«Jurispolitique» CPI Côte-d’Ivoire: Une mesure de liberté provisoire pour Gbagbo pourrait prendre encore du temps

Par Connectionivoirienne

Liberté provisoire pour Gbagbo, n’est joué (article mis en ligne le 21.10.2012 retouché le 19 juillet 2017)

Un scenario avec lequel pro-Gbagbo

En effet Laurent Gbagbo, suite à une audience annoncée ce jour [19.07.2017], pourrait se voir accorder la liberté provisoire en attendant les suites de son long procès. Mais il ne faudrait pas l’oublier, la CPI a cette particularité d’être une «arène politique» qui renferme tout de même des précédents «judiciaires», ses propres «jurispolitiques», un tribunal plus politique que juridique.

Quand la CPI accordait et annulait la liberté provisoire de Jean-Pierre Bemba Gombo…
La dépêche ici-bas, qui date de fin 2009, rappelle le cas presque «similaire» de l’ex vice-président de la république démocratique du Congo, Jean Pierre Bemba. Monsieur Bemba Gombo avait en effet bénéficié en première instance en août 2009 d’une décision de mise en liberté provisoire. Malheureusement la joie du clan Bemba Gombo fut de courte durée. La Chambre d’appel de la même CPI saisie par le Procureur Ocampo avait quelques mois plus tard, fait annuler cette décision de liberté provisoire. Depuis lors, Jean Pierre Bemba croupit en prison à Scheveningen. On pourrait arguer que Gbagbo, aujourd’hui âgé de plus de 70 ans et Bemba la cinquantaine à l’époque, sont différents. Mais la Cour elle, reste la même avec les mêmes objectifs politico-juridiques.

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Jean-Pierre Bemba maintenu en détention
La Haye le 2 décembre 2009
grioo.com
La juge Akua Kuenyehia, de la cour d’appel de la CPI (Cour Pénale Internationale) a décidé d’annuler une décision précédemment prise qui aurait permis à Jean Pierre Bemba de sortir de prison en attendant le début de son procès prévu le 27 avril 2010. Selon elle, le risque que Jean Pierre Bemba prenne la fuite s’il est libéré provisoirement est élevé. Il l’est d’autant plus que Jean Pierre Bemba risque une lourde condamnation lors de son procès. Arrêté en mai 2008 en Belgique, Jean Pierre Bemba avait bénéficié en août 2009 d’une décision qui devait lui permettre de bénéficier de la liberté surveillée. En effet, les juges avaient souligné que la durée de sa détention provoisoire risquait d’être trop longue. Jean Pierre Bemba ne s’est pas exprimé lorsque la nouvelle décision de le maintenir en détention a été prise, mais selon ses avocats, il continuera de lutter pour sa remise en liberté. Jean Pierre Bemba a été arrêté pour les exactions (pillages, meurtres, viols) commis par sa milice (Mouvement de Libération du Congo) en 2002 et 2003. Suite à son arrestation en Belgique, Jean-Pierre Bemba avait été transféré à la CPI à La Haye (Pays-Bas) au mois de juillet 2008. C’est le plus grand responsable politique détenu à ce jour par la CPI.

Liberté provisoire pour Gbagbo?

Je n’ai que 7 ans de présence dans le milieu de la presse mais je sais qu’un journaliste ne rend pas service à son lectorat s’il écrit uniquement pour faire plaisir à des gens au lieu de donner froidement l’information vraie.
Demain, la Chambre d’Appel de la CPI se prononce sur les motifs en droit du refus des juges de la Chambre de première instance d’accéder, à la demande de la Défense de Gbagbo, à sa libération provisoire. Les juges, majoritairement, ont rejeté cette demande. La Défense de Gbagbo a alors saisi la chambre d’appel pour la prier de déclarer que le refus des juges est dénué de base légale et que toutes les conditions légales sont remplies pour que Gbagbo bénéficie de cette libération provisoire, surtout en raison de son état de santé « précaire » aggravé par la rigueur, contrairement aux apparences, de la détention à la CPI.
Il faut préciser que le droit de faire appel contre les décisions des juges est ouvert à la fois à la Défense et à l’Accusation. Quand les juges refusent de libérer, la Défense peut faire appel. S’ils décident de libérer, l’Accusation peut faire appel.
La Chambre d’Appel ne libère pas ou ne refuse pas de libérer. Elle se prononce sur les motifs du refus, dans le cas d’espèce et, certainement, si elle annule les motifs que la Défense estime non légaux, elle demandera aux juges, sans doute de statuer de nouveau. Une annulation sans renvoi étant possible mais plutôt rare.
En cas d’annulation de toutes les dispositions de la décisions de refus comme le demande la Défense, ainsi privés des motifs qui ont gouverné leur refus, les juges devront sans doute ordonner la liberté provisoire. Etant donné que l’Accusation, avant que la Chambre d’Appel ne statue, aura versé au dossier, ses observations et qu’elle ne devrait pas faire, encore, appel pour les mêmes observations. Sans doute se préoccupera-t-elle des mesures de sécurité à prendre pour la résidence surveillée.
Mais que signifie une liberté provisoire pour un détenu en instance de jugement à la CPI ?

