« La nicotine aurait un effet protecteur sur le covid-19 »

La nicotine pourrait avoir un effet protecteur sur le Covid-19. C’est ce que révèle une étude menée par une équipe de l’hôpital de la Pitié Salpêtrière à Paris : les fumeurs seraient moins touchés par le virus. Des essais cliniques vont démarrer prochainement pour confirmer ce qui n’est encore qu’une hypothèse.

Tandis que les chercheurs du monde entier sont à pied d’oeuvre pour trouver un traitement et, à terme, un vaccin contre le Covid-19, une équipe de l’hôpital de la Pitié Salpêtrière, à Paris, s’est penchée sur l’effet de la nicotine sur ce nouveau coronavirus qui a fait plus de 178 000 morts dans le monde (chiffres officiels au 22 avril).

Leur étude, qui vient d’être publiée par l’Académie des sciences, porte sur 480 malades du Covid-19, dans des formes plus ou moins sévères.

Parmi ces patients, le taux de fumeurs était de l’ordre de 5%, alors que dans la population générale, on compte plus de 25% de fumeurs quotidiens. Selon les auteurs, l’étude suggère donc que « les fumeurs quotidiens ont une probabilité beaucoup plus faible de développer une infection symptomatique ou grave par le Covid-19 par rapport à la population générale » ; le risque étant divisé par 5.

Ne vous mettez pas à fumer pour autant !

Alors, pourquoi ce décalage ? Une étude clinique va être lancée pour percer ce mystère, mais une hypothèse est retenue pour l’instant : la nicotine interférerait avec l’attachement du coronavirus sur certains récepteurs et freinerait donc la propagation du virus.

Des patchs nicotiniques vont être administrés à trois publics différents : des soignants en préventif, des patients hospitalisés et d’autres en réanimation, pour tester l’efficacité de la nicotine.

Mais les médecins mettent en garde : pas la peine de se mettre à la cigarette pour autant. Le tabac est responsable, chaque année, de la mort de 7 millions de personnes dans le monde. Bien plus, pour l’instant, que le coronavirus.
RFI

Covid-19: La nicotine pourrait avoir un rôle protecteur, une étude est lancée

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La nicotine pourrait limiter la pénétration du virus

L’hypothèse d’un rôle protecteur de la nicotine est étayée par un article à paraître dans les Comptes Rendus de Biologie de l’Académie des sciences. Ces travaux portent sur 350 malades hospitalisés et 150 plus légers qui ont consulté, tous atteints du Covid-19 (confirmé par test PCR). « Parmi ces patients, il y avait seulement 5% de fumeurs », dit à l’AFP le professeur de médecine interne Zahir Amoura, qui a mené cette dernière étude, soit « 80% de moins de fumeurs chez les patients Covid que dans population générale de même sexe et de même âge ». « Notre étude (…) suggère fortement que les fumeurs actuels ont une probabilité beaucoup plus faible de développer une infection symptomatique ou grave par le SARS-CoV-2 (virus du Covid-19, ndlr) que la population générale », expliquent les auteurs, chercheurs du CNRS, de l’Inserm, de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris (AP-HP), de Sorbonne université, du Collège de France et de l’Institut Pasteur.

« L’hypothèse est que la nicotine, en se fixant sur le récepteur cellulaire utilisé par le coronavirus, l’empêche ou le retient de s’y fixer » et donc de pénétrer dans les cellules et de se propager dans l’organisme, explique à l’AFP le Pr Jean-Pierre Changeux, neurobiologiste à l’Institut Pasteur et au Collège de France, co-auteur de ce nouvel article. Ce récepteur, appelé ACE2, module notamment le « récepteur nicotinique de l’acétylcholine », un neurotransmetteur essentiel au système nerveux central. Le rôle central du récepteur ACE2 dans la propagation du virus pourrait expliquer la variété des symptômes du Covid-19, dont la perte d’odorat et des troubles neurologiques, avancent les chercheurs.

Pour vérifier cette hypothèse, une étude est lancée à l’hôpital de La Pitié-Salpêtrière à Paris. Dès le feu vert final obtenu, avec le soutien du ministre de la Santé Olivier Véran, des patchs nicotiniques seront administrés à des dosages différents dans trois essais : en préventif à des soignants, pour voir si cela les protège ; en thérapeutique à des patients hospitalisés en médecine, pour tenter de diminuer leurs symptômes ; et enfin à des patients graves en réanimation, détaille le Pr Amoura.

