde-diplomatique.fr

En Grèce et en Espagne, la progression d’une gauche opposée aux politiques d’austérité encourage les partisans d’un changement de cap de l’Union européenne. De plus en plus formel, le débat démocratique y gagnerait beaucoup. L’affrontement culturel et religieux, le « choc des civilisations » que les auteurs des attentats de Paris ont voulu déchaîner, reculerait alors d’autant.

Décidément, l’Europe existe ! Le premier ministre grec Antonis Samaras n’a pas attendu très longtemps avant d’utiliser avec une délicatesse consommée l’assassinat collectif dans les locaux de Charlie Hebdo : « Aujourd’hui à Paris un massacre s’est produit. Et ici, certains encouragent encore davantage l’immigration illégale et promettent la naturalisation ! »

Un jour plus tard à Athènes, M. Nikos Filis, directeur d’I Avgi, quotidien dont Syriza, coalition de la gauche radicale, est l’actionnaire principal. tire devant nous une leçon fort différente du crime commis par deux citoyens français : « L’attentat pourrait orienter l’avenir européen. Soit vers Le Pen et l’extrême droite, soit vers une approche plus raisonnée du problème. Car la demande de sécurité ne peut pas être résolue seulement par la police. » Au plan électoral, ce type d’analyse n’est guère plus porteur en Grèce que dans les autres Etats européens. M. Vassilis Moulopoulos le sait. Pourtant ce conseiller en communication de M. Alexis Tsipras n’en a cure : « Si Syriza avait été moins intransigeante sur la question de l’immigration, on aurait déjà obtenu 50 % des voix. Mais ce choix est l’un des seuls points sur lequel nous sommes tous d’accord ! »

Depuis des années, les politiques économiques mises en œuvre sur le Vieux Continent échouent, en Grèce et en Espagne plus lamentablement qu’ailleurs. Mais alors que, dans les autres pays de l’Union européenne, les partis de gouvernement semblent se résigner à l’essor de l’extrême droite, et même escompter qu’il assurera leur maintien au pouvoir en leur permettant de rassembler contre elle, Syriza comme Podemos ont ouvert une autre perspective. Nul à gauche n’a progressé aussi vite qu’eux en Europe. Inexistants ou presque il y a cinq ans, à l’orée de la crise financière, ils ont réalisé depuis deux exploits à la fois. D’une part, ils apparaissent comme des candidats crédibles à l’exercice du pouvoir. D’autre part, ils sont peut-être en passe de reléguer les partis socialistes de leur pays, (…)

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