L’équation dozo et la cohésion sociale en Côte-d’ivoire ? Que faire pour éviter le péril dozo ?

Par Connectionivoirienne

Connus comme des chasseurs traditionnels aux pouvoirs dits «mystiques» pour dompter n’importe quel animal féroce, les dozos écument aujourd’hui toutes les régions de Côte d’ivoire.

Ils inspirent peur et rejet de la part des populations autochtones avec lesquelles les rapports peuvent devenir conflictuels du jour au lendemain, comment on vient de le constater récemment encore à Guézon.

Les dozos sont originaires du nord de la Côte d’ivoire pour la plupart. Autrefois, dans les années 1990, le péril sécuritaire a fait d’eux le premier recours de certaines personnalités pour se protéger. Ils ont été employés comme vigiles et ont ainsi migré de leur aire géographique connue au nord du pays vers le sud de la Côte d’ivoire, dont la ville d’Abidjan. L’on a entendu de ces histoires vraies ou fausses vantant leur pouvoir pour démasquer des voleurs. Tant qu’ils étaient utilisés pour ce boulot, ils faisaient bon ménage avec leurs hôtes du sud. Mais très vite, de chasseurs-gardiens, ils se sont mués en agriculteurs ou en guérisseurs traditionnels et se sont ainsi installés dans les zones luxuriantes du pays à la recherche de terres cultivables et d’une clientèle pour leurs sciences occultes.

Un nouveau type de dozos

Les crises politiques en Côte d’ivoire feront naître un nouveau type de dozos. Ces nouveaux dozos vont s’inviter dans le débat sociopolitique. Le pic de ce nouveau rôle (néfaste) sera atteint lors de la crise postélectorale de 2010-2011. On les retrouve parmi les combattants pro-Ouatara. Des légions entières vont constituer une redoutable force dans la conquête des zones dites loyalistes. Ils étaient réputés pour leur invulnérabilité supposée et étaient très craints de ce fait. Ils sont pourtant tombés nombreux avec leurs grigri sous les rares contre-offensives des forces ayant combattu pour Laurent Gbagbo.

Désormais les dozos sont considérés comme une unité parmi les supplétifs armés pro-Ouattara ayant joué un rôle prépondérant dans la bataille d’Abidjan en mars 2011. La confrérie gagne en confiance et en quantité, prend d’assaut les zones forestières qu’elle régente à sa guise. Les dozos tiennent des barrages dans les campagnes, sur des pistes villageoises, rackettent au grand dam des populations qui nourrissent des rancœurs contre eux. Ils sont reconnaissables à leur accoutrement fait de bandes de coton incompatible avec l’eau et le savon. Ils ont pour eux la solidarité de corps de sorte que toucher à un cheveu de dozo revient à s’attirer les foudres de toute la confrérie. C’est ainsi que surviennent plusieurs conflits de cohabitation entre dozo et populations locales. Il y a eu Zuenoula en pays gouro où pour un mouton volé au cours d’une fête de la lumière, les dozos ont fait tonner la poudre obligeant un village entier à se vider en quelques heures.

Guézon et la longue équation dozo

Les événements de Guézon le 27 décembre 2020 nous replongent dans la problématique sécuritaire avec l’incompréhensible présence de ces gens armés ignorés par tous les programmes de désarmement et de démobilisation sans que l’on sache pourquoi. Jusqu’à ce jour dans des contrées lointaines et même dans de grandes villes du pays comme Gagnoa, Daloa, Issia, Duékoué, Grand-Bassam, Aboisso, Bangolo, Adiaké, Assinie etc … ces chasseurs traditionnels sont visibles avec leurs armes et passent même à des check-points ténus par les forces régulières sans être inquiétés. Intouchables, ils trouvent dans cette posture une sorte de permis à tout faire et même de tuer. Et c’est ce qu’il s’est passé à Guézon où une banale affaire de chapeau a conduit au drame. 8 morts et des blessés, des disparus, des habitations incendiées. Avec eux c’est la tactique de la terre brûlée comme au temps de Samory Touré.

Comment régler la question dozo sans envisager leur désarmement si tant est qu’ils doivent coexister dans des régions qui ne sont pas leur aire socioculturelle ? La question est si préoccupante que ces chasseurs qui ne s’imposent plus de limite dans l’usage disproportionné de la force sapent la cohésion sociale partout où ils se trouvent. Quel gibier y a-t-il encore à chasser avec le recul de nos forêts du fait de leur surexploitation ?

Il faut en finir avec les solutions ponctuelles et aborder le problème dans sa globalité.

La solution passe par un désarmement des dozos et la fin de leur impunité.

SD à Abidjan

Photos à titre d’illustration

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