Contre le Covid-19, le tabac ferait un remède pire que le mal

Ces premières données ne doivent pas inciter la population à se ruer sur le tabac. « La cigarette fait 200 morts par jour en France, elle n’est pas une solution thérapeutique », rappelle le Pr Bertrand Dautzenberg sur LCI. Même si la nicotine ralentissait la pénétration du virus dans le corps, ce bénéfice sur la santé serait complètement anihilé par les effets toxiques du tabac, insiste-t-il. « On ne soigne pas une grippe en se tirant des coups de fusil dans le poumon ». Même la nicotine, si elle se révélait bien protectrice, serait un traitement à manier avec précaution, car mal tolérée par les non fumeurs, comme en avertit le Pr Dautzenberg dans un tweet.

Les malades fumeurs sont sévèrement atteints

Certaines données apparemment contradictoires semblent montrer un facteur aggravant du tabagisme sur le Covid-19. Ainsi, dans la même étude chinoise du New England, le pourcentage de fumeurs passait de 12% à 26% si l’on ne considérait que les cas les plus graves, ventilées et admis en unité de soins intensifs. Bien que d’autres facteurs tels que le diabète ou des maladies cardiovasculaires – dont l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) rappelle que le tabac est un important facteur de risque – brouillent le signal, le tabac a des effets aggravant connus sur les infections qu’il convient de prendre en compte.

« L’une des principales raisons pour lesquelles les fumeurs sont exposés à un risque accru d’infections respiratoires est probablement l’affaiblissement et la mort des cils des voies respiratoires et des poumons », explique le Dr James Gill, médecin généraliste et maître de conférence clinique honoraire de la Warwick Medical School (Royaume-Uni). Ces cils – des « petits poils en forme de brosse » sur nos cellules des voies respiratoires, ont un rôle essentiel d’évacuation des débris, mucus et agents infectieux avant qu’ils ne puissent s’installer dans les poumons. Si la nicotine a vraiment un effet protecteur, cela pourrait signifier que si le virus réussi malgré tout à passer, il fera plus de dégâts chez les fumeurs.

Un sevrage qui laisserait le champ libre au virus

Ces cas sévères chez les fumeurs malgré un potentiel rôle protecteur de la nicotine pourraient s’expliquer par leur sevrage forcé à leur entrée à l’hôpital. Ceux qui ont été assez sensibles à l’infection pour être hospitalisés doivent en effet arrêter de fumer dès leur admission. Or, il apparaîtrait que le tabagisme provoque un surnombre de récepteurs ACE2, portes d’entrées du virus du Covid-19, sur les cellules. A leur sevrage, tous ces récepteurs auparavant occupés par la nicotine se retrouvent subitement disponibles pour le virus, facilitant l’infection, explique un article publié dans Nicotine and Tobacco Research, et un autre dans l’European Respiratory Journal. Cet « effet de rebond » serait « responsable de l’aggravation de la maladie observée chez les fumeurs hospitalisés », suggèrent les auteurs de l’article des Comptes Rendus de Biologie de l’Académie des sciences.

Sciencesetavenir.fr avec AFP.

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2 réflexions au sujet de “« La nicotine aurait un effet protecteur sur le covid-19 »”

  1. Une TRES GRAVE ERREUR de penser que le tabac serait un anti-coronavirus……… Certains mèmes ont le culot d’affirmer que la Cocaïne serait elle aussi un remède anti-coronavirus.
    Pour le moment il n’y a pas de remède spécifique efficace contre ce virus. Le monde continue de tâtonner

  2. La consommation de tabac a déjà un effet protecteur contre la méningite, c’est connu. Qu’il puisse aussi avoir un effet sur le coronavirus ne serait pas étonnant. Ce qui est curieux, c’est qu’on désigne dans les centaines de substances qui composent la cigarette, la nicotine comme élément ayant un effet sur le virus. Or, si c’est principalement le goudron contenu dans la cigarette qui tue le fumeur, c’est la nicotine qui rend le consommateur captif et fait le bonheur de l’industrie du tabac. Au point qu’il est démontré que cette industrie ajoute à dessein la nicotine (drogue fortement addictive) au tabac afin de garder captif le cheptel de fumeurs.

    Dans le contexte de confinement et de ralentissement industriel avec pour corollaire l’amaigrissement des bourses, je ne serais pas surpris qu’on incite là à nouveau les consommateurs à continuer de faire vivre l’industrie du tabac : entre autres bonne résolutions du confinement, des millions de fumeurs ont entrepris d’arrêter de fumer. Ceci expliquant sans doute cela.

    PS : Catherine de Médicis ayant vu ses terribles migraines disparaître suite à la consommation de tabac, en inondera le monde Occidental. Le tabac peut avoir quelques vertus, mais au regard de ses inconvénients, la balance penche dans le sens de son arrêt.

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