Côte d’Ivoire Procès en assises des pro-Gbagbo – Note salée pour les anonymes

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Par S. Debailly | Connectionivoirienne.net | 3 mars 2015

Le procureur général dribble les avocats de l’Etat : Des charges contre des journalistes et Mme Gbagbo abandonnées

Lundi à l’ouverture des plaidoiries dans le procès en assises des cadres de l’ancien régime, les avocats de l’Etat n’ont pas fait dans la dentelle, exigeant jusqu’à la prison à perpétuité et le paiement de dommages et intérêts d’un montant de deux (2) mille milliards de FCFA. Ce mardi 3 mars 2015, le procureur général qui est entré en scène en attendant demain les avocats de la défense, n’a pas suivi en totalité la réquisition presque surréaliste des avocats de l’Etat. En matière pénale, l’infraction étant individuelle, celui-ci (le procureur général) a étayé pour chacun des accusés les délits et les peines y afférents dans son ordonnance de renvoi dont la lecture a duré un peu plus de 3 heures.

Il est vrai que les peines infligées semblent être à la tête du client comme l’a commenté un avocat de la défense à la fin de l’audience, mais ici, les réquisitions paraissaient mesurées. La qualité des personnes et le contexte du procès y ont certainement joué. Aussi Pascal Affi N’guessan à qui il était reproché des actes de défiance à l’ordre constitutionnel incarné par Alassane Ouattara s’en sort à bon compte si le juge devrait suivre le procureur général. Seulement trois mois d’emprisonnement ferme ont été requis à l’encontre de l’actuel président du Fpi qui se positionne désormais comme un adepte du dialogue vis-à-vis du pouvoir Ouattara. Il avait donné le ton lors de sa comparution en plaidant pour un abandon de la justice pénale afin de donner des chances à la réconciliation nationale. Si Affi ne devra plus retourner en prison (sous réserve du verdict) car ayant déjà purgé sa peine dans la détention préventive, il n’en est pas de même pour Simone Gbagbo, la principale vedette de ce procès.

10 ans de prison ferme et de privation de droits civiques ont été requis par Ali Yéo et ses services à l’encontre de l’’ex-première Dame. Simone Gbagbo qui était présente dans le box des accusés est « reconnue coupable » par le procureur de « troubles à l’ordre public » et « constitution de bandes armées ». Cependant les charges de tribalisme, xénophobie, participation à un mouvement insurrectionnel, coalition de fonctionnaires et bien d’autres ont été abandonnées. Le procureur a fondé son réquisitoire sur les déclarations de l’accusée à la barre, l’instruction du dossier et les auditions des témoins dont l’un est d’ailleurs poursuivi pour faux témoignage. On le sait, Simone Gbagbo avait dit ne pas se reconnaître dans le délit d’atteinte à la sureté de l’Etat. Pour elle, le Conseil constitutionnel ayant déclaré Laurent Gbagbo vainqueur, le 3 décembre 2010, elle ne reconnaissait que celui-là comme seul président élu. L’élu, avait-elle expliqué, ne pouvait être Alassane Ouattara qui a prêté serment par écrit le 4 décembre 2010. Pis, ajoutait-elle, ce dernier a été proclamé président et non déclaré vainqueur de l’élection présidentielle, le 6 mai 2011 soit 6 mois après le vote du 28 novembre 2010. Alassane Ouattara, précisait enfin Simone Gbagbo a été investi le 21 juin 2011, comme président de la République et qu’à partir de cette date, elle n’a mené aucune action visant à déstabiliser le nouveau régime. Au passage elle avait aussi démontré que le mandat du certificateur de l’Onu, conformément à la résolution 1665, n’était pas de proclamer les résultats des élections mais plutôt d’évaluer le déroulement du scrutin et dire s’il est conforme aux standards internationaux. Le juge va-t-il suivre le procureur général ? On attend de voir tout comme nous attendons de savoir si ce verdict projeté peut satisfaire la Cour pénale internationale (Cpi) qui ne cesse de réclamer l’épouse de Laurent Gbagbo.

Quid des journalistes Herman Aboa, Franck Anderson Kouassi, Serge Boguhet… ?

Sur les infractions qui sont reprochées à nos confrères l’un de la RTI (Herman Aboa), les autres du service de communication de la présidence de la République et ex-président du Conseil national de la communication audiovisuelle (Cnca) (Franck Anderson Kouassi), le procureur a déclaré certaines non constituées. Il n’a retenu que le délit de « trouble à l’ordre public ». Pour le procureur, vu que l’émission « Raison d’Etat » et les agissements des cameramen Serge Boguhet et Germain De Guézé conditionnaient l’opinion à accepter que la réalité du pouvoir était avec Laurent Gbagbo, ils ont ainsi contribué à troubler l’ordre public. Qu’en tout état de cause, ils ont commis une faute professionnelle « détachable des faits incriminés », toujours selon le procureur. Des peines allant de 3 mois à 5 mois de prison ont été requises à leur encontre.

Note salée pour les anonymes pro-Gbagbo
La note est toute fois salée pour les détenus anonymes, arrêtés soit sur dénonciation, soit à la résidence présidentielle de Cocody ou à l’occasion de déplacement à travers la ville d’Abidjan. Certains parmi eux comme Dago Anicet, Dago Wilfried, Bly Marius, Guéyé Cyrille ou encore Téhé Marc devraient purger des peines allant jusqu’à 20 ans de prison chacun, si la cour devait suivre le procureur Ali Yéo en ses réquisitions.
S. Debailly

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