A bord du train Abidjan-Ouaga, éloge de la lenteur et ligne de vie d’Afrique de l’ouest

Par Youenn Gourlay

Mille kilomètres en plus de trente heures : le train qui relie la côte ivoirienne à la capitale burkinabé est un éloge de la lenteur. Et une ligne de vie pour la région.

L’Express, nom invraisemblable pour un tortillard rouillé qui ne dépasse par les 35 km/h, permet de découvrir le quotidien dans les campagnes. Rouillé : un euphémisme pour qualifier l’une des voies ferrées les plus vétustes d’Afrique de l’Ouest. C’est en 1903, sous la houlette des ingénieurs et officiers de l’Afrique-Occidentale française, que la construction de cette ligne fut lancée.

Le rêve des colons ? Réaliser une boucle qui relierait les principaux ports francophones de la région (Abidjan, bien sûr, mais aussi Cotonou et Lomé, dans les actuels Bénin et Togo) tout en désenclavant le Sahel, via Ouagadougou, puis Niamey, au Niger. Soit 3 000 kilomètres de rails, entre brousse, forêt tropicale et désert.

Mais le chantier, titanesque, a été plusieurs fois ralenti, notamment lors des deux guerres mondiales et de rebellions des populations locales contre le pouvoir colonial. Ce n’est que depuis 1954 que l’ensemble du tronçon Abidjan-Ouagadougou, long de 1 145 kilomètres, est opérationnel. Et le rail n’a jamais atteint le Niger, le Bénin ou le Togo…

L’une des filiales du groupe Bolloré
Il y a vingt-cinq ans, la Sitarail, l’une des filiales du groupe de l’industriel français Vincent Bolloré, a obtenu la concession pour son exploitation, dans l’espoir de ressusciter un jour la grande boucle ferroviaire imaginée au temps des colonies. Mais entre instabilité politique, risque terroriste et difficultés internes au Bénin, le projet est sans cesse reporté.

En attendant qu’il se concrétise un jour, la Sitarail se contente de rénover, depuis fin 2017, la voie existante. Utilisée pour convoyer chaque année 200 000 passagers et 900 000 tonnes de marchandises en desservant trente-six gares, c’est, plus qu’un simple chemin de fer, une ligne de vie dans la région. Et une fenêtre ouverte sur les multiples visages de l’Afrique sub-saharienne, ses traditions bien ancrées et ses métamorphoses…

Geo.fr

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