Cherté de la vie en Côte-d’Ivoire: Après ses explications Achi a-t-il convaincu ?

Par SD avec Gbansé, Douadé Alexis

Noyée par la situation trouble entre la Côte d’ivoire et le Mali, la grande interview du premier ministre Patrick Achi n’a pas trop retenue l’attention des commentateurs. Elle avait pourtant tout son intérêt après avoir été annoncée à grands renforts de publicité. Et surtout après la litanie ambiante des intervenants sur la question notamment le ministre du commerce Souleymane Diarrassouba. Lequel s’était contenté du récital habituel selon lequel le gouvernement n’est pas responsable de l’inflation. Tout lui est tombé dessus. Tout est venu de l’extérieur et aggravé par la crise russo-ukrainienne après l’épouvantail du Covid 19. Le ministre du commerce s’était prêté aux questions des députés et n’a pas apporté de la nouveauté à l’axe de défense du gouvernement.

Patrick Achi que l’on sait grand orateur avait donc là, un examen de passage devant des populations qui ne savent plus à quel saint se vouer face à la folie des prix des denrées.
On peut le dire, c’est un homme sans arrogance qui a compris la sensibilité de la question de la cherté de la vie qui s’est prêté à un exercice d’explication. On a senti un discours un peu varié même s’il emprunte les éléments de langage habituels à savoir que nous vivons une inflation importée due aux méchants russes et ukrainiens qui se font la guerre et qui bloquent la fourniture des biens de consommation. Un peu comme si la Russie et l’Ukraine à elles seules étaient les greniers du monde, les seuls pays où poussent le blé, la betterave, la pomme et bien d’autres ingrédients alimentaires.
Patrick Achi aura au moins eu le mérite de faire quelques grandes annonces avec la création de neuf agropoles dans le pays pour répondre au besoin de production en masse de ce que nous consommons.
Il a expliqué la politique de la subvention de certains produits stratégiques comme les produits pétroliers pour lesquels il vante les efforts considérables du gouvernement. Il touchera également le cœur du problème sans toutefois annoncer de grandes mesures pour contrer cette problématique. Celle des grands spéculateurs, ces commerçants de la chaîne de la grande distribution qui créent vraiment la grande misère au pays. Ils ont des cartels, ils ont le monopole, ils influencent les circuits de distribution, font de la rétention pour provoquer des pénuries et augmenter les prix.
Le premier ministre a dit que l’état va intensifier les contrôles sans toutefois les indexer ouvertement. Il laisse le soin aux consommateurs de quitter le statut de passifs qu’ils se sont imposés pour devenir des consommateurs actifs qui dénoncent ces contorsions du marché local.

A-t-il convaincu son auditoire avec ses explications et propositions ?

Difficile de répondre à cette question dans un pays où les instituts de sondage n’ont pas pignon sur rue. Toutefois, le site Abidjan.net nous donne une piste d’appréciation. Dans le sondage d’opinion qu’il mène souvent sur les grandes questions du pays, il a soumis cette question aux internautes d’apprécier le grand oral du Premier ministre. Et dans leur majorité (56%), les intervenants ont répondu qu’ils n’étaient pas satisfaits. Ce n’est là qu’un sondage qui n’a pas pris en compte certains paramètres d’appréciation.

Toutefois, il situe sur le fossé qui sépare encore gouvernants et gouvernés sur la perception de l’inflation qui plonge les foyers dans le désarroi.

Très souvent les autorités ivoiriennes préfèrent botter en touche en avançant que l’inflation est un phénomène mondial sans regarder comment ces pays auxquels l’on se compare luttent contre le phénomène. En Europe par exemple la Banque centrale a un pouvoir dont il peut user pour juguler certains phénomènes économiques comme l’inflation. A ce sujet un analyste vivant en Belgique que nous avons interrogé a fait cette observation :
« Je sens à distance que les gens s’appauvrissent au pays pour la simple raison que les dépenses ont augmenté. C’est pareil ici mais eux, ils ont la planche à billets qu’ils nous ont confisquée. Un dollar fort face à l’euro les arrange puisqu’en majorité ils sont tous plus exportateurs qu’importateurs. C’est différent chez nous où on importe presque tout du riz à l’oignon. Si la BCE (Banque centrale européenne) décide de « faire tourner la planche à billets », cela veut dire qu’elle va émettre de la monnaie ex nihilo, c’est-à-dire que la monnaie créée ne correspondra pas à une création de richesse. C’est un pouvoir régalien que la Bceao n’a pas ».

Nous avons donc urgence à agir en explorant toutes les solutions endogènes. A commencer par la réduction du gaspillage des ressources à travers la consommation des administrations publiques en électricité, eau, téléphone, internet, voyages de prestige… L’autre solution se trouve dans la révision de certains tarifs douaniers. De même ces meetings politiques onéreux d’hommage au chef de l’état qui sont de véritables gouffres financiers au seul profit des organisateurs.

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