CPI/Afghanistan: Trump crie « victoire », Bensouda se réserve le droit de faire appel, des ONG indignées

Déclaration : 12/04/2019

Déclaration du Bureau du Procureur suite à la décision de la Chambre préliminaire II concernant la situation en Afghanistan

Le Procureur et son Bureau ont examiné avec soin la décision rendue aujourd’hui par la Chambre préliminaire II, qui a rejeté la demande d’autorisation d’ouvrir une enquête sur la situation en République islamique d’Afghanistan.

Le Bureau du Procureur relève que les juges de la Chambre préliminaire II sont convaincus qu’il existe des motifs raisonnables de croire que des crimes relevant de la compétence de la Cour pénale internationale ont été commis en Afghanistan et que les conditions requises en matière de gravité et de recevabilité sont remplies. La Chambre préliminaire a toutefois refusé d’autoriser une enquête sur la base de son évaluation des intérêts de la justice. Le Bureau va analyser plus en profondeur la décision et ses implications et examinera tous les recours juridiques qui s’offrent à lui.

Le Bureau du Procureur de la CPI mène des examens préliminaires, des enquêtes et des poursuites à propos du crime de génocide, des crimes contre l’humanité, des crimes de guerre et du crime d’agression, en toute impartialité et en toute indépendance. Depuis 2003, le Bureau enquête sur plusieurs situations relevant de la compétence de la CPI, notamment au Burundi, en Côte d’Ivoire, au Darfour (Soudan), en Géorgie, au Kenya, en Libye, au Mali, en Ouganda, en République centrafricaine (deux situations distinctes) et en République démocratique du Congo. Le Bureau conduit également des examens préliminaires à propos des situations au Bangladesh/Birmanie, en Colombie, en Guinée, en Iraq/Royaume-Uni, au Nigéria, en Palestine, aux Philippines, en Ukraine et au Venezuela.

Source : Bureau du Procureur | OTPNewsDesk@icc-cpi.int

Les juges de la CPI rejettent l’enquête en Afghanistan, Donald Trump crie « victoire »

Les juges de la Cour pénale internationale (CPI) ont refusé l’ouverture d’une enquête pour crimes contre l’humanité et crimes de guerre présumés en Afghanistan demandée par la procureure. Une décision saluée par Donald Trump.

Les juges de la Cour pénale internationale (CPI) ont rejeté vendredi 12 avril la demande d’ouverture d’une enquête pour établir si des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre avaient été commis en Afghanistan.

« Les juges ont décidé qu’une enquête sur la situation en Afghanistan à ce stade ne servirait pas les intérêts de la justice », a déclaré la Cour dans un communiqué.

Si elle a admis qu’il existe « une base raisonnable permettant de considérer que des crimes relevant de la compétence de la CPI auraient été commis », la Cour a estimé que « la situation actuelle en Afghanistan » aurait rendu « extrêmement difficile la réussite d’une enquête et de poursuites ».

« Une victoire internationale majeure » selon Trump

Cette décision intervient dans un contexte de tensions entre la CPI et Washington. Les États-Unis avaient révoqué il y a une semaine le visa de la procureure générale de la CPI, Fatou Bensouda, en raison d’une possible enquête sur des exactions de soldats américains en Afghanistan. Bien décidé à protéger ses militaires, Washington avait, le mois dernier, pris une mesure inédite en annonçant des restrictions dans la délivrance des visas.

Le président américain Donald Trump s’est rapidement félicité de la décision des juges dans un communiqué : « C’est une victoire internationale majeure, non seulement pour ces patriotes, mais aussi pour l’État de droit ».

Les ONG indignées

L’annonce de la CPI a en revanche suscité de nombreuses réactions d’indignation parmi les organisations humanitaires.

Jamil Dakwar, directeur du programme des droits de l’Homme de l’Union américaine pour les libertés civiles, a réagi avec virulence, blâmant les « tactiques d’intimidation » du gouvernement américain.

« Il est scandaleux que les victimes de crimes de guerre aient beaucoup moins de chances d’obtenir justice pour des atrocités bien documentées à cause des efforts autoritaires de l’administration Trump pour saboter une enquête avant même qu’elle ne puisse être ouverte », a dénoncé M. Dakwar dans un communiqué.

De son côté, Human Rights Watch a déploré « un coup dévastateur pour les victimes qui ont souffert de crimes graves sans réparation ».

La Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) est elle aussi montée au créneau, fustigeant une décision « choquante qui repose sur un raisonnement profondément imparfait. La CPI a été créée précisément pour surmonter les difficultés qui rendaient les enquêtes nationales impossibles », a déclaré Patrick Baudouin, président d’honneur de la FIDH.

Un dur revers pour la procureure

La décision de la Cour est perçue comme un dur revers pour la procureure, Mme Bensouda, qui avait demandé aux juges en novembre 2017 l’autorisation d’ouvrir une enquête sur des crimes commis dans le cadre du conflit afghan, notamment par l’armée américaine. Son bureau avait entamé un examen préliminaire sur la situation en Afghanistan en 2006.

« Le bureau va analyser plus en profondeur la décision et ses implications et examinera tous les recours juridiques qui s’offrent à lui », a réagi Mme Bensouda dans un communiqué.

France24 avec vec AFP

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