Côte-d’Ivoire: Une ancienne religieuse (sœur) avoue « Quand Dieu appelle, il ne ferme pas en bas »

Amorçant la soixantaine, elle fréquente les paroisses mais n’y vit plus. « Je viens régulièrement à l’église. » Chrétienne ordinaire ? « Je ne sais pas. »

Yolanda T. hésite, quand elle doit définir ses relations avec Dieu. Elle est plus fréquente dans les lieux de prière qu’une chrétienne ordinaire, mais elle n’est plus sour. Pourtant, soeur Yolanda, ça sonnait bien, « en tout cas dans mes oreilles. Chaque fois qu’on le prononçait, j’avais l’impression que le Saint-Esprit me remplissait ». Ancienne religieuse, Sour Yolanda nous plonge dans l’univers des prêtres. Elle nous a convaincu que nous devions lui accorder l’anonymat. « Je peux parler à visage découvert mais vous devriez alors vous contenter des réponses de surface, policées. A vous de choisir ! »

Votre histoire avec Dieu a commencé quand ?

Depuis mon enfance. Je suis issue d’une famille catholique, baptisée à la naissance. J’ai été appelée par Dieu quand j’étais au lycée.

« J’ai été appelée par Dieu » vous dites ? Dieu appelle les gens comment ? Peut-être qu’il avait votre numéro personnel….

(Rires). Ce n’est pas une affaire de coup de fil ou de voix intérieure comme souvent des gens le laissent croire. En tout cas, pour moi et les religieux que je connais, l’appel de Dieu ne s’est pas opéré en une journée ou sous forme de vision.

Je suis pressé de le savoir

Tu vas à l’église comme tout le monde. Tu fais tes prières et puis, sans même que tu t’en rendes compte, tu constates que tu es de plus en plus présent sur la paroisse. Que tu participes à toutes les réunions, que tu ne peux t’empêcher de te préoccuper des autres. Puis avec le temps, tu t’aperçois que tu n’es heureuse que lorsque tu pries, surtout pour les autres. Que rien d’autre dans la vie ne te fait plaisir. Rien. En ce moment précis, tu te rends compte qu’il y a longtemps que Dieu t’a appelé. L’appel de Dieu, je crois que c’est comme une grossesse. Au moment tu te rends compte, c’est qu’il y a longtemps que tu es enceinte.

Vous avez parlé de  »tomber enceinte ». Vous savez ce qu’on fait pour en arriver là ?

Absolument ! C’est d’ailleurs quand je suis tombée enceinte que j’ai quitté le couvent.

Vous êtes tombée enceinte quand vous étiez au couvent ?

C’est ce que je vous dis.

Comment vous vous y êtes prise ?

Comme tout le monde. Je pensais que vous alliez me demander l’auteur de la grossesse.

C’est le fond de ma question.

Un prêtre.

Donc, l’auteur de votre grossesse est un prêtre de votre paroisse.

C’est un prêtre, ce qui est plus ou moins normal.

Quoi ? Je pensais que vous diriez  »ce qui est plus grave », et vous, vous pensez le contraire.

Ce que je veux dire, c’est qu’un certain nombre d’éléments concourent à des relations entre les sours et les prêtres.

De quels éléments parlez-vous ?

La proximité, la collaboration, l’entraide.

Soyez plus explicite. Quand vous parlez de collaboration, s’agit-il de prières ?

Les religieuses et les prêtres ne font pas que prier. Quand je parle de proximité, je fais allusion au fait que nous vivons généralement côte à côte. Des fois, sur le même site, mais généralement dans des cités voisines. En plus, les soeurs sont chargées de faire à manger aux prêtres, de faire leur lessive.

« Les sours sont chargées de faire à manger aux prêtres, de faire leur lessive. » Ça a tout l’air d’un mari et d’une femme !

C’est justement cela qui favorise certaines tentations, réveillent certaines pulsions….

Qui conduisent à certaines expulsions comme la vôtre….

En réalité, je n’ai pas été exclue. Je me suis retirée, lorsque j’ai constaté la grossesse. Je n’avais pas d’autres solutions. Je ne pouvais quand même pas avorter. Le péché était déjà dans ce que je n’ai pu résister aux pulsions, que je sois allée avec un prêtre.

Racontez-nous cette idylle. Comment c’est arrivé ?

Je peux dire que c’est arrivé…..comme ça devait arriver.

Comment cela ?

Vous devez quand même savoir ce qu’on fait pour tomber enceinte.

Oui, mais entre un prêtre et une soeur …..

Un soir, j’étais allée apporter à manger. Le temps était mauvais. Puis il a commencé à pleuvoir dru. Dieu même avait créé les conditions, je pense. Puisque le prêtre avec qui j’étais m’attirait et apparemment c’était réciproque. C’est pour cela que j’ai dit que c’est arrivé comme ça devait arriver.

Il y a eu d’autres fois ?

Oui, beaucoup plus souvent même comme dans un couple normal.

Vos supérieurs n’ont rien soupçonné ?

Dans le milieu, on fait l’effort de ne pas savoir certaines choses.

Vous voulez dire que ces pratiques sont tolérées ?

Je ne sais pas. Mais on n’évite de le savoir.

Vous n’étiez pas gênée ?

Non. A mes débuts au couvent, je n’aurais jamais osé. Mais il y a eu un déclic.

Quoi ?

J’ai surpris un jour notre supérieure, la patronne du couvent, nue avec le curé. J’ai refermé la porte. M’ayant vue très abattue, elle est venue me dire : « Tu sais Yolanda, quand Dieu appelle, il ne ferme pas en bas. Ouvre les yeux et tu le sauras ». J’ai compris et vu plus tard que beaucoup de choses étaient tolérées au couvent.

Sur les paroisses aussi…

Beaucoup de personnes affligées, notamment les veuves, trouvent toutes formes de réconfort auprès des prêtres. Je n’en dirai pas plus. Comprenez-moi.

On vous comprend

Merci. Je reste chrétienne, ne l’oubliez pas. Sachez aussi que les prêtres ne font pas voeu de chasteté. Ils font voeu d’obéissance au pape. Mais ça, beaucoup de personnes ne le savent pas.

Réalisée par Bledson Mathieu
Fratmat

Photo d’illustration

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