Vice-présidence/Côte-d’Ivoire: Pourquoi Ouattara choisit un inconnu du grand public, ex proche de Soro, politiquement vierge

Ses forces, ses faiblesses

C’est la nouvelle de ce début de semaine. Alassane Ouattara a finalement décidé de pourvoir au poste de vice-président de la République resté vacant depuis juillet 2020 après la démission surprise de Kablan Duncan.
Il a nommé à ce poste, le banquier central Tiémoko Koné Meyliet, l’actuel gouverneur de la Banque centrale des États de l’Afrique de l’ouest. Une nomination surprise que beaucoup n’ont pas vu venir, déjouant la plupart des pronostics qui mettaient en avant le premier ministre Patrick Achi ou l’actuel Secrétaire général de la présidence Fidel Sarassoro.

À première vue, le nouveau vice-président était jusque-là un homme politiquement effacé peu connu du grand public mais bien connu dans les milieux économiques et financiers.
Il fait ses véritables pas dans l’administration ivoirienne après avoir été coopté par Guillaume Soro comme conseiller à la primature, au sortir de l’accord politique de Ouagadougou. À l’avènement de Ouattara au pouvoir il sera nommé ministre de la Construction dans le gouvernement d’après 11 avril 2011. Poste où il passe peu de temps car il sera bombardé la même année, gouverneur de la Beceao en remplacement de Henri Philippe Dakoury-Tabley.
C’est un économiste qui a fait ses preuves à la Bceao avant d’en être le patron désigné par la Côte d’ivoire sous l’ère Ouattara. Koné Tiemoko est un homme indemne politiquement à qui on ne peut attribuer des propos déplacés contre tel ou tel régent du pays des éléphants ces 30 dernières années.
Économiste banquier, il s’est exclusivement attaché à sa technocratie loin des intrigues sociopolitiques de ces dernières années. Il est de l’école de la dette publique comme Alassane Ouattara. Favorable à la réforme du franc CFA telle que voulue par les dirigeants actuels de la France. C’est cet homme, visité par la chance d’être économiste qui abandonne la théorie et la pratique bancaire pour une fonction au carrefour des connaissances hétérogènes, celle de la gouvernance étatique. Parce que pour être président, il faut être d’un domaine d’activité précis et connaître un peu de tout.
Alassane Ouattara parlant de sa succession récemment sur une chaîne étrangère disait à qui veut le croire qu’il a une demi-douzaine de cadres sur qui compter. En voici un, en attendant que l’ossature du futur gouvernement resserré ne mette en selle bien d’autres.
Toutefois Koné Tiemoko part avec quelques faiblesses.
On ne lui connaît pas de prouesses politiques et il a les trois années à venir pour apprendre. Et cela dépendra d’avec qui il voudra composer son cabinet et faire rapidement son trou.

Si la vice-présidence se révèle aussi une sorte de garage en attendant une certaine incapacité du président en fonction, il aurait été intéressant d’assurer par sa nomination le nécessaire équilibrage sociologique Nord Sud, un peu comme au Nigeria. Un président du Nord et un vice-président du Sud et vice-versa.
Ici, la remarque est frappante. Tiémoko Koné Meyliet est un natif de Tafiré dans le nord du pays. Il partage la même aire sociogéographique avec le président de la République Alassane Ouattara. Et cette critique ne manquera pas dans les analyses et commentaires. La Côte d’ivoire d’après-guerre postélectorale a nécessairement besoin de cette posture géopolitique pour panser ses blessures et faire oublier définitivement la page sombre de son histoire échafaudée sur des considérants pas toujours objectifs, l’ethnie, la religion, la région, le repli identitaire…

Le vice-président de la République, du nord de la Côte d’ivoire saura-t-il être l’homme du milieu si le sort décidait qu’il devienne le premier citoyen du pays ?

SD à Abidjan
sdebailly@yahoo.fr

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