Côte d’Ivoire: En pleine crise du covid-19, les officiels Adjoumani et Aouèlè violent les consignes

« Actus dicitur bonus qui est conformis legi et rationi. Un acte est dit bon lorsqu’il est conforme à la loi et à la raison »

Face à la propagation rapide de la maladie à coronavirus 2019 ou COVID-19, le gouvernement de Côte d’Ivoire a pris des mesures drastiques parmi lesquelles figurent la distanciation d’au moins un (01) mètre entre les personnes et l’interdiction des rassemblements de population de plus de 50 personnes. Malheureusement, alors que la contamination au covid-19 gagne du terrain et qu’il faut se montrer plus que jamais vigilant et ferme dans l’observance des mesures prises, il se trouve que des officiels n’ont pas encore retenu les leçons de l’échec de la quarantaine à l’INJS dont toute la Côte d’Ivoire paie actuellement le prix. Ils organisent des rassemblements qui mettent en péril et la vie et la santé des populations. De quoi s’agit-il ?

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Le samedi 04 avril 2020 a été organisée à la place Etché Elleingand d’Aboisso une cérémonie de remise de dons du premier ministre à la population, en présence du ministre de la santé et de l’hygiène publique Dr Aka Aouèlè et du ministre de l’agriculture M. Kobenan Adjoumani. Il a été constaté en ce lieu un afflux massif des populations venues réceptionner ces dons. Bien que la mairie de la commune ait suggéré aux organisateurs de procéder à la remise de ces dons aux représentants des bénéficiaires dans un lieu clos pour limiter l’impact épidémiologique et pour respecter les consignes du gouvernement, les organisateurs n’en ont eu cure. Pis, les populations ont afflué en grand nombre à la place Etché Elleingand, une place publique, se retrouvant à près de 200 personnes.

Les dons en eux-mêmes faits par le premier ministre pour soulager les populations en cette période de crise sanitaire et de manque criant, partout dans le monde, de matériels de protection comme les masques, les solutions hydroalcooliques, les gants, etc. ne posent pas de problème et il n’y aurait rien à en dire si des mesures n’avaient pas été rendues publiques et exécutoires sur l’ensemble du territoire national. La multiplication de ces rassemblements populaires à caractère politique couverts par des remises de dons pose des problèmes de santé publique et de non-respect de la loi, faisant prévaloir la loi du plus fort qui est un retour à l’état de nature de Thomas Hobbes. Il se pose aussi la question de savoir si le fait d’être un officiel exonère du respect des mesures prises par le Conseil national de sécurité et entérinées par le gouvernement. Ou bien le gouvernement a délivré des dérogations à certaines catégories de personnes ; ce qui les autorisent à organiser des rassemblements de plus de 50 personnes. Le peuple est en droit de le savoir. Sinon, ce serait comme si, au lieu de briser la chaîne de contamination du covid-19, le gouvernement se tirait une balle dans le pied ; tous ses efforts titanesques pour lutter contre la maladie étant annihilés par lui-même à la manière de Sisyphe.

L’autre question qui se pose est que, si les officiels, possiblement plus sachant que le commun du peuple sur cette pandémie, se permettent de violer les règles établies, cela voudrait-il dire qu’il n’y a pas de crise sanitaire en réalité et donc que les chiffres donnés relèveraient de la manipulation des masses ; ce qui n’est pas certain au vue de l’hécatombe actuellement en Europe et aux Etats-Unis. Ces rassemblements populaires, même si l’on sent qu’ils manquent terriblement aux hommes politiques en cette période de crise sanitaire et de pré-campagne qui ne dit pas son nom, comportent plus de risques qu’il ne paraît. Le gouvernement accepterait-il que des personnalités proches de l’opposition fassent pareil ? Nous ne le croyons pas. Très vite, il leur sera brandi les décisions du Conseil national de sécurité, suivi probablement d’arrestations et de poursuites judiciaires pour violation des consignes. Il revient donc aux membres du gouvernement conduit par le premier ministre Amadou Gon Coulibaly de respecter en premier les décisions que ce gouvernement prend et de ne pas donner le mauvais exemple.

Le covid-19 n’épargne ni président ni ministre encore moins le plus pauvre des hommes. C’est le visage visible et actuel de la mort qui, ailleurs, endeuille des peuples entiers. Pour le moment, la Côte d’Ivoire en est quelque peu épargnée et l’épidémie est gérable. Mais, le laxisme ambiant et l’indiscipline généralisée risquent de donner raison à tous ceux qui prédisent l’apocalypse pour l’Afrique. Alors soyons vigilants. Chacun pour tous et tous pour chacun.

Pascal Fobah Eblin
Analyste politique

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