Dans le cas de Gbagbo, cela signifiera qu’il ne sera plus dans sa cellule, mais dans une résidence surveillée, certainement en Hollande, vu que la CPI ne pourrait pas (j’utilise le conditionnel), prendre le risque, en raison de l’hostilité grandissante de nombreux pays africains à son égard, de le confier à un gouvernement africain.
Donc, en cas de liberté provisoire demain, vu que le procès est engagé et qu’il ira certainement à son terme à l’horizon 2020, Laurent Gbagbo restera hors de sa terre natale. Donc, il ne faut pas faire croire aux gens que Gbagbo revient demain en Côte d’Ivoire, comme si le verdict de son procès était demain, l’enjeu. Faire ce genre de journalisme, même s’il permet de vendre des journaux, c’est manquer de respect pour les lecteurs et jouer avec les émotions des partisans de Gbagbo qui n’ont pas la possibilité de comprendre tous les enjeux de cette affaire. Une libération provisoire de Laurent Gbagbo, alors que le procès a déjà commencé, est dans l’ordre normal des choses. Si les conditions légales sont remplies, c’est une aberration que de ne pas lui permettre d’être hors de la prison pour suivre le reste de son procès, avec le meilleur état de santé possible. Dans les Etats de droit, les droits de la Défense sont particulièrement respectés
Pour ma part, je l’ai toujours écrit, et c’est ma conviction personnelle. Ce procès est extrêmement utile pour la Côte d’Ivoire, même s’il faut déplorer avec force, le deux poids deux mesures de la Cpi qui ne se donne pas les moyens de poursuivre dans tous les camps, les personnes sur qui pèsent des soupçons de crimes de sang divers. Il faut déplorer aussi la volte face du régime Ouattara qui, après avoir déclaré la main sur le coeur que personne n’échappera- quels que soient son rang, sa proximité politique, etc. à la justice-et qui, malgré le rapport de sa propre commission d’enquête ayant épinglé les deux camps, a laissé la justice ivoirienne s’acharner uniquement sur le camp Gbagbo.
Ma conviction est donc que ce procès est utile parce qu’il nous permet de découvrir des choses qu’autrement, on n’aurait jamais sues. Rien que pour cela, je suis pour qu’il aille à son terme, même si la CPI n’a pas besoin de mon souhait pour cela. Laurent Gbagbo lui-même a dit qu’il est prêt à aller jusqu’au bout, je ne crois pas qu’il l’ai dit au hasard. Tout ce qui se passe depuis l’ouverture de ce procès, de mon point de vue, ne lui déplait pas, bien au contraire. Sa cause n’est pas plus connue aujourd’hui grâce à ce procès?
La justice ivoirienne n’a pas les moyens moraux de juger sereinement qui que ce soit, dans le cadre de la crise post-électorale, et donc de permettre aux personnes poursuivies par elle d’user de tous les droits de la défense que les lois leurs offrent. J’ai déjà fait l’expérience de cette justice et elle n’a pas changé.

Une contribution de Tiémoko Antoine Assalé
Directeur de publication de L’Eléphant déchaîné

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2 réflexions au sujet de “«Jurispolitique» CPI Côte-d’Ivoire: Une mesure de liberté provisoire pour Gbagbo pourrait prendre encore du temps”

  1. Peu importe le verdict de la CPI. . C’est juste une mise en liberté provisoire et non un acquittement.
    Les ivoiriens pro-Gbagbo s’affolent comme si Gbagbo va etre déclarer « non-coupable »

  2. « Donc, il ne faut pas faire croire aux gens que Gbagbo revient demain en Côte d’Ivoire, comme si le verdict de son procès était demain, l’enjeu. Faire ce genre de journalisme, même s’il permet de vendre des journaux, c’est manquer de respect pour les lecteurs et jouer avec les émotions des partisans de Gbagbo qui n’ont pas la possibilité de comprendre tous les enjeux de cette affaire. »

    Non, Tiemoko, ce qui est vil et malsain, c’est de vouloir vendre vos journaux en jouant à celui qui remet les pendules à l’heure, tout en traitant les pro GBAGBO de crédules. Les ivoiriens ne sont pas dupes et ont appris avec le temps que tout ce qui tourne autour de GBAGBO LAURENT est avant tout politique.

    Et bien qu’il puissent exprimer leur joie à entendre une QUELCONQUE libération de GBAGBO, ils resteront dubitatifs, car ils savent bien que son avenir dépend entièrement des occidentaux qui ont attaqué ce pays.

    Alors oui, des journaux pro GBAGBO voudraient faire du chiffre en parlant de GBAGBO, mais vous aussi, vous en faites de même en le faisant et fustiger les autres pour quelque chose que vous même vous faite, est de fort mauvais gout.

    De la mauvaise foi en somme et du bon commerce pour « l’éléphant déchainé » adossé à l’image de GBAGBO LAURENT !!

    The Dabakala rules !!